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dimanche 25 novembre 2012


Psychiatrie : Des lobbys et des hommes


C’est à Coaraze, une fois n’est pas coutume, que le syndicat CGT réunissait récemment les membres de la Commission nationale de psychiatrie. Trois jours de travail autour d’un objectif central : que les actions de défense des patients,  des personnels et de l’outil de travail soient mieux coordonnées.
En région Paca, par exemple et ainsi que le regrettait Ghislaine Raouafi responsable fédérale et coordinatrice départementale, « les personnels sont trop tournées vers leur établissement, et chaque action est menée en aparté, sans coordination. Au niveau régional, nous avons un travail à faire en ce sens. » C’est ainsi que, pour amorcer les choses en quelque sorte, la Commission nationale s’est, de manière plutôt improbable, décentralisée de Montreuil à Coaraze. Le constat dressé n’est pas nouveau. Il est alarmant et la situation, sensiblement similaire à l’échelle du territoire tout entier, ne va pas en s’arrangeant. 

L’idée de ces journées de travail qui ont réuni une petite quarantaine de personnes, c’était d’ouvrir les débats à d’autres composantes civiles que celles de la psychiatrie. Monique Giraud-Lazzari, maire de Coaraze, s’est prêtée au jeu et a représenté le lien établit avec la cité. Le secteur médico-social était également figuré par le truchement de l’assistante sociale Colette Mô et de la psychologue Françoise Gasq pour illustrer les rapports étroits qu’entretiennent les deux disciplines. « Seuls, regrette Jocelyne Mangione, co-animatrice de la commission régionale, les mondes de la police et de la justice n’étaient pas incarnés », bien que des invitations fussent lancées. « Il faut que les rapports soient entretenus entre ces différents secteurs, insiste l’animatrice, car, dans le contexte de rupture de soins que l’on subit, ces rapports risquent d’être de plus en plus fréquents. » Alors qu’au fil du temps et fort des acquis de l’expérience, c’est le système de l’extra-hospitalier qui était privilégié, introduisant le principe de la sectorisation considéré par les professionnels comme le meilleur, c’est de plus en plus aujourd’hui remis en question, et les structures de proximité ferment à tours de bras. A Cagnes-sur-Mer par exemple, le centre médico-psychologique (CMP) va fermer prochainement ses portes. Le syndicat entend bien lutter pour le maintien du site mais la partie n’est pas gagnée. 
Délégation. C’est une précarisation des victimes qui est ainsi en route, avec cet affaiblissement de l’offre de soins. Ou alors, une sorte de délégation au privé. Pour ceux qui le peuvent. 
« Quand une personne, analyse Jocelyne Mangione, se rend compte que dans l’établissement qu’il fréquente, le docteur qui le reçoit n’est jamais le même, que les horaires sont de plus en plus restreints et que la structure ferme en été, le réflexe logique est de chercher un peu plus de stabilité. Où çà ? Chez un psychiatre privé, bien sûr. » 
Un autre des constats inquiétants dressés, qui découle également de l’appauvrissement de l’offre de soins, est celui de la médicalisation croissante présentée comme une solution. « Il existe un lobby pharmaceutique gigantesque, s’énerve le syndicat, que cette situation satisfait pleinement ». Les enfants sont de plus en plus médicalisés : « il arrive que des médecins proposent des anti-psychotiques à des enfants de 9 ans ! » explique Jocelyne Mangione. La surmédicalisation aujourd’hui remplace les barreaux d’hier et les électrochocs. 
Stéphane Barbas, pédopsychiatre à l’hôpital de Poissy St Germain revenait sur les préconisations, et revendications, de la CGT. La remise à plat de la loi sur la psychiatrie, l’arrêt de l’expérimentation des médiateurs de santé pairs-aidants (patients en rémission qui accompagnent les malades dans des démarches et dans des soins, moyennant une formation minimaliste, et qui ne se réduit pour la CGT qu’à de la démagogie pure), l’abolition des lois sur l’hospitalisation sans consentement et HPST. 
Le tout ramenant à une question fondamentale. Que veut-on pour nos malades ? Les abrutir médicalement et les punir pénalement ? Ou bien avons-nous une ambition un peu supérieure ? Question qui requiert de rapides réponses sous peine d’être confisquée, tant la première voie susdite prend de l’avance.
R.F.

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