Le Monde
« Les Habilleuses » : des vêtements pour les sans-abri, un défi à relever
Jean-Louis Mahé et Gill Sgambato ont filmé six apprenties stylistes et les quatre sans-abri qu’elles doivent habiller.
LE MONDE | | Par Murielle Joudet
L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR
Les Habilleuses est l’histoire d’un défi à relever : six jeunes femmes en DMA (diplôme des métiers de la mode et des arts) doivent confectionner des vêtements sur mesure pour quatre sans-abri. La caméra de Jean-Louis Mahé et Gill Sgambato capte toutes les étapes de cette rencontre : la prise en note des besoins particuliers des sans-abri, les tâtonnements de la confection, l’essayage. On plonge également au cœur de ces deux mondes, celui de ces apprenties sensibles, intelligentes et passionnées, et de ces quatre sans-abri qui, malgré la brutalité de leur situation, font preuve d’une bouleversante jovialité et d’une résilience à toute épreuve.
Sans misérabilisme
Documentaire pragmatique, et en cela formellement peu ambitieux, Les Habilleuses réussit pourtant à soutenir l’intérêt : on découvre l’épreuve quotidienne de la marginalité et, pour autant, le regard des deux documentaristes est dépourvu de toute trace de misérabilisme.
En recueillant leurs exigences vestimentaires, Les Habilleuses rendent à ces hommes et femmes une chose précieuse : leur capacité à avoir des besoins et des envies qui n’appartiennent qu’à eux et qui ne dépendent plus d’une charité qui agit de manière indistincte. Le vêtement est, quant à lui, un trait d’union entre ces deux mondes, mais se pare également d’une évidente dimension métaphorique puisqu’il est au fond le premier des abris.
Documentaire français de Jean-Louis Mahé et Gill Sgambato (1 h 25). Sur le Web : cinesaintandre.fr/fr/prochainement
Le choix de "l'Obs"
♥♥♥♥ "Les Habilleuses", par Jean-Louis Mahe et Gill Sgambato. Documentaire français (1h25).
Les habilleuses sont ces rayonnantes filles de 20 ans du lycée Paul-Poiret, à Paris, en train d'apprendre le beau métier de costumière de théâtre. Un temps, elles ont couru la ville pour comprendre la vie des sans-abri, à qui elles ont posé cette question : quel vêtement inventer qui rendrait le quotidien meilleur ? La caméra suit les conversations, puis la fabrique, dans les ateliers, d'ingénieux prototypes : un manteau amovible se transforme en sac de couchage, une veste se déplie en tente, le pantalon est capitonné sur les fesses, de grandes poches antivol sont cousues, et des baleines sont fixées sur une capuche grande comme une capote de poussette. C'est l'intelligence au service d'autre chose que soi-même dans un film d'une poésie renversante.
Anne Crignon
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