Il est rare qu’après l’hospitalisation de son enfant une mère laisse un témoignage écrit des quelques jours d’anxiété qu’elle a vécu avec sa famille. Il est encore plus rare que son récit parvienne à éviter le pathos, à détourner la gravité des moments de stress, pour s’exprimer dans un registre plus onirique. C’est pourtant ce qu’a réussi la mère d’Henri et c’est ce qui nous a touché. Pédiatrie Pratique* livre son témoignage à l’état brut, avec toute sa justesse, sa poésie, sa part de candeur et de maladresses.
Voici donc l’histoire d’Henri Poster (toute ressemblance avec un personnage célèbre serait fortuite), âgé de 7 ans. Nous le précisons pour les besoins du récit, mais ce matin la question lui a déjà été posée à quatre reprises, ainsi d’ailleurs que la classe dans laquelle il est à l’école. Disons le tout de suite pour ne plus y revenir : CE2. Et, merci de ne plus le lui demander.
Trouvez plutôt des questions plus originales, par exemple :
– Combien de doigts de pied as-tu ? Celle-là, bizarrement, on ne la lui a jamais posée. C’est pourtant plus utile, dans un hôpital, de savoir combien de doigts de pied a un enfant que de connaître, à la veille des vacances d’été, la classe dans laquelle il évolue. Bref, revenons à nos moutons. Henri Poster, âgé de 7 ans et doté de 10 doigts de pied, a été victime de quelques troubles gastriques dont nous vous épargnerons le menu, accompagnés de surcroît de fortes fièvres. Après plusieurs journées passées dans son lit à se tordre de douleur et à vider son corps frêle, son père, d’un naturel inquiet mais néanmoins fort avisé, décida de l’emmener aux urgences pédiatriques, qu’il lui présenta comme le nouveau parc d’attraction à la mode.
Un nouveau parc d’attraction
– Urgences pédiatriques !s’exclama Henri. Quel drôle de nom. On ne pourrait pas plutôt aller au Parc Astérix ? Tous les copains de ma classe y sont allés, sauf moi.
– Non, non, répondit le père, inflexible. Tu verras, le nom est un peu bizarre mais tu ne seras pas déçu. Et je parie qu’en sortant, tu seras guéri.
Trouvant dans son petit corps malade les dernières ressources énergétiques pour se relever, Henri suivit son père, mi-curieux, mi-inquiet.
– C’est encore loin papa ? demanda-t-il au bout de dix minutes de trajet en voiture.
– Non, on y arrive, tu vois le grand H, c’est là : je leur ai téléphoné pour dire que tu arrivais et ils ont mis l’initiale de ton prénom partout pour nous indiquer le chemin et te souhaiter la bienvenue.
– Sympa, répondit Henri en laissant échappé un sifflement admiratif. Ils sont drôlement organisés. Ils font cela pour tout le monde ?
– Certainement pas, répliqua le père. Réfléchis un peu : dans ce cas, ils devraient mettre toutes les lettres de l’alphabet car, tu verras, tu ne vas pas être seul.
– Alors, dit Henri, il y a beaucoup de monde dans ce parc d’attraction ? Bizarre, jamais aucun de mes copains ne m’en a parlé.
– Nous y sommes, dit le père en ralentissant.
– Mais non, tu te trompes, répliqua aussitôt Henri. Regarde le panneau : il n’y a pas marqué « Urgences pédiatriques » mais « Hôpital ».
– Si, si, rétorqua le père. Regarde, sur ta gauche, le panneau en rouge, il y a bien marqué Urgences pédiatriques. Tu vas voir, je vais dire au gardien que nous allons dans le parc et il va lever la barrière pour que nous puissions entrer. Alors que si nous allions simplement faire une petite visite à l’hôpital qui est à côté, il nous dirait de nous garer dehors.
– Papa, tu me laisses le lui dire ?
– Bien sûr mon chéri.
