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mardi 13 juin 2023

Le syndrome de Stendhal ou quand la beauté submerge

Dre Angela Speth  14 avril 2023

« Le beau commence comme la terreur », écrivait le poète Rainer Maria Rilke. Certaines personnes peuvent en effet présenter des troubles très marqués à la vue d'une oeuvre d'art… jusqu’à s’effondrer.

Comme on tombe amoureux...

Ce phénomène étrange connu sous le nom de syndrome de Stendhal, a été identifié et décrit par la psychiatre et psychanalyste italienne Graziella Magherini dans les années 80’. Responsable pendant de nombreuses années du service de psychiatrie de l'hôpital Santa Maria Nuova dans le centre historique de Florence, la Dre Magherini rencontre régulièrement des touristes profondément affectés par les peintures et l'architecture. Certains sont victimes de crises psychosomatiques qui lui rappellent un passage du livre « Rome, Naples et Florence » de Marie-Henri Beyle, alias Stendhal. L’écrivain y raconte comment il a « perdu la tête » dans la plus somptueuse des églises florentines, comme s'il était tombé soudainement amoureux :

« J'étais déjà dans une sorte d'extase par l'idée d'être à Florence, dans le voisinage des grands hommes [NdT : Machiavel, Michel-Ange et Galilée] dont je venais de voir les tombeaux... Les Sybilles du Volterrano [NdT : La peinture de la coupole de la Chapelle Niccolini, montrant la Vierge Marie couronnée, avec quatre sybilles] m'ont peut-être donné le plus vif plaisir que la peinture m'ait jamais fait... J'étais mort de fatigue, j'avais les pieds enflés et douloureux dans mes chaussures étroites, mais devant ce tableau, j'ai oublié tous mes maux... J'étais arrivé à ce point d'émotion où se rencontrent les sensations célestes données par les Beaux-Arts et les sentiments passionnés. En sortant de Santa Croce, j'avais un battement de cœur, la vie était épuisée chez moi, je marchais avec la crainte de tomber. »

Inspirée par ce témoignage, Magherini décide, en 1979, de baptiser ces crises de « syndrome de Stendhal » [également appelé syndrome de Florence]. Elle décrira plus tard 106 cas dans le livre « La Sindrome di Stendhal » publié en 1989.

Profil des « patients »

Dans son ouvrage, la psychiatre esquisse le profil des patients : généralement âgés entre 26 et 40 ans, un peu plus souvent des hommes que des femmes, ayant bénéficié d'une bonne formation scolaire (éventuellement aussi classique ou religieuse), ils ont tracé leur itinéraire de voyage en fonction de leur intérêt pour les arts. Plus de la moitié d'entre eux avaient déjà suivi un traitement psychologique auparavant. Ils viennent tous de l'étranger, notamment des États-Unis ou de régions européennes situées au nord des Alpes, où les œuvres artistiques anciennes sont plus rares. Si les Japonais gardent généralement la tête froide, c'est probablement lié au fait qu'ils voyagent habituellement en groupe ; les personnes voyageant seules et sans guide sont plus « vulnérables ». Les natifs de la région semblent « immunisés », probablement parce qu'ils baignent littéralement dans cette aura artistique depuis leur enfance.

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