Un traitement de substitution aux opioïdes par la méthadone, initié par des médecins généralistes volontaires et formés, est possible et à efficacité comparable à celui initié au sein de centres spécialisés. C’est ce que met en évidence l’étude ANRS Méthaville dont les résultats sont publiés dans la revue Plos One. Actuellement en France, la buprénorphine et la méthadone sont les deux traitements de substitution proposés. Si le traitement par buprénorphine peut être initié par les médecins généralistes, ce n’est pas le cas pour le traitement par méthadone. Le cadre légal en France impose que l’initiation d’un tel traitement se fasse au sein de centres spécialisés, la prise en charge par les médecins généralistes pouvant se faire une fois le dosage de méthadone stabilisé.
Une étude sur 221 toxicomanes
L’étude ANRS Méthaville est une étude randomisée qui s’est déroulée entre 2009 et 2012. Au total, 221 personnes dépendantes aux opioïdes souhaitant entrer dans un programme de méthadone ont été aléatoirement réparties en deux groupes : 155 ont initié leur traitement par méthadone chez un médecin généraliste en ville et 66 l’ont initié au sein d’un centre spécialisé. Les médecins généralistes participant à cette étude avaient déjà une expérience en matière de prise en charge de la dépendance aux opioïdes et/ou ont suivi une formation en addictologie. Ils ont également été formés pour la prescription de méthadone et étaient en contact avec le centre spécialisé participant à l’étude le plus proche.
Pendant la phase d’initiation (environ 2 semaines), chaque patient devait venir prendre sa dose quotidienne de méthadone à la pharmacie de ville (en contact avec le médecin généraliste) ou du centre spécialisé, selon les cas, afin de surveiller la dose prise. Cette phase d’initiation est particulièrement délicate et importante pour le patient, car c’est durant cette période que le dosage optimum est déterminé : ni surdosage, ni manque ne doit être constaté.
« Non infériorité »
Un an après l’initiation du traitement, la proportion de patients abstinents aux opioïdes s’est révélée être similaire dans les deux bras. L’engagement dans le traitement, c’est -à-dire l’initiation du traitement à la méthadone et la poursuite du programme jusqu’à stabilisation du dosage, est de 65% dans les centres spécialisés contre 94% chez les médecins généralistes. Aucun surdosage n’a été constaté durant la phase d’initiation. La satisfaction exprimée sur les explications prodiguées par le médecin est plus importante pour les patients ayant consulté un médecin généraliste. La rétention en traitement et l’abstinence durant le suivi étaient similaires dans les deux bras. L’étude ANRS Méthaville montre une «non-infériorité» de l’initiation du traitement à la méthadone par les médecins de ville par rapport à une initiation en centres spécialisés.
Le tout ambulatoire est possible
Cette étude démontre donc qu’il est possible de faire évoluer le système de prise en charge des usagers de drogue par voie intraveineuse. Néanmoins, comme le rappelle Patrizia Carrieri, premier auteur de l’étude, « la bonne réalisation de cette démarche est conditionnée par le volontariat des médecins généralistes, à leur formation et surtout doit être fondée sur leur collaboration avec un centre spécialisé et le pharmacien de référence. C’est un processus qui doit être encadré et qui nécessite une coopération de tous les acteurs de santé impliqués. »
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