– Bonjour Monsieur, je suis malade mais j’ai un papa génial : pour me guérir il m’emmène aux Urgences pédiatriques.
– Effectivement, lui répondit le gardien en souriant, il est génial ton papa.
– On voudrait deux billets, un adulte et un enfant de 7 ans. Avec ma maman, on demande toujours s’il y a des réductions pour les enfants. En tout cas, au Parc Astérix, ça marche.
– Ici c’est gratuit mon bonhomme, ce n’est pas un parc… Il ne put achever sa phrase car le père l’interrompit promptement.
– Je crois qu’ici on paie plutôt à la sortie n’est-ce pas ? En fonction du nombre de jours passés ?
– Génial papa, on peut rester plusieurs jours ? Comme à Eurodisney ? Là-bas, il paraît qu’il y a plein d’hôtels et que les gens y passent parfois une semaine. Dommage que j’ai si mal au ventre.
– On verra mon chéri, si tu es sage.
La barrière s’ouvrit et Henri découvrit avec étonnement le parc d’attraction. Une jolie allée bordée de bancs et de tables où étaient installés des hommes et des femmes à la mine plutôt sérieuse conduisait à l’entrée du bâtiment principal. Aucun enfant à l’horizon. À droite, un parking. Devant l’entrée stationnaient plusieurs ambulances et même un camion de pompiers. Tout cela lui paru bien décevant, lui qui s’attendait à un accueil en fanfare avec la grande parade.
– Dis papa, il y a beaucoup d’ambulances, c’est normal ?
– Oui, dit le père. Dans ce parc, certaines activités peuvent être dangereuses, c’est pourquoi on l’a placé à côté d’un hôpital. Ne t’inquiète pas, il ne t’arrivera rien, on choisira les attractions les plus douces.
– Tiens, dit Henri en sortant de la voiture que son père avait garée près d’un emplacement réservé aux médecins, voilà un monsieur sur un lit roulant. Tu crois que c’est une attraction dangereuse ? En tout cas, moi, j’ai tellement mal au ventre qu’elle me conviendrait bien. En plus, ça doit être rigolo.
– Bien sûr mon chéri, demandons à ce monsieur en blouse s’il a un lit disponible. Le père héla un infirmier qui passait par là.
– S’il vous plaît Monsieur, auriez-vous un lit disponible ? Mon fils est souffrant et nous allons aux Urgences pédiatriques.
– Bien sûr, répondit aussitôt l’homme, suivez-moi. Avec précautions, il installa Henri sur un lit. Où as-tu mal, lui demanda-t-il ?
– Au ventre, répondit Henri, et un peu à la tête aussi. Mais j’ai un papa génial, pour me guérir, il m’emmène aux Urgences pédiatriques. Il paraît que c’est mieux que le parc Astérix.
– Ah ! Ça mon bonhomme, s’exclama le brancardier un peu déstabilisé par la comparaison, tu ne vas pas être déçu. Un clin d’œil du père d’Henri le mit aussitôt dans la confidence.
– Puis il poursuivit : tu as de la chance, aujourd’hui il n’y a pas trop d’enfants. Tu vas avoir beaucoup de monde pour jouer avec toi.
– Je vais t’expliquer : ici, c’est un peu comme au Club Méditerranée. Mais au lieu d’appeler les gens qui font l’animation des « Gentils Organisateurs », nous, on les appelle les docteurs et les infirmières. Pour t’en souvenir, tu n’as qu’à penser à l’hôpital. Tu es déjà allé dans un hôpital ?
– Jamais, répondit Henri qui avait manifestement l’esprit ailleurs. Il venait de repérer, au bout du long couloir, les ascenseurs devant lesquels s’arrêtait le brancardier.
– D’la balle, on va prendre l’ascenseur en lit roulant ?
