Marie-Pierre Genecand Publié mercredi 30 mars 2022
SUISSE
Pendant cinquante-sept ans, Janina Turek a noté des milliers de faits du quotidien. Au théâtre du Grütli, Daria Deflorian et Antonio Tagliarini mettent de la chair autour de ces chiffres. A voir encore ce mercredi soir
En ouverture, le duo recrée la mort de Janina, dans la rue, le 11 novembre 2000 — © Silvia Gelli
Sept cent quarante-huit cahiers écrits de 1943 à 2000 et contenant les mentions de, notamment, 15 786 repas, 84 523 personnes aperçues dans la rue, 36 822 visiteurs reçus, 38 196 coups de téléphone passés, 3517 livres lus ou encore 70 042 films et programmes télé regardés. L’encre utilisée est toujours bleu foncé, l’écriture, régulière et sans rature, et des couleurs permettent de distinguer les 33 catégories de faits que Janina Turek, habitante de Cracovie, a consignés pendant cinquante-sept ans.
Le quotidien de Janina Turek recensé avec application © Creative commons
Proche de l’art brut, sa démarche a fasciné le duo d’artistes Daria Deflorian et Antonio Tagliarini, adeptes d’un théâtre sensible. Dans Reality, à voir encore ce mercredi 30 mars au Grütli, à Genève, ils imaginent des embrasements à partir de ces listes et tissent un ballet raffiné autour de l’idée du vivant.
Un choc, une déferlante
Tout a commencé ce jour de 1943 où, ayant réuni de l’argent pour pouvoir faire libérer son mari arrêté par la Gestapo, Janina Turek est arrivée trop tard: Czesław avait déjà été déporté à Auschwitz. Là voilà, enceinte de cinq mois, de retour de sa mission, hagarde, interdite sur le paillasson de l’appartement de ses parents.
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