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samedi 5 août 2023

Dans la Medicon Valley, la recette danoise d’une industrie pharmaceutique à succès

Par (Danemark)   Publié le 01 août 2023

En pleine croissance, cette industrie qui emploie plus de 50 000 personnes est devenue l’un de secteurs-clés de l’économie danoise. En l’espace d’une décennie, les ventes à l’étranger de produits de santé ont presque triplé et représentent aujourd’hui près de 18 % des exportations

Dans le campus de recherche et développement du laboratoire Novo Nordisk à Malov, près de Copenhague, en août 2018.

Aux côtés de l’imposant immeuble aux courbes sobres et modernes, les bâtiments en brique rouge, qui abritent derrière leurs murs des outils de production de pointe, ne manquent pas de charme avec leurs allures de fabrique à l’ancienne. Un style contemporain qui ne renie pas le passé. Voilà qui pourrait parfaitement résumer la philosophie du pionnier de l’industrie pharmaceutique danoise, LEO Pharma. « Notre société a connu depuis plus d’un siècle des développements très intéressants. Nous sommes aujourd’hui à un moment-clé de notre histoire pour écrire le chapitre des vingt-cinq prochaines années », détaille le franco-allemand Christophe Bourdon, son PDG, à l’occasion d’une visite de l’usine ce printemps.

Fondé en 1908, à Copenhague, le laboratoire pharmaceutique est une figure emblématique du secteur. Premier à avoir mis sur le marché local un médicament produit à l’échelle industrielle, premier à avoir exporté un produit de santé, premier à avoir commercialisé de l’insuline au Danemark… Une belle carte de visite, qu’il espère désormais compléter d’un nouveau titre : celui de champion mondial de la dermatologie. « Ce secteur, dont les projections de croissance varient entre 10 % et 15 %, reste négligé par les grands laboratoires. Il y a pourtant une multitude de maladies dans ce domaine qui restent sans solutions », observe M. Bourdon.

Pour cela, le danois a accéléré sa mue ces dernières années, et opéré un virage stratégique sur les produits biologiques, en rachetant en 2016 à AstraZeneca les droits sur le tralokinumab, un anticorps monoclonal destiné à traiter les patients atteints de dermatite atopique. Autorisé en Europe en 2021, et un an plus tard aux Etats-Unis, l’Adtralza, qui affiche déjà entre 8 % et 12 % de parts de marché dans les pays où il est commercialisé, vient grignoter les plates-bandes du Dupixent, le produit vedette de Sanofi.

« Investissements colossaux »

Il constitue aussi un tournant dans la stratégie de recherche et développement de LEO Pharma, qui, à l’instar des Big Pharma, met désormais l’accent sur les partenariats en externe pour alimenter son portefeuille de médicaments. Le laboratoire escompte ainsi identifier et développer plus rapidement de nouveaux produits. « L’innovation en dermatologie évolue vite. Nous n’avons pas les ressources pour bâtir une recherche exclusivement en interne. Il a fallu faire des choix », explique M. Bourdon.

Encore en pleine transformation, l’entreprise, qui s’est délestée d’une partie de ses équipes pour réduire ses coûts, affichait des revenus dans le rouge en 2022. Mais, au siège du laboratoire, installé dans la zone industrielle de Ballerup, située à une quinzaine de kilomètres de Copenhague, le patron du laboratoire nordique reste confiant. « Notre transformation a nécessité des investissements colossaux ces dernières années, mais nous devrions repasser dans le vert en 2023 », note-t-il.

Le laboratoire projette à moyen terme de s’introduire en Bourse, pour pousser sa croissance. Il rejoindrait ainsi plusieurs de ses compatriotes du secteur déjà cotés depuis plusieurs années. Car LEO Pharma est loin d’être le seul laboratoire pharmaceutique à faire rayonner le Danemark hors de ses frontières. Le pays nordique est même particulièrement prolifique dans le domaine. Parmi ses fleurons figurent notamment le géant de la luttre contre le diabète Novo Nordisk, le champion des traitements contre les allergies ALK, le spécialiste des maladies du système nerveux Lundbeck, le fabricant de dispositifs médicaux Coloplast, la biotech Genmab ou encore Bavarian Nordic, l’un des rares producteurs mondiaux de vaccins contre la variole du singe. En France, où les industriels danois du médicament sont particulièrement bien implantés, les poids lourds du secteur, ALK, Coloplast, LEO Pharma, Lundbeck et Novo Nordisk, ont même leur club des cinq, l’Alliance franco-danoise de santé.

Un modèle entrepreneurial unique

En pleine croissance, l’industrie pharmaceutique, qui emploie plus de 50 000 personnes sur son sol, est devenue l’un des secteurs-clés de l’économie danoise. En l’espace d’une décennie, les exportations de produits de santé ont presque triplé, bondissant de 7,7 milliards d’euros en 2011 à 18,2 milliards d’euros en 2021. Elles représentent aujourd’hui près de 18 % des exportations du pays. C’est dans la région de l’Oresund, dans l’est du Danemark, où sont implantés la plupart des industriels du secteur, mais aussi les universités, les centres de recherche académiques, et les grands hôpitaux, que bat le cœur de cet écosystème florissant.

Le succès de cette Medicon Valley s’explique en partie par la forte croissance de Novo Nordisk ces dernières années, qui a tiré le secteur, mais également par la spécificité du modèle entrepreneurial danois. Comme beaucoup de sociétés nordiques, les grands laboratoires pharmaceutiques y sont détenus par des fondations. Cette particularité a permis d’assurer la pérennité à long terme de ces groupes, en les protégeant notamment contre d’éventuelles tentatives de rachat. Elle a par ailleurs contribué à faire émerger une nuée de jeunes pousses, de nombreuses fondations disposant de fonds de capital-risque ou de ressources dévolues à des œuvres philanthropiques, qu’elles utilisent pour financer la création de biotech ou l’allocation de bourses d’étude et de recherche dans le domaine de la science.

Fort de cette dynamique impulsée par les fondations, le gouvernement s’est lui aussi attelé ces dernières années à assurer la mise en place de conditions favorables à l’innovation dans le secteur. En 2021, il a ainsi dévoilé une feuille de route pour établir une nouvelle stratégie nationale pour l’industrie des sciences de la vie. Dans sa besace figurent près d’une quarantaine de mesures allant d’une réduction des taxes sur les activités de recherche et développement à la mise en place d’une plate-forme en ligne pour coordonner les recrutements de patients pour les essais cliniques.


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