– Oui, un peu de patience mon bonhomme, il faut souvent attendre longtemps l’ascenseur mais, hop, dès qu’il arrive, on file directement au 7e étage. Dans l’ascenseur, Henri fut un peu étonné par les noms savants des services qui s’allumaient en lettres de lumière au fur et à mesure qu’il s’élevait dans les étages.
Mais il ne dit rien. Arrivé au 7e, il fut accueilli par une infirmière qui lui posa un tas de questions un peu bizarres :
– Combien pèses-tu ? Quel âge as-tu ? As-tu mangé ce matin ? Depuis combien de temps as-tu mal au ventre ? Combien de fois es-tu allé à la selle depuis hier ? Cette dernière question plongea Henri dans une grande perplexité.
– À la quoi ?demanda-t-il les yeux écarquillés.
– À la selle, ça veut dire aux toilettes. Fort étonné et un brin mal à l’aise, Henri précisa : plusieurs fois, mais je n’ai pas compté. Je n’aurais jamais pensé qu’on me poserait une telle question, ajouta-t-il en se tournant vers son père qui remplissait avec soin le dossier d’admission.
– Bien, fit l’infirmière, vous allez attendre ici et le docteur vous appellera.
Le gentil docteur
Assis dans la salle d’attente, Henri inspecta les quelques livres et boîtes bigarrées jetés sur la table. Pas terribles ces jeux, commenta-t-il laconiquement.
– Ils nous prennent pour des bébés. Dis papa, tu le trouves chouette toi, ce parc d’attraction ? Alors que son père s’apprêtait à répondre, une infirmière les pria de la suivre. Ils traversèrent le couloir jusqu’à une petite salle dans laquelle on allongea Henri.
– Le docteur arrive, ajouta-t-elle, mais d’abord je vais prendre ta température.
Une agrafeuse dans l’oreille
Henri l’observa placer un drôle de truc dans son oreille. Il avait l’impression qu’on lui introduisait une agrafeuse jusqu’au fond du conduit auditif.
– Voilà le docteur. Vous avez de la chance aujourd’hui, il n’y a pas d’attente.
– Ah oui, le docteur, un peu comme le Gentil Organisateur du Club Méditerranée dont je te parlais tout à l’heure, expliqua le père à son fils qui commençait à se demander où il était.
– Tiens, dit l’infirmière, on ne m’avait jamais fait une telle remarque. Je vais lui raconter, mais je ne sais pas si la comparaison lui fera très plaisir. À ce moment, un homme d’une cinquantaine d’années, plutôt petit, les yeux tirés et la mine un peu pâle, entra dans la pièce. L’infirmière jugea préférable de se taire. Ce n’était pas exactement le profil de l’animateur de choc auquel s’attendait Henri.
– Bonjour, lui dit Henri avec un sourire subitement interrompu par une crampe qui le plia en deux. Attentif à sa douleur, le médecin s’approcha de lui :
– Je vois que tu as mal, je vais t’ausculter. Et il posa la main sur son ventre. Henri se laissa faire en se demandant à quel type d’attraction il avait affaire. Ausculter, il n’avait jamais entendu ce mot qui lui faisait penser à « scalpel ». C’est peutêtre l’une de ces activités dangereuses qui risque de m’envoyer droit à l’hôpital, pensa-t-il tout bas.
– Ce n’est pas dangereux Papa ? Le père répondit d’un hochement de tête en lui faisant signe de se taire.
– Non, mon chéri, ne crains rien, tu es entre de bonnes mains. Maintenant, je vais devoir partir, mais je reviendrai un peu plus tard. Tu fais exactement ce que le docteur te demande.
Tu verras, cela ressemble à ce que font les vrais docteurs. Interloqué, le médecin enchaîna aussitôt :
– Seriez-vous entrain de dire qu’aux Urgences pédiatriques nous ne sommes pas de vrais docteurs ?
– Bien sûr que si, répondit le père embarrassé. Vous êtes même des supers docteurs, et vous proposez plein d’attractions, c’est pour cela qu’on est venu.
