Note du CRPA (Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie).
- Résumé : La proposