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mercredi 18 avril 2018

Se coucher tard, mourir plus tôt

Une vaste étude montre que le risque de décès prématuré est plus grand  chez les couche-tard, indépendamment de la durée totale de sommeil.

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO  | Par 

Se coucher tard est mauvais pour la santé. Jusque-là rien de nouveau. Les études se sont en effet multipliées ces dernières années pour démontrer les dangers du manque de sommeil associés à une telle habitude. A savoir, entre autres, le développement de maladies cardio-vasculaires, de diabète et d’insomnies. Mais une étude publiée jeudi 12 avril dans la revue Chronobiology International vient de mettre en évidence un risque de mortalité accru pour les personnes se couchant tard, indépendamment de leur durée de sommeil.

Kristen Knutson, de la North­western University de Chicago, et Malcolm von Schantz, de l’université du Surrey, se sont intéressés aux données de la Biobank du Royaume-Uni. Un programme qui étudie la part de la génétique et de l’environnement dans le développement de certaines maladies, auprès d’une large cohorte d’environ 500 000 Britanniques.


Différence de chronotype


Tous ces participants ont répondu à des questionnaires très précis sur leur mode de vie. Une question concernait leurs préférences en matière de coucher : « Vous considérez-vous comme étant : indéniablement du matin, plus du matin que du soir, plus du soir que du matin, ou indéniablement du soir ? » Elle a permis aux chercheurs de classer les participants en quatre catégories, et d’étudier leur risque de mourir ou de développer certaines ma­ladies selon le « chronotype » auquel ils appartiennent.

Les résultats ne donnent pas envie de se coucher tard. Les personnes déclarant être vraiment du soir ont quasiment deux fois plus de risques de développer des troubles psychologiques que ceux qui se déclarent être vraiment du ­matin. Les couche-tard ont par ailleurs plus de risques de développer du diabète (30 %), des troubles neurologiques (25 %), gastro-intestinaux (23 %) et respiratoires (22 %) que les couche-tôt. L’étude montre également une surmortalité précoce de 2 % associée au fait d’être un couche-tard, mais les oiseaux de nuit ont 10 % de risques en plus de mourir plus tôt, toutes causes confondues, que les personnes qui estiment être vraiment du matin. Un résultat qui indique que les chronotypes matinaux sont plus protégés.

« Nous pensons qu’une des raisons de cette surmortalité pourrait être liée à l’horloge biologique interne, explique Kristen Knutson. Celle des noctambules est réglée de manière à ce qu’ils se couchent et se lèvent plus tard. Lorsqu’ils essayent de vivre comme des personnes matinales, le décalage entre leur horloge, leur comportement ou leur environnement peut entraîner des problèmes de santé sur le long terme. »

Selon l’étude, l’environnement et la génétique jouent à parts égales dans la préférence de coucher. Les auteurs encouragent donc les employeurs à être plus souples sur les horaires, pour permettre aux gens du soir de commencer plus tard, quitte à décaler la fin de leur journée de travail. Ils mettent également en garde contre le passage à l’heure d’été, difficile à gérer pour ceux qui luttent déjà contre leur cycle circadien (de circa, proche de, et dien, le jour) pour vivre au même rythme que la société.

Et si le fait de se coucher tard est en partie génétique, il existe tout de même quelques règles à respecter pour s’endormir plus tôt lorsque l’on est un couche-tard. Bannir les écrans le soir, car leur lumière bleue retarde l’horloge biologique et bloque la sécrétion de la mélatonine, hormone du sommeil. Eviter le sport trop tard également, et s’exposer à la lumière le matin et en journée.

Perturbateur endocrinien


Claude Gronfier, neurobiologiste à l’Inserm et spécialiste des rythmes biologiques et du sommeil, met en garde : « La lumière est sans doute le plus puissant perturbateur endocrinien ! » D’un ryth­me proche de 24 heures, l’horloge biologique se synchronise en effet tous les jours grâce à la lumière captée par les cellules à mélanopsine de la rétine. Trop de lumière trop tard dans la journée envoie un mauvais signal à l’hypothalamus, une partie du cerveau qui joue un rôle de chef d’orchestre dans la sécrétion de différentes hormones. « Il faut ajouter aux résultats de cette étude une surmortalité liée au manque de sommeil, explique Claude Gronfier, car on sait que les gens qui se couchent tard ont des nuits plus courtes. » Le décalage de l’horloge circadienne peut en effet entraîner des insomnies. Elles-mêmes augmentent ensuite le risque de développer des maladies cardio-vasculaires. « C’est un enjeu de santé publique, estime le chercheur. Le lien incontestable entre le décalage de l’horloge circadien­ne, le manque de sommeil, et les problèmes de santé fait son chemin trop lentement. C’est encore très sous-estimé »
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En 2016, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) révélait que les travailleurs de nuit, c’est-à-dire ceux qui travaillent au moins trois heures entre 21 heures et 6 heures du matin, deux fois par semaine, étaient particulièrement touchés par ces troubles. On estime qu’ils représentent 20 % de la population employée.


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