J’ai expliqué à mon fils que c’était encore mieux ici qu’au Parc Astérix, alors, vous voyez comme on est contents d’être là, ajouta-t-il en adressant un clin d’œil au médecin. Celui-ci comprit aussitôt et décida d’entrer dans le jeu.
– Viens là mon petit gars, le jeu commence maintenant. Il s’appelle « parcours du combattant ». Pour avoir 20 sur 20, tu dois faire tout ce que je te dis.
– D’accord, répondit Henri rassuré.
– Ouvre la bouche. Dis aaahhh. Tire la langue. Assied toi et respire fort. Tourne la tête pour que je voie tes oreilles. Henri se laissa faire, de plus en plus surpris.
– Bien, première épreuve passée avec succès. Le deuxième test consiste à répondre aux questions le plus vite possible : Quel âge as-tu ?En quelle classe es-tu ? Depuis combien de temps n’es-tu pas allé à la selle ? Cette fois Henri, victorieux, s’écria : j’y suis allé cinq fois ce matin, vous allez me mettre des points supplémentaires ?
Sans s’interrompre dans sa check-list, le médecin poursuivit :
– As-tu mangé ce matin ?
– Non.
– Hier ?
– Un peu de riz.
– C’est tout ? As-tu mal au ventre quand j’appuie là ?
Il pressa délicatement sur le petit ventre endolori.
– Aïe, ouïe, ouïe, s’écria Henri.
– Parfait, dit le médecin, encourageant. Excellente réponse.
– Mal à la tête ?
– Oui un peu.
– Au cou ?
– Non, pas du tout.
– Excellent. Comme tu es très fort, tu as le droit à l’attraction réservée aux meilleurs, on l’appelle le jeu de la torture. Devant l’air effaré d’Henri, le pédiatre ajouta aussitôt :
– Ne t’inquiète pas, ce n’est pas aussi terrible qu’à l’hôpital. Cette phrase apaisa l’enfant.
– Moi, tu sais, mon meilleur copain est allé à l’hôpital. Il y est resté plusieurs jours et il m’a dit que c’était génial.
– Très bien. Alors, tu vois, ici, c’est un peu comme l’hôpital. Si tu es bien sage, tu auras aussi le droit de rester dormir.
– D’accord, je suis prêt pour le test de la torture. Mon copain m’a dit que lui, il n’avait jamais pleuré, même quand on lui a fait des piqûres. Mais bon, il est un peu vantard.
– Justement, on va voir si tu es aussi courageux que lui. Le but du jeu est de ne pas pleurer. Tu as le droit de crier, mais pas trop fort, parce que j’ai les oreilles sensibles. Cette précision inquiéta Henri. Il surveillait le médecin qui lui tournait le dos et déballait de mystérieux outils.
– Donne-moi ton bras, lui dit-il. Attention, un, deux, trois, je pique.
– Aïe, ouïe ouïe, cria Henri. On dirait une piqûre.
– Pas exactement, dit le médecin. C’est juste une prise de sang. Détend-toi, c’est fini, et c’était la pire épreuve.
– Tu demanderas à l’infirmière de te faire un beau diplôme attestant que tu as supporté une prise de sang avec bravoure et courage. Avant toi, j’ai vu un petit de 3 ans qui avait mangé de la mort aux rats. Il a hurlé tout le temps, mais je lui ai quand même délivré ce diplôme : « Moi, Docteur Houille, certifie que Victor a subi avec bravoure une prise de sang aux Urgences pédiatriques ». Il était très fier de le montrer à ses parents, mais franchement il ne l’avait pas mérité comme toi. Henri trouva cela un peu injuste, mais il ne dit rien. Après tout, lui aussi aurait son diplôme.
Course en lit
Une infirmière arriva.
– Suis-moi Henri, on va te remettre sur le lit roulant et t’emmener dans ta chambre. Le brancardier était revenu. Il fit un clin d’œil à Henri et lui dit :
– Tu veux qu’on fasse les « lits-tamponneurs » ?
