Le collectif Alerte demande au gouvernement une revalorisation des prestations sociales.
Un an jour pour jour après que le président de la République annonçait, au Musée de l’homme, sa « stratégie de lutte contre la pauvreté », avec 21 mesures et 8,5 milliards d’euros de budget étalés sur quatre ans, le gouvernement veut faire un point d’étape. Le 13 septembre 2018, Emmanuel Macron s’était montré lyrique et volontaire : « Je pense que nous pouvons, à hauteur d’une génération, éradiquer la grande pauvreté dans notre pays. Si ce n’est pas la France qui mène cette bataille, je suis sûr d’une chose, personne ne la mènera. »
Douze mois et beaucoup de « gilets jaunes » plus tard, 600 acteurs, élus, travailleurs sociaux et membres d’associations sont invités, les 12 et 13 septembre, à débattre, à Aubervilliers, avec, entre autres, Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, Christelle Dubos, sa secrétaire d’Etat, Julien Denormandie, ministre de la ville et du logement, et deux délégués interministériels, Olivier Noblecourt à la prévention et la lutte contre la pauvreté, et Sylvain Mathieu à l’hébergement et l’accès au logement.
« Nous partageons les principes de la “stratégie pauvreté”, affirme Véronique Fayet, présidente du Secours catholique, l’une des 37 associations du collectif Alerte. Mais les plus pauvres ne peuvent attendre 2023 qu’elle produise ses effets. Il faut absolument une revalorisation des prestations. Le revenu de solidarité active (RSA) ne représente plus que 40 % d’un smic, contre 60 % à sa création ; les aides personnalisées au logement (APL) ont baissé ; les allocations familiales et les retraites augmentent moins vite que l’inflation… » « Notre philosophie n’est, en effet, pas de tout centrer autour de la revalorisation des prestations, répond Christelle Dubos. Nous insistons sur la reprise d’activité, avec beaucoup plus d’accompagnement, et la création d’un service public de l’insertion. »
Mesures consensuelles
Le plan pauvreté envisage surtout la création d’un revenu universel d’activité (RUA), fusionnant plusieurs aides en une seule pour simplifier les démarches : « Nous avançons précautionneusement car personne ne doit être perdant », assure Mme Dubos. Annoncé pour 2020, il ne sera pas effectif avant, au mieux, 2023. Les associations ne cachent pas leur inquiétude car elles souhaitent que le RUA s’étende à de nouveaux bénéficiaires, notamment les jeunes, tandis que le gouvernement raisonne, lui, à enveloppe budgétaire constante, ce qui implique des perdants.
« Notre autre axe de travail, poursuit Mme Dubos, est de lutter contre les inégalités de destin, avec des mesures pour la petite enfance : par exemple, favoriser l’accueil en crèche des enfants de parents qui veulent s’insérer dans la vie professionnelle. C’est pourquoi nous avons créé le “bonus mixité sociale”, qui peut monter jusqu’à 2 100 euros par an et par place, et pourra financer un quart des crèches. Nous nous fixons l’objectif d’ouvrir, d’ici à la fin 2022, 300 crèches au service des parents en insertion professionnelle ; 104 sont aujourd’hui labellisées. »
Ces mesures consensuelles et concrètes ne font pas oublier à l’Union nationale des associations familiales que « les allocations familiales n’ont progressé que de 0,3 % en 2019, alors que l’inflation est de 1,3 %, et nous redoutons le même scénario en 2020 », explique Monique Dupuy, sa représentante.
Dans le même esprit, les petits déjeuners gratuits sont désormais organisés dans 400 écoles et ont, dès avril 2019, concerné 37 000 enfants, puis 100 000, lors de cette rentrée scolaire, avec l’ambition de doubler ce chiffre d’ici à l’an prochain. Le plan prévoit également des cantines scolaires à 1 euro par jour dans 3 800 communes rurales de moins de 10 000 habitants et qui ne pratiquent pas la tarification sociale.
« Nous adaptons nos actions aux réalités locales, explique Mme Dubos, et nous avons contractualisé avec quasiment tous les départements un programme d’accompagnement des chômeurs, des précaires et des jeunes sortant de l’aide sociale à l’enfance. » Le contenu de ces contrats est varié, de la formation ou l’embauche des travailleurs sociaux à une aide financière de 2 000 euros pour chacun de ces jeunes, « mais tout cela met, bien sûr, un certain temps à se mettre en œuvre ».
« La dynamique territoriale est intéressante, pour Christophe Robert, de la Fondation Abbé Pierre. Mais nous devons changer de dimension, accélérer, notamment sur l’accès au logement, le secteur qui a subi les plus fortes restrictions budgétaires, par exemple chez les bailleurs sociaux. C’est là où la stratégie pauvreté est contrariée par d’autres mesures de ce gouvernement », estime-t-il.
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