L’« humanitude » est le seul label qui renseigne résidents et familles à la recherche d’un Ehpad sur la qualité de sa prise en charge.
« Bonjour Madame D., comment allez-vous aujourd’hui ? » Quand elle croise une résidente, Blandine Marcelli se baisse pour la regarder dans les yeux et lui prendre la main. Madame D. est atteinte de la maladie d’Alzheimer. Elle vit depuis douze ans aux Magnolias, à Ballainvilliers dans l’Essone, un Ehpad privé à but non lucratif souvent cité en exemple. « Elle ne verbalise pas, elle sort des sons, mais j’arrive à la comprendre, explique l’infirmière. Je vais savoir si elle a soif, si elle a besoin qu’on passe du temps avec elle. »
Aux murs sont placardées des affiches : « Les bons gestes de la bientraitance : je vous regarde, je vous parle, je vous prends la main ». L’établissement applique les principes de l’« humanitude », une méthode mise au point par deux anciens professeurs de sport, Yves Gineste et Rosette Marescotti. Une quinzaine d’établissements sont aujourd’hui labellisés en France, et une soixantaine est en cours de labellisation, comme l’Ehpad des Magnolias. L’humanitude est le seul label qui renseigne résidents et familles à la recherche d’un Ehpad sur la qualité de sa prise en charge. Sinon, ils n’ont que le bouche-à-oreille et des visites trop rapides pour se faire une idée.
Ecart entre valeurs et pratiques
Le principe ? « L’organisation doit s’adapter à la personne, pas l’inverse », résume la directrice, Isabelle Burkhard. Ici, le personnel frappe à la porte des chambres avant d’entrer. Aucun soin n’est forcé. Si une toilette est refusée, elle sera reproposée plus tard. Les résidents sont aidés à se mettre debout au maximum. La parole, le regard, le toucher sont mobilisés en permanence.
« Il y a un écart entre les valeurs de bientraitance auxquelles les soignants adhèrent et les pratiques, analyse Yves Gineste. Les professionnels du soin n’ont pas appris à entrer en communication avec les personnes dont ils s’occupent. » « Un malade d’Alzheimer ne peut réagir qu’avec ses émotions, complète Rosette Marescotti. Si quelque chose lui déplaît, il peut hurler, cracher, va être catalogué très agressif et sera traité avec des neuroleptiques. »
« Culture de l’acte »
La méthode bouscule les habitudes. « A l’école, on apprend à commencer la toilette par le visage, alors qu’ici on le fait en dernier, car les zones vascularisées sont les plus sensibles, relève Laurinda Figueira, assistante de soin en gérontologie. On ne fait pas à la place des patients, on les aide à faire. Certains soignants qui ont une culture de l’acte ne s’y retrouvent pas. »
« Tout n’est pas parfait », prévient Annie Escoda, la présidente du conseil de vie sociale de l’établissement, dont la mère vit aux Magnolias depuis dix ans. Mais elle relève surtout des soucis techniques (problèmes de chauffage, fenêtres ou barrières de lit coincées), tout en appréciant la démarche « sans maltraitance » et l’absence de médication trop lourde.
La direction estime sa situation « plus confortable que la moyenne » en termes d’effectifs, mais le coût reste maîtrisé : de 2 000 à 2 500 euros par mois selon le niveau de dépendance. Pour l’établissement, les dépenses en formation se sont élevées à 37 000 euros en 2017, soit 10 % du budget formation de tout l’hôpital gériatrique les Magnolias, dont fait partie l’Ehpad. « Un bon investissement », juge Mme Burkhard.
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