Les allégations de santé attribuées à une consommation faible mais régulière de vin font l’objet d’une controverse passionnée. Dans le coin bleu : des donnéesépidémiologiques qui plaident, parfois, en faveur d’un effet bénéfique duresvératrol, un polyphénol de la classe des stilbènesprésent dans le raisin. Dans le coin rouge : une absence de mécanisme capable d’expliquer la supposée protection fournie par le vin vis-à-vis des risques cardiovasculaires ou de cancer.
Ce chaînon manquant pourrait bien avoir été découvert par des chercheurs de l’institut de recherche Scripps, en Californie, dans un article publié aujourd’hui dans la revue « Nature ». Selon Mathiew Sajishet ses confrères, le resvératrol activerait en effet un ancien mécanisme de réponse cellulaire au stress.
L’interrupteur de la réponse au stress
Le laboratoire dirigé par le Pr Paul Schimmel, où travaillent MathiewSajish et la plupart des auteurs, est spécialisé dans l’étude desaminoacyl-ARNt synthétases. Au cours de l’évolution, ces enzymes ont acquis d’autres fonctions que la simple production d’ARN de transfert chez les mammifères.
Lors de travaux précédents, un ancien membre de cette équipe de recherche avait montré qu’un type particulier l’aminoacyl-ARNtsynthétases, les TyrRS, agissaient également comme un interrupteur de la réponse cellulaire au stress. Lors d’une d’agression, les TyrRSpeuvent se rendre dans le noyau de la cellule pour y activer la protéinePARP-1, chargée de réparer l’ADN en cas de stress cellulaire.
L’activation de PARP-1 entraîne l’expression d’autres gènes comme lesuppresseur de tumeur p53 ou les gènes FOXO3A et SIRT6, connus pour prolonger la longévité cellulaire.
Détournement d’enzyme
Dans leur article, les auteurs expliquent que le resvératrol imite la structure de l’acide aminé Tyrosine, et est capable de se fixer sur laTyrRS, ce qui a pour effet de l’éloigner de son rôle dans la fabrication de protéines pour la consacrer à la réponse au stress cellulaire.
Plus important, ils montrent également que cette action positive duresvératrol est observable même à des doses très faibles. Il est donc envisageable qu’une consommation de deux verres de vin par jours serait suffisante pour enclencher un effet positif sur l’expression de ces divers gènes protecteurs.
« Nous pensons qu’il ne s’agit que du sommet de l’iceberg, explique lePr Paul Schimmel, il y a sûrement beaucoup d’autres composants qui imitent les acides aminés et dont l’action pourrait se révéler tout aussi positive. C’est ce sur quoi nous allons travailler à partir de maintenant. »
Damien Coulomb
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