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mardi 1 décembre 2020

Pour les soignants, le vaccin n’est pas une évidence


Par Eric Favereau — 30 novembre 2020

Une équipe du Samu de Lyon lors du transfert d’un patient à l’hôpital, mi-novembre.

Une équipe du Samu de Lyon lors du transfert d’un patient à l’hôpital, mi-novembre. Photo Hugo Ribes. ITEM

Le taux, assez bas, de vaccinés contre la grippe dans les établissements de santé fait craindre une certaine réticence des professionnels à adopter le sérum anti-Covid.

«La vaccination contre la grippe ? Evidemment oui», lâchait avec un brin d’agacement, en 2019, un chef de service d’un grand centre hospitalier parisien. Pour autant, il l’avouait, lui-même n’était pas vacciné. Et ce n’était pas un cas à part. En France, les professionnels de santé se protègent toujours distraitement contre la grippe saisonnière. Ainsi, selon Santé publique France, la couverture vaccinale nationale du personnel soignant lors de la saison 2018-2019 était médiocre. Dans les établissements de santé, elle est estimée à 35 %. Elle varie selon la profession, puisque 67 % médecins sont vaccinés, 48 % des sages-femmes, 36 % des infirmiers. Chez les aides-soignants, le niveau tombe à 21 %. Dans les Ehpad, le taux global est estimé à 32 %.

Colère

Les Français ne se révèlent donc pas les seuls à être sceptiques vis-à-vis de la vaccination. Ceux censés défendre cette pratique le sont aussi. Une faiblesse d’autant plus grave que non seulement ces derniers peuvent être infectés par le virus grippal, mais ils peuvent le transmettre, qui plus est à des populations fragiles. Quand Agnès Buzyn est ainsi arrivée au ministère de la Santé en 2017, ce fut sa première colère et sa première menace. «Si la situation ne s’améliore pas, on devra envisager une obligation pour les professionnels de santé», confiait-elle. Trois ans plus tard, l’enjeu de l’acceptabilité du vaccin pour enrayer l’épidémie de Covid-19 se fait pressant.

De fait, le faible taux de vaccination contre la grippe renvoie à un symptôme du mal sanitaire français, montrant combien les principes élémentaires de santé publique n’arrivent pas à s’imposer, même si l’analyse mérite d’être approfondie face à d’importantes disparités. La couverture varie en fonction de la profession, le taux diminuant avec le niveau d’études, en haut donc les médecins, en bas les aides-soignants. Il est également dépendant de l’âge (plus le personnel de santé est âgé, plus il se vaccine), mais aussi du sexe. Les hommes se vaccinent davantage contre la grippe (47,1 %) que les femmes (32,8 %), sans qu’on puisse l’expliquer. Enfin, il y a de grandes variations géographiques. La couverture antigrippale chez les professionnels de santé est ainsi estimée à 11,8 % dans les départements d’outre-mer et à 35,4 % en métropole, la région Auvergne-Rhône-Alpes faisant office de moins mauvais élève.

Gripette

Qu’en déduire de ce paysage éclaté ? D’abord, que les professionnels de santé sont, comme le reste de la population, indifférents ou distants sur ces questions. Quant aux réticents déclarés, selon Santé publique France, ils justifient leur position en mettant en avant leur «doute de l’efficacité du vaccin antigrippal», quand d’autres pointent une «crainte des effets secondaires». Là aussi, les arguments sont classiques, mais ils restent peu contrés par les autorités. Dans les enquêtes d’opinion, il est intéressant de noter que ceux qui hésitent à se faire vacciner se plaignent de l’absence d’une communication claire et continue sur la nécessité de la vaccination. D’autres notant plus prosaïquement : «Si mon chef de service a une position claire, alors oui, je me ferai vacciner.»

Dans les pays nordiques, c’est la quasi-totalité des soignants qui sont vaccinés, sans qu’il soit question d’obligation. Au Danemark, le taux dépasse 90 %. «En raison de leur exposition professionnelle, le risque d’infection grippale est bien plus élevé chez les soignants que dans la population générale, rappelle l’Académie de médecine. Ils sont souvent impliqués comme probable source de contamination, sachant que 50 % à 80 % d’entre eux continuent de travailler quand ils sont infectés.» Bref, même contre une grippette, un vaccin peut être sacrément utile, pour soi, comme pour les autres.


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