Le cannabis (marijuana, haschisch) est la plus commune des substances psychoactives. Perçue comme sans danger pendant la grossesse, son usage, d’après les réseaux de surveillance américains a augmenté de 62 % entre 2002 et 2014. Cependant, plusieurs travaux suggèrent des effets négatifs sur la fonction neurocognitive au cours de la prime enfance. Certaines enquêtes épidémiologiques mais pas toutes, ont montré une augmentation de fréquence de la prématurité et des petits poids de naissance. De plus, les dérivés du cannabis passent dans le lait de mère. Aux USA, plusieurs états ont légalisé l’usage du cannabis thérapeutique puis récréationnel. Depuis, au Colorado, les revenus tirés des ventes légales ont augmenté en quelques années traduisant une croissance de la consommation.
Des chercheurs en santé publique d’Aurora et Denver ont conduit une étude transversale à partir des données du Pregnancy Risk Assessment Monitoring System, dans le cadre duquel 3 207 mères d’enfants nés en 2014-2015 ont répondu par mail à un questionnaire, mentionnant la prise éventuelle de cannabis, à 2-4 mois post-partum puis par téléphone.
Risque accru de petit poids de naissance et allaitement écourté
La prévalence de la consommation du cannabis à tout moment de la grossesse, rapportée par les mères était de 5,7 % ± 0,5 %, atteignant 12,3 % chez les 15-24 ans. Elle était 3 à 4 fois plus élevée chez les mères les moins éduquées, les plus pauvres et non mariées ; un quart de ces mères consommaient également du tabac.
En période post-natale précoce, la prévalence de la consommation de cannabis chez les mères allaitantes était de 5 % (IC 4,1-6,2 %) et la durée de l’allaitement était raccourcie dans ce cas. La consommation prénatale de cannabis a augmenté de 50 % la probabilité de petit poids de naissance (< 2 500 g) indépendamment de l’âge maternel, de l’ethnie, du niveau d’éducation, du tabagisme pendant la grossesse (Odds ratio [OR] 1,5 ; intervalle de confiance à 95 % [IC] 1,1-2,1 ; P= 0,02). Le risque de petit poids pour l’âge gestationnel était augmenté (OR 1,7 ; IC 1,1-2,6 ; P = 0,02) mais cette relation n’était plus significative après ajustement en fonction du tabagisme pendant le 3ème trimestre de la grossesse. Naissance prématurée et admission en soins intensifs n’étaient pas significativement associées à l’usage du cannabis.
Cette étude souligne l’importance du dépistage de la prise de cannabis au cours des consultations prénatales et de la nécessité d’avertir des conséquences sur la santé pendant la grossesse et la lactation.
Pr Jean-Jacques Baudon
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