Par Solène Cordier Publié le 26 janvier 2022
Ce texte, soutenu par le gouvernement, doit être examiné en première lecture à l’Assemblée nationale mercredi 26 janvier.
Il sera à la fois question d’intime et d’égalité entre les femmes et les hommes à l’Assemblée nationale, mercredi 26 janvier. Les députés se pencheront en première lecture sur une proposition de loi (PPL), défendue par le député (La République en marche) de l’Hérault, Patrick Vignal, visant à faciliter les procédures de changement d’état civil. Soutenue par le gouvernement, qui a engagé pour ce texte la procédure accélérée, cette PPL prévoit plusieurs changements à large portée symbolique sur un sujet sensible : le nom de famille.
Le principal consiste à autoriser tout adulte qui le souhaite, une fois dans sa vie, à prendre le nom de son deuxième parent, en l’ajoutant ou le substituant à son nom actuel. Alors que plusieurs milliers de personnes s’adressent chaque année au ministère de la justice pour changer leur nom (ils étaient 3 567 en 2021), une procédure longue et qui a un coût, il suffira de remplir en mairie un simple formulaire Cerfa pour faire valoir ce nouveau droit. A l’heure actuelle, environ 35 % des demandes sont rejetées, selon une estimation transmise au Monde par la chancellerie.
La proposition de loi répondra ainsi à la souffrance exprimée par de nombreux adultes « qui ont du mal à porter le nom de leur géniteur », telles que les victimes de violence ou d’abandon pendant leur enfance, a expliqué Patrick Vignal lors de l’examen du texte en commission des lois, où il a été adopté le 19 janvier. C’est le cas de Véronique, 50 ans (elle a souhaité taire son nom, comme les autres personnes citées par leur seul prénom).
Cette Rouennaise porte depuis la petite enfance le nom de son ex-beau-père. « Cet homme m’a reconnue quand j’avais 5 ans, après avoir épousé ma mère », explique la chargée de mission en ressources humaines. Pendant de nombreuses années, ce dernier lui inflige « des violences psychologiques et sexuelles ». « Ça s’est arrêté quand j’ai dit stop, à 16 ans, mais je porte encore aujourd’hui son nom, ce qui me fait revivre sans cesse ce que j’ai vécu sous sa domination », témoigne Véronique.
« Milliers de témoignages »
En février 2017, elle a bien tenté d’engager les démarches nécessaires pour changer d’état civil : publication de sa demande au Journal officiel et courrier adressé au garde des sceaux, accompagné d’une lettre de son médecin traitant. « J’y ai mis mes tripes, mon cœur, en écrivant que j’avais été violée par celui dont je porte le nom et en mentionnant que j’étais sous traitement antidépresseur, avec un suivi psychologique et psychiatrique »,détaille-t-elle.
La proposition de loi répondra ainsi à la souffrance exprimée par de nombreux adultes « qui ont du mal à porter le nom de leur géniteur », telles que les victimes de violence ou d’abandon pendant leur enfance, a expliqué Patrick Vignal lors de l’examen du texte en commission des lois, où il a été adopté le 19 janvier. C’est le cas de Véronique, 50 ans (elle a souhaité taire son nom, comme les autres personnes citées par leur seul prénom).
Cette Rouennaise porte depuis la petite enfance le nom de son ex-beau-père. « Cet homme m’a reconnue quand j’avais 5 ans, après avoir épousé ma mère », explique la chargée de mission en ressources humaines. Pendant de nombreuses années, ce dernier lui inflige « des violences psychologiques et sexuelles ». « Ça s’est arrêté quand j’ai dit stop, à 16 ans, mais je porte encore aujourd’hui son nom, ce qui me fait revivre sans cesse ce que j’ai vécu sous sa domination », témoigne Véronique.
« Milliers de témoignages »
En février 2017, elle a bien tenté d’engager les démarches nécessaires pour changer d’état civil : publication de sa demande au Journal officiel et courrier adressé au garde des sceaux, accompagné d’une lettre de son médecin traitant. « J’y ai mis mes tripes, mon cœur, en écrivant que j’avais été violée par celui dont je porte le nom et en mentionnant que j’étais sous traitement antidépresseur, avec un suivi psychologique et psychiatrique »,détaille-t-elle.
A quelques centaines de kilomètres de Rouen, David Lucchini, 39 ans, témoigne de la même détermination à effacer le nom paternel (Deplanque) qui figure sur ses papiers d’identité, mais qu’il a, dans sa vie quotidienne, déjà rayé au bénéfice de son nom d’usage, celui de sa mère. « Mes parents ont divorcé quand j’avais 8 ans, et, à partir de cet âge-là, je n’ai pratiquement pas revu mon géniteur », confie cet habitant de Marseille, qui travaille dans le milieu de l’audiovisuel.
Lui aussi a essuyé un refus du ministère de la justice, en 2009. « Au départ, je voulais le faire pour ma mère et mes grands-parents, qui m’ont élevé. Maintenant, c’est devenu un projet de vie, je me dis que si j’arrive à enlever ce nom, j’aurai fait ce qu’il fallait », considère-t-il. D’autant plus depuis la naissance de son enfant, il y a sept ans. « C’est devenu une vraie motivation, que mon fils puisse porter le nom Lucchini. » En attendant, ils ont choisi, avec son épouse, de faire porter à leur fils le nom de famille maternel.
Des récits comme ceux-là font écho à « des milliers de témoignages », reçus depuis deux ans par le collectif Portemonnom, fondé en janvier 2020 par Marine Gatineau Dupré, qui a largement œuvré pour que la PPL voie le jour. « Au départ, j’avais lancé une pétition et un questionnaire après avoir été confrontée à une énième difficulté, parce que je ne porte pas le même nom que mes enfants, résume cette mère séparée de deux enfants, conseillère municipale à Palavas-les-Flots (Hérault). Je me suis rendu compte qu’il y avait un vrai problème de société concernant le nom de famille. »
« Petites humiliations du quotidien »
Parmi celles qui ont fait part au collectif de leurs « petites humiliations du quotidien » figure Marion, une mère de 31 ans. Sa dernière mésaventure remonte à quelques mois. « Je me suis présentée à l’école pour venir chercher ma fille, comme d’habitude, mais il y avait une personne remplaçante, qui ne me connaissait pas. J’ai dû argumenter pour justifier que j’étais bien sa mère », relate la Finistérienne. Séparée de leur père depuis novembre 2020, elle se heurte à son refus d’ajouter son propre nom de famille à celui de ses enfants, dont elle a la garde. « Quand on a été devant le juge, je n’ai pas pensé à ça. Sur le coup, ça ne semble pas très important, mais sur le long terme, ça fait mal de devoir sans cesse se justifier d’être bien la maman », ajoute-t-elle.
Face à ces complications rapportées par de nombreuses mères séparées qui sont contraintes de se munir de leur livret de famille pour attester de leur filiation en diverses circonstances, le collectif Portemonnom milite pour une automatisation du double nom de famille à la naissance, dans la continuité de la loi de 2002, qui autorise les parents à transmettre le nom du père, de la mère, ou des deux, à leur descendance.
Sans aller aussi loin, la PPL examinée mercredi prévoit d’inscrire dans le code civil la possibilité, pour les parents d’enfants mineurs, d’ajouter le nom du deuxième parent comme nom d’usage. Dans la version adoptée en commission, la démarche est cependant suspendue à l’accord conjoint des deux parents, avec un recours possible devant le juge en cas de mésentente. Une condition que le collectif Portemonnom espère bien voir disparaître lors des débats en séance, par voie d’amendement.
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