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vendredi 24 janvier 2020

Mariage : le swag au doigt

Par Emmanuèle Peyret — 

Exit le repas interminable comme celui de Gervaise narré magnifiquement par Zola.
Exit le repas interminable comme celui de Gervaise narré magnifiquement par Zola. Photo Maud Chalard


Les tendances 2020 s’exposent ce week-end lors d’un salon à Paris. Meringues, banquets et châteaux sont passés de mode. Les futurs mariés privilégient plutôt des noces sans chichi, plus écolos et faites maison.

    Le mariage, ce sacrement, ce féerique jour de ta vie de jeune fille, les festivités, la cérémonie, les invités, tout ça… Du moins, à en croire les blogs qui pullulent sur la question et recommandent de s’y mettre un an, voire deux, à l’avance, histoire de ne pas se louper. Une affaire sérieuse, avec un budget moyen de 11 000 euros (trois à quatre fois moins que dans les pays anglo-saxons), sachant que le traiteur et le lieu de réception représentent les postes de dépenses les plus importants, soit 50 %.

    Nous avions décortiqué les sites et blogs mariages en 2018 - faut-il le rappeler, l’auteure de ses lignes a enfin réussi à se faire épouser le jour de l’anniversaire de Johnny par son fiancé martyr depuis vingt-deux ans, lors de noces parfaitement low-cost étudiées poste par poste, avec suppression du traiteur et du lieu de réception, en faisant tout faire par les invités reçus princièrement dans le jardin.
    Alors, à l’occasion du Salon du mariage (1), qui existe depuis vingt ans et regroupe tous les acteurs de la profession, et en tant que spécialiste incontestée de la question, on s’est penchée sur les tendances mariage 2020.
    L’événement est «hautement influencé par les réseaux sociaux et en particulier Instagram depuis une dizaine d’années», explique Stéphane Seban, organisateur et créateur du salon. Les futurs mariés, pointe-t-il, suivent les tendances de mariage people et «deviennent de cette manière des clients beaucoup plus avertis et arrêtés dans la sélection des services qu’ils attendent pour leur grand jour. Nombreux sont ceux qui ont, par exemple, opté pour un mariage à l’étranger, en s’inspirant des célébrités qui brisent les traditions et le partagent sur les réseaux».
    Sachant que le mariage se porte bien : «Plus de 227 000 noces ont été célébrées en 2019, dont 15 % pour des raisons religieuses. Un nombre très stable sur les dix dernières années. Mais on se marie plus tard, les femmes sont en moyenne âgées de 35 ans contre 38 ans pour les hommes», poursuit le fondateur du salon (2). Revue de la hype mariage 2020, poste par poste, avec ce constat indubitable : on était ultraprécurseurs dans le low-cost bohémo-champêtro-Do It Yourself (DIY).

    La tenue

    Triste nouvelle, la robe meringue de féerique princesse court à sa perte. Notre époque instagramée réclame des robes en apparence plus simples qui pourront être reportées plus tard : ainsi la robe de fée druidique de votre servante à 30 boules qui ressert à chaque cérémonie de changement de Lune. Car la grande tendance aujourd’hui tient non pas tant à la robe en soi, mais se niche dans les détails, comme le voile d’Hailey Baldwin, mannequin et jeune épouse du chanteur Justin Bieber, qui y a fait coudre «Till Death Do Us Part» (jusqu’à ce que la mort nous sépare) : on inscrit un petit mot pour son futur époux, c’est trop petit cœur avec les doigts, une citation qui nous touche (genre «je voudrais être une larme pour naître dans tes yeux, vivre sur tes joues, mourir sur tes lèvres»), ou encore la date de la première rencontre. On note aussi une percée de la robe sur mesure, de la tenue deux en un (jupon amovible qui fera sensation au coquetèle mais qu’on ne met pas pour la mairie), du bohème chic, de la robe avec des perles sur un tissu près du corps, ou même de la robe de location so décroissante so écolo. Avec 11 % du budget, il faut que ça se voie et que ça soit original parce que ça va être vu : 38 % des futures mariées posteront les photos de leurs noces sur les réseaux sociaux. Le hic, c’est le marié, qui opte de plus en plus pour des costumes sur mesure avec une coupe slim fit et nœud papillon accordé aux couleurs des accessoires de la mariée. Et des matériaux comme le velours ou le jacquard. Non, mais le jacquard, tu le crois, ça ?

    Les bagues

    Ah, le sketch à la bijouterie, les heures passées à étudier les catalogues d’or blanc, de platine, d’or jaune - la tendance de cette année. Comme l’offre n’a jamais été aussi variée et personnalisable, l’une des orientations nettes des mariages actuels est d’aller ensemble choisir les alliances ou l’anneau de fiançailles, histoire de ne pas être déçus. Ça casse un peu le côté genou à terre avec l’écrin en velours tenu par Hugh Grant mais on vit une époque pragmatique, alors il vaut mieux faire les essayages en couple. «Une nouvelle expérience symbolique que de concevoir ces anneaux ensemble à l’image du couple», selon l’organisateur du salon… 5 % du budget quand même, c’est énorme pour deux bagouses.