– Géant, répondit Henri content de le revoir.
Ils partirent tous deux, pas trop vite au départ puis, arrivés dans le grand hall désert, ils tournèrent cinq fois, de plus en plus vite. Une infirmière, que le drôle d’attelage fut à deux doigts de renverser, les arrêta. – Mais vous êtes fous ? – Non pas du tout, c’est juste une petite promenade. Tenez, voici Henri, nous cherchions sa chambre. Il est venu aux Urgences pédiatriques, c’était l’idée de son papa qui lui a promis de l’emmener dans ce nouveau parc d’attractions. Lui, il aurait préféré le Parc Astérix, alors je lui montrais que nous, on a cette super attraction qui s’appelle les « lits-tamponneurs ». L’infirmière sourit.
– Bien, mais il va finir par avoir le tournis.
– Je prends le lit et on y va, droit dans ta chambre ; tu vas voir, elle vient d’être refaite, elle est magnifique et tu as une vue formidable sur tout Paris, avec la Tour Eiffel juste devant toi. – Trop cool, s’écria Henri en arrivant dans la chambre ; il y a même la télévision et un lecteur de DVD. Je le dirai à mes copains, ils vont être verts de rage, surtout qu’en ce moment c’est la semaine des contrôles de fin d’année.
– Tiens, dit l’infirmière, ta maman arrive. – Bonjour m’man, dit Henri en cachant mal sa surprise de la voir dans ce parc d’attractions. Tu as vu ma chambre ? Elle est chouette, non ? On dirait la chambre d’un hôtel quatre étoiles. La mère, qui venait d’apprendre que son fils allait sans doute rester un jour ou deux en attendant les résultats des examens, ne démentis pas.
– Il ne manque que la terrasse, mais quelle vue !
– Regarde maman, ajouta Henri, j’ai même un lit à roulettes avec un fil attaché à mon bras. On m’a dit que c’était une perfusion. C’est un procédé très moderne qu’ils utilisent
dans ce parc pour nourrir les gens qui restent dormir. Cela leur évite de prendre des repas. Tant mieux parce que je n’ai pas très envie de manger en ce moment.
– Tiens, dit l’infirmière qui venait de lui poser la perfusion, je te donne un pistolet. Henri dévisagea l’étrange objet en plastique blanc.
– C’est quoi ce machin bizarre ? Je ne vois pas comment on tire avec ce truc. On dirait plutôt une grosse chaussure.
– En fait, lui expliqua l’infirmière, on ne l’utilise pas pour tirer mais pour faire pipi dedans. Parfois, on appelle cela un urinoir. Tiens, je te donne aussi un haricot. – Un haricot ? Non merci, je n’aime pas les haricots. – Mais celui-là est en carton, dit l’infirmière en lui tendant alors un étrange récipient en carton beige.
– Berk, dit Henri. Je ne vais tout de même pas manger un haricot en carton. J’ai une perfusion. Pas la peine de me nourrir, c’est même vous qui me l’avez dit. – Mais ce n’est pas un haricot comestible. Au contraire, je te le donne pour le cas où ton estomac voudrait se débarrasser de la nourriture que tu as avalée.
– Ah, vous voulez dire que c’est un haricot pour vomir ? Dommage que je ne l’ai pas eu plus tôt, ça m’aurait été bien utile.
– Bonjour, dit une autre infirmière en entrant dans la chambre harnachée d’un masque et d’une blouse.
– Pas terrible le déguisement, pensa Henri, je préfère celui de Mickey d’Eurodisney.
– Je vais prendre ta température.
– Encore l’agrafeuse !
– Bonjour, dit une autre infirmière en passant la porte. Je viens prendre ta pression artérielle, tu verras, ça serre de plus en plus fort. – Jusqu’à ce que ça explose ? demanda Henri qui se réjouissait d’assister à la déflagration de cet étrange ballon.
