La sanction a été prononcée le 5 février : quatre mois de prison avec sursis contre une mère de famille pour l’absentéisme scolaire de son fils, un collégien d’Escaudain (Nord). Depuis, l’information a été reprise en boucle par les médias. Et pourtant, la raison invoquée par la justice dépasse la simple question de la présence - ou non - à l’école. « La condamnation est intervenue sur la base de la soustraction d’un parent à ses obligations légales au point de compromettre gravement la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de l’enfant », explique l’avocate Valérie Piau. En droit, elle aurait donc pu être plus sévère : l’article 227-17 du Code pénal prévoit jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Il n’empêche, ces quatre mois de sursis à l’encontre d’une mère dont l’enfant n’a pratiquement pas mis les pieds dans son collège en 2012-2013, récidivant en 2013-2014 alors qu’il redoublait sa 6e, ont troublé l’opinion.
Au ministère de l’éducation nationale, on a d’abord évoqué « un fait sans précédent », avant de faire machine arrière. « Un premier cas a été rapporté il y a cinq ans », reconnaissait-on mardi matin dans l’entourage de la ministre, Najat Vallaud-Belkacem. « C’est beaucoup d’honneur que nous a fait l’éducation nationale, glisse le procureur de la République de Valenciennes, François Pérain, avant sa conférence de presse ce 10 février à midi. Nous avons quatre à cinq condamnations de ce genre par an, ici, et je doute que Valenciennes soit une exception ». La précédente affaire médiatisée remonte à mai 2010, quand une peine de deux mois de prison avec sursis avait été prononcée à l’encontre d’une mère de famille de Chauny (Aisne), pour l’absentéisme répété de ses deux filles. Agées de 14 et 15 ans, ces collégiennes avait manqué 279 demi-journées de cours pour l’une, et 94 pour l’autre, durant l’année scolaire 2008-2009. Le collégien d’Escaudain a, lui, manqué 79 demi-journées rien que pour le premier trimestre de sa 6e redoublée, selon le parquet de Valenciennes.
Bronchites récurrentes
L’avocate Valérie Piau n’a pas, elle non plus, d’autres exemples en tête. « L’obligation scolaire porte de 6 à 16 ans, rappelle cette spécialiste du droit de l’éducation, mais c’est très rare d’en arriver au pénal en cas d’absentéisme, car l’institution prévoit d’abord de convoquer les parents, avec mise en demeure et parfois aussi signalement auprès des services sociaux. Ces étapes, qui ont valeur d’alerte, conduisent la plupart du temps à une régularisation de la situation ». Dans le cas d’Escaudain, ces étapes n’ont pas été brûlées, mais elles se sont révélées infructueuses, assure le procureur. La mère du collégien aurait refusé tout contact avec l’éducation nationale, ne répondant ni aux propositions des services éducatifs – suivi d’un atelier de parentalité – ni même aux injonctions. Entendue plusieurs fois par la police, elle aurait invoqué les bronchites récurrentes de son fils, un motif invalidé par le rapport des services médicaux. Le 5 février, elle n’était pas présente lors de son procès.
Rares en France, les peines de prison pour cause d’absentéisme sont beaucoup plus fréquentes en Grande-Bretagne mais n’ont pas fait leurs preuves : au cours des années 2000, 133 parents d’élèves ont été emprisonnés… sans pour autant freiner le phénomène. Au contraire, le taux d’absentéisme a, dans le même temps, augmenté de 0,7 à 1 %.
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