Publié le 12/07/2023
Au cours des trois dernières décennies, l’effet Mozart, suggérant un effet bénéfique de l'écoute de la sonate KV448 (sonate pour deux pianos en ré majeur) sur l'épilepsie, a suscité beaucoup d’attention dans les médias et un certain scepticisme dans la communauté scientifique. Avec 30 % de patients épileptiques qui souffrent de pharmacorésistance, on peut espérer qu’un tel phénomène existe mais cela reste difficile à démontrer. D’où l’intérêt de cette étude, la première revue systématique et méta-analyse formelle sur le sujet.
Méta-analyse de quelques opus
Les auteurs ont sélectionné 1 573 titres et résumés dans 6 bases de données et dans la base Open Access Theses and Dissertation, parmi lesquels les textes intégraux de 64 études ont été considérés comme éligible. Les études ne répondant pas aux critères d’inclusion ont été rejetées : (1) évaluation de l’effet de l’écoute de la sonate KV448, d’un autre stimulus musical, non musical ou du silence sur un état médicalement pertinent, (2) mesure appropriée des symptômes (nombre de crises ou de décharges épileptiformes interictales par exemple), (3) tailles d’effet ou données statistiques suffisantes. Finalement, d’autre études ont dû être exclues en raison de l’indisponibilité de résultats statistiques, même après demande aux auteurs. Au total, les données de 8 études (n=207) s’intéressant à l’effet Mozart sur l’épilepsie (6 études), la pression artérielle après un accident vasculaire cérébral (1 étude) et la douleur du prématuré évaluée par des observateurs extérieurs, ont pu être méta-analysées. Parmi elles, 3 étaient des essais contrôlés randomisés à deux groupes, dont 1 en rapport avec l’épilepsie.
Mozart ne soignerait finalement pas l’épilepsie…
Dans trois analyses indépendantes, des effets sommaires non significatifs allant d’insignifiants à faibles apportés par l'écoute de la sonate KV448 de Mozart ou d'autres stimuli musicaux sur l'épilepsie ou les autres pathologies (intervalle g: 0,09–0,43) ont été observés. Les analyses de biais et de sensibilité ont suggéré que ces effets étaient probablement gonflés (excès de signification) et que les effets non triviaux étaient dus à des résultats isolés. Les analyses multivers ont confirmé ces résultats, montrant des modèles de preuve incohérents. Les seuls effets sommaires significatifs semblent être relatifs à un seul effet d'étude non lié à l'épilepsie (douleur chez des prématurés) qui a contribué de manière substantielle à l'hétérogénéité observée entre les études. La faible puissance des études primaires et par conséquent un manque de valeur probante indiquent qu'il n'y a que peu de raisons d’envisager un effet Mozart spécifique.
Au total, écouter de la musique, et encore moins un type particulier de sonate, ne semble pas avoir d'effet bénéfique sur l'épilepsie. Malgré la valeur incertaine de résultats non documentés de manière transparente, l'attention accordée par la communauté scientifique et le public à des résultats apparemment spectaculaires peut ainsi conduire à une perception d'autorité. Ainsi en est-il du mythe de l'effet Mozart, et certainement d’autres...
Dr Isabelle Méresse
Copyright © 2023 JIM SA. Tous droits réservés.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire