Le généticien et oncologue Pascal Pujol décrit les multiples apports de la génétique pour la santé et prend position pour une adoption plus rapide de certaines innovations.
« Le livre ». Le projet de loi de bioéthique, présenté fin juillet par la ministre de la santé, Agnès Buzyn, doit être discuté fin septembre à l’Assemblée nationale. Si l’extension de l’assistance médicale à la procréation (AMP) à toutes les femmes constitue l’une des mesures phares de ce texte, il aborde aussi quelques-unes des questions posées par les progrès de la génétique.
Ce n’est sans doute pas un total hasard de calendrier si le professeur Pascal Pujol, généticien spécialisé en cancérologie (CHU de Montpellier), publie un ouvrage engagé où il plaide pour une extension raisonnée de l’accès de chacun à ses données génétiques. Pascal Pujol préside aussi la Société française de médecine prédictive et personnalisée créée en 2012, qui a récemment émis des recommandations sur le partage avec les patients d’informations génétiques obtenues lors de la recherche d’un gène de prédisposition à certains cancers : au-delà du gène ciblé, le séquençage peut détecter d’autres anomalies génétiques prédisposant à des tumeurs ou des maladies qui n’étaient pas spécifiquement recherchées. Que faire de ces données dites « secondaires » ?
Diagnostic prénatal
Dans son article 10, le projet de loi bioéthique « permet – sous réserve de son accord – d’informer la personne de découvertes de caractéristiques génétiques sans relation avec l’indication initiale de l’examen ». A condition que ces informations « permettent à la personne ou aux membres de sa famille de bénéficier de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins ». A la lecture du livre de Pascal Pujol, on devine que celui-ci devrait être satisfait de cette disposition, mais qu’il restera frustré par le maintien de certains freins législatifs concernant l’accès de chacun à ses données génétiques. Intitulé Voulez-vous savoir ? Ce que nos gènes disent de notre santé, l’ouvrage examine précisément l’un des enjeux de l’explosion des capacités de séquençage : chaque individu peut potentiellement connaître son génome en détail, mais cette information est-elle toujours pertinente, et même utile ?
Le projet de loi est loin de clore les discussions sur ces données secondaires : quels gènes sont réellement « actionnables », c’est-à-dire que leurs porteurs pourront bénéficier de mesures de prévention et/ou de soins efficaces ? Cette question est plus largement posée à la médecine prédictive et personnalisée, fondée sur les progrès de la génétique, souligne l’ouvrage de Pascal Pujol.
Son grand mérite est d’offrir un panorama de potentialités de cette nouvelle médecine, notamment pour le diagnostic prénatal ou même préconceptionnel. Et, à travers l’évocation de cas de patients parfois dramatiques, de mieux cerner les tensions entre morale et éthique qui peuvent écarteler les cliniciens. Pascal Pujol, pour qui prime l’autonomie du patient, ne mâche pas ses mots sur l’« observateur de santé », commentateur « en fauteuil club », qui peut invoquer les risques d’eugénisme en gardant les mains propres.
Voulez-vous savoir ? Ce que nos gènes disent de notre santé, de Pascal Pujol (Humensciences, 192 p.)
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