| 21.11.2015
Le neurobiologiste et chirurgien qui découvrit la
chlorpromazine, la première molécule antipsychotique, utilisée notamment pour
soigner la schizophrénie, est né à Hanoï le 21 novembre 1914 où son père était
officier médecin des troupes coloniales. De retour en France après le décès de
son père frappé par le tétanos alors qu'il avait cinq ans, Laborit et sa
famille rentrèrent en France. Malgré une tuberculose contractée alors qu'il
avait douze ans, le jeune Henri poursuivit ses études au Lycée Carnot, à Paris.
Après avoir décroché son bac et obtenu un certificat de sciences physiques,
chimiques et naturelles de la Faculté des sciences, Laborit s'inscrivit à
l'École principale du service de santé de la Marine, à Bordeaux et fit donc ses
premiers pas de médecin dans la Marine nationale. Pendant la Deuxième Guerre
mondiale, il servit ainsi sur plusieurs bâtiments dont le " Sirocco "
qui fut coulé le 31 mai 1940 lors de l’évacuation de Dunkerque, ainsi que sur
l’" Emile-Bertin " lors du débarquement d’Anzio en janvier 1944,
ainsi que lors du débarquement en Provence.
Le découvreur de la chlorpromazine et de
l’hibernation artificielle
La guerre finit, Laborit exerça dans les hôpitaux de
Lorient et Bizerte (Tunisie) avant d'être muté en 1949 au laboratoire de
physiologie de l'hôpital du Val-de-Grâce où son activité s’orienta vers la
recherche. C'est là, en collaboration avec les psychiatres de l'hôpital
Sainte-Anne qu'il étudia les phénothiazines avant de découvrir en 1951 la 4 560
RP chlorpromazine, connue aussi sous le nom de Largactil, premier médicament
antipsychotique utilisé notamment pour soigner la schizophrénie. Laborit
profita aussi de son passage au Val-de-Grâce pour mettre au point la technique
de l'hibernation artificielle, qui allait révolutionner la chirurgie.
Après s'être orienté vers l'étude des mécanismes liés
au stress, Henri Laborit reçut en 1957 le Prix Albert Lasker pour la recherche
médicale. La notoriété que lui apporta ce prix et l’argent récolté grâce à la
commercialisation de la chlorpromazine lui permirent alors de poursuivre ses
recherches dans le laboratoire d'eutonologie qu'il dirigea à l’hôpital
Boucicaut, créé comme une association de loi 1901 et qu’il ne finança qu’avec
les ventes de ses brevets et ses droits d’auteurs (mais aucune aide de l’État).
tout en restant personnellement rémunéré par le Service de santé des Armées.
Parallèlement, le neurobiologiste créa la revue " Agressologie "
qu'il dirige jusqu'en 1983.
Synthétisation du GHB
Laborit fut aussi dans les années 1960 le premier à
donner sa vraie importance à la névroglie (ensemble des cellules gliales) et
aux radicaux libres. Pionnier, il le fut encore en étant le premier à
synthétiser le GHB (l’acide gamma-hydroxybutyrique), ce qui a ouvert la voie à
bien d'autres molécules de synthèse encore plus performantes.
Entre-temps, Laborit se fit petit à petit connaître
du grand public, publiant en 1968 son premier ouvrage de vulgarisation,"
Biologie et structure ", bientôt suivi d'un livre sur la biologie
comportementale " La Nouvelle grille " et d'une trentaine d'œuvres consacrées à la
philosophie scientifique et à la nature humaine.
" Mon Oncle d’Amérique ", le film d’Alain
Resnais qui le fit découvrir au grand public
Après être apparu en 1971 et 1972 dans l'émission
littéraire "Italiques ", Henri Laborit accéda définitivement à la
notoriété avec le film d'Alain Resnais " Mon Oncle d'Amérique " où le
savant explique ses travaux sur le conditionnement avec des expériences sur des
rats qui l’ont amené à développer le concept de l’« inhibition de l’action » et
qui expliquent dans quelles conditions de stress des rats isolés biologisent
celui-ci en ulcère gastrique.
En 1981, Laborit se vit octroyer le prix Anokhin,
l'une des plus prestigieuses récompenses médicales décernées en URSS, mais le
plus grand regret du chercheur fut de ne pas avoir reçu le prix Nobel. Selon
Pierre Huguenard, professeur émérite à la Faculté de Médecine de l’Université
de Paris XII, ce fut « à cause de l’hostilité du microcosme médical civil
français, et plus précisément parisien ».
Père de l’actrice Maria Laborit, du psychiatre
Jacques Laborit et grand-père de l’actrice Emmanuelle Laborit, ce franc-tireur
qui refusa de se fondre dans le moule habituel des chercheurs et des
scientifiques et qui chercha sans cesse à éviter le conformisme tant dans ses
méthodes de recherche que dans son comportement humain, mourut le 18 mai 1995.
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