    Le repas

    Exit le repas interminable comme celui de Gervaise narré magnifiquement par Zola. On garde l’idée de la grande tablée ultrachaleureuse, avec priorités écologiques de saison comme les produits locaux, et on gaspille moins, et on évite le plastique pour réduire l’impact environnemental du mariage. Avec ça, on constate évidemment une augmentation des menus végétariens, vegan, sans produits laitiers, particulièrement depuis ces deux dernières années. Tendance aussi, le «viens avec ton plat» (c’est très décroissant et on n’a rien à faire, surtout), les foodtrucks de location, les bars à (fromages, crustacés, donuts, etc.). On l’a dit, la réception, c’est près de 50 % du budget, c’est dire que le DIY réduit sensiblement la facture. On n’a pas d’infos sur la tendance cubi nuptial, mais on peut avancer que les vins bios, naturels, les «petiproducteurloco» vont faire une grosse percée dans le tonneau.

    Le lieu

    Pareil que pour la meringue formatée accompagnée de son pingouin en noir : pour avoir le mariage le plus instagramable possible, le tradi est délaissé. Fini le foutu château en banlieue ou en Normandie où tu restes coincé tout le week-end, les futurs mariés cherchent des lieux uniques qu’ils pourront décorer à leur image : lieux «originaux», belles vues, ton propre jardin, voire, assez hype aussi, le chalet vosgien - il semblerait que les mariages d’hiver avec ambiance raclette et feu de bois séduisent de plus en plus. En robe de dentelle et petits escarpins, on le sent moyen dans la neige par -5 °C mais les créateurs proposent de plus en plus aux mariées gilets, caracos, blazers, en jean, en cuir ou en maille. Côté déco, où que ça se passe, on veut du sobre et du simple, avec accent sur les compositions florales, mais attention, de la fleur de saison, de la fleur cultivée locale ou sauvage, que les invités remporteront avec eux en souvenir et pour pas gâcher. Du bois, de l’authentique, fini les paillettes et le bling. Sauf si on veut faire soirée décalée Travolta.

    Les cadeaux

    De plus en plus tendance, les futurs mariés ajouteraient à leur liste de cadeaux de mariage classique (pinces à escargots, friteuse, etc.) la possibilité pour leurs invités de faire des dons aux associations caritatives de leur choix. Jamais vu personnellement mais pourquoi pas ? 7 % du budget sont consacrés à la lune de miel, donc suivant le budget c’est le Campanile d’Arpajon ou un petit mois à Aspen. Rayon cadeaux, ceux faits aux invités dépendent évidemment dudit budget : dragées, bougies, bonbons ou joli sac décoré de l’inscription «HM, 19 May, St George’s Chapel, Windsor Castle», rempli de jolies choses pour les noces de Meghan et Harry, magnet, badge, carte du château, grande pièce en chocolat, bon de réduction à la boutique du château de Windsor. Revendus à prix royal sur eBay dès le lendemain, paraît-il.

    La durée des festivités

    On peut partir sur un simple déjeuner entre intimes ou aller fêter ça à Saint-Barth, au hasard, pour une semaine : l’idée, c’est le mariage le plus perso possible. On compte 2 % du budget total pour égayer les gens et, les festivités, ce n’est plus du tout Roger et son orchestre avec le bal sous la boule à facettes mais des spectacles, des animations : danseuses, humoristes (seigneur !), magicien, que sais-je encore, un chevalier des templiers pour croiser le fer avec les invités en tenue d’époque ? Oui, on l’a fait. Très bien vu aussi, les petits ateliers : couronne de fleurs, bar à tatouages éphémères, peinture sur soie, n’importe quoi pour les occuper, quoi.

    L’enterrement de vie de jeune fille et de jeune garçon

    Cette belle tradition du XVIIIe siècle rencontre toujours un franc succès en France. Rappel des faits : entourés de leurs témoins, les futurs mariés célèbrent leurs derniers jours en tant que célibataires en allant se bourrer la gueule ou dans un bar à strip-teaseuses ou dans un bar à strip-teaseurs (il y a des variantes mais c’est l’idée, chacun de son côté parce qu’après, c’est fi-ni de rigoler). Pour autant, avec l’âge moyen des mariés qui avance, la demande pour un nouveau type d’enterrement de vie de célibataires est née. Et, nous apprennent les tendanceurs du Salon, cette consternante nouvelle de l’EVJC : l’enterrement de vie de jeune couple. Autrement dit, une fête géante ou un voyage regroupant tous les amis proches et bien sûr les futurs mariés. Mais ça ne s’appelle pas un mariage, ça ?
    (1) Les 25 et 26 janvier à la Porte de Versailles. 300 exposants et 40 000 visiteurs attendus. Info plus : il suffit de télécharger son entrée gratuitement en allant sur lesitedumariage.com.
    (2) En 2018, 235 000 mariages ont été célébrés (contre 228 000 en 2017). Parmi eux, 6 000 concernaient des couples de même sexe. Source : Insee.

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