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mardi 27 décembre 2022

Ça fait tâche Sur TikTok, les petites amies au foyer sont premières de corvées

par Katia Dansoko Touré  publié le 31 décembre 2022

Depuis cet automne, de nombreuses jeunes femmes, sans emploi et vraisemblablement dépendantes de leurs compagnons, filment avec enthousiasme leurs activités quotidiennes et leurs travaux domestiques sous le hashtag #StayatHomeGirlfriend.

On connaissait les «femmes au foyer», voici venu le temps des «petites amies au foyer» ou, en version originale, «Stay at Home Girlfriend». Merci qui ? TikTok, l’application chinoise prisée des ados (et qui pourrait être bannie aux Etats-Unis par peur d’une surveillance de Pékin) sur laquelle est née cette énième tendance à l’automne. Au menu : des vidéos dans lesquelles des jeunes femmes (pas plus de 25 ans pour la plupart) partagent leur routine – sport, rangement du domicile, préparation des repas – en attendant leur petit ami parti travailler.

Sur l’une d’elles, une internaute se prépare dans son dressing – où s’entassent sacs, chaussures de luxe mais aussi dollars en grande quantité –, avant de filmer sa promenade du matin, ses séances de manucure, son shopping puis son passage au resto (1,8 million de vues). «Tout ce que je fais pour mon petit ami dans la journée», écrit une autre sur une vidéo où elle prépare le café et fait à manger (4,5 millions de vues). «J’adore être une petite amie qui reste à la maison et qui n’a pas à travailler toute la journée», assume une tiktokeuse de 25 ans (3,2 millions de vues).

Le hashtag #StayatHomeGirlfriend cumule plus de 150 millions de vues. Cette tendance est même devenue un «challenge» auquel s’adonnent d’autres internautes – dont des hommes – de façon parodique : une jeune femme qui joue au foot avec un rouleau de papier toilette ou un homme qui se coiffe la barbe, laissant penser qu’il s’agit de l’activité principale de sa journée.

Caractère antiféministe

Compte tenu de la régression des droits des femmes qui s’accentue ces derniers temps – recul du droit à l’avortement aux Etats-Unis ou libertés des femmes afghanes –, cette «trend» a de quoi inquiéter tant elle nous renvoie à une époque où la seule activité allouée aux femmes était l’assignation à domicile alors que leurs conjoints s’occupaient de financer la vie du ménage.

Si certains commentaires louent le mode de vie de ces jeunes femmes, d’autres en dénoncent le caractère antiféministe : «Il y en a qui font exactement la même chose pour leur conjoint mais travaillent aussi. Tu devrais essayer» ; «Ça a l’air très enrichissant comme vie pour une femme…»; «Tu devrais garder un travail ou une passion. Il faut penser à soi, et être indépendante. Toujours avoir un plan de secours si les choses ne se passent bien» ; «J’espère pour toi que vous n’allez pas rompre parce qu’il ne semble pas que tu sois familière de l’indépendance financière» ou encore «Mon mec tient toujours à tout payer mais jamais je ne renoncerai à ma carrière et à ma propre source de revenus.»

Emanation de la suprématie blanche

Aux Etats-Unis, nombreuses sont les femmes noires à également dénoncer le fait que la plupart des actrices de cette tendance sont blanches. «Si ces jeunes femmes étaient noires, elles seraient jugées paresseuses ou qualifiées de “reines de l’aide sociale”», a estimé dans une interview au média américain Insider Hajar Yazdiha, professeure de sociologie à l’Université de Californie du Sud. Et d’affirmer qu’il s’agit là d’une énième émanation de la suprématie blanche : la femme blanche serait «la petite amie trophée» et la femme noire «la gold digger» («femme vénale»).

Il y a trois ans, la tendance «tradwife» pour «épouse traditionnelle», ces femmes au foyer et fières de l’être comme dans les années 50, véhiculait des problématiques similaires. On pense alors, sans surprise, à Samantha dans Ma sorcière bien-aimée ou Bree Van de Kamp dans les premières saisons de Desperate Housewives.


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