– Non, jusqu’à ce que des chiffres apparaissent sur l’écran.
– Ah ! fit-il un peu déçu de cette nouvelle attraction. J’aurais bien voulu que ça explose.
– Bonjour ! dit une dame qui fit son apparition avec un balai et une serpillière en main. Je viens nettoyer ta chambre. – Ma chambre ? Mais elle est toute propre, je viens à peine d’arriver !
– Tu vois lui dit sa mère : mieux qu’un hôtel quatre étoiles. Tu n’as rien besoin de demander et en l’espace de cinq minutes, quatre visites et une chambre impeccable. Ici, tu as une sonnette : c’est pour appeler si tu as besoin d’autre chose. – Je peux commander un Coca ? – Non, pas encore, répondit sa mère. Il faut que tu suives à la lettre leur régime alimentaire, c’est la règle du jeu.
– Alors mon petit, comment trouves-tu le service ? demanda la dernière infirmière entrée. Et tu verras, la nuit c’est encore mieux : on ne te laisse jamais seul, toutes les deux heures tu auras une visite :une fois pour la température, une autre la pression artérielle, une autre pour la perfusion, et ainsi de suite.
– Bonjour, dit une cinquième personne qui pénétra dans la chambre, aussitôt suivie d’un jeune homme. Je suis l’interne et voici l’externe. Comment vas-tu Henri ? Il paraît que tu as mal au ventre ?
On va te donner un médicament. Comme il faut être sûr qu’il agisse, on le met dans la perfusion et il entre directement dans tes veines.
– Ça alors, dit Henri, c’est magique, j’aimerais bien voir comment on fait.
– Et voilà, c’est aussi simple que cela, dit l’interne en injectant le produit dans la tubulure.
– Bonjour ! dirent trois infirmières qui ne purent entrer dans la chambre tant elle était maintenant encombrée. Nous sommes l’équipe de l’après-midi. Si tu as besoin de quelque chose, tu utilises la sonnette. – Bonjour, dit une autre dame. Tu veux voir un film ? As-tu la bonne télécommande ? Non, il en faut une pour les DVD. Je reviens dans deux minutes, je vais la chercher. Robin des bois, ça te plairait ?
– Tu peux te lever ?
– Non, je suis collé, répondit Henri en lui montrant la perfusion.
Les masques tombent sans douleur
L’après-midi se déroula plus calmement. Henri s’endormit devant son film et ne se réveilla qu’en voyant, penchée sur lui, une infirmière affublée d’un masque. Il sursauta, mit quelques secondes à se souvenir où il était.
– Pourquoi portes-tu un masque ?
– C’est pour ne pas attraper tes microbes. La blouse bleue me protège aussi. En fait, il ne faudrait surtout pas que je les passe aux autres enfants qui sont hospitalisés dans ce service.
– Quoi, mes microbes ?
– On a eu les résultats du laboratoire. Ce n’est pas trop grave, mais tu es un peu contagieux, alors il vaut mieux faire attention. Regarde le panneau qui est sur la porte de ta chambre : « Précautions d’hygiène stricte. Port de blouse – masque ».
– Mais alors, on n’est pas dans un parc d’attraction ici ?
– Ah non, lui dit l’infirmière en souriant. Ici, on est à l’hôpital.
Henri se frotta les yeux et réfléchit. C’est vrai, l’endroit ressemblait plus à un hôpital qu’au Parc Astérix. Néanmoins, il trouvait qu’il y était bien et n’était pas mécontent d’apprendre qu’il y resterait encore un ou deux jours. L’équipe était si gentille. Il sourit en pensant à l’aventure qu’il venait de vivre et se demanda comment son père avait pu mettre tout le monde dans le coup. Jamais, il n’aurait pensé qu’on était si bien à l’hôpital. Il avait hâte d’en parler à ses copains.
* et désormais le JIM
Copyright © Len medical, Pediatrie pratique, novembre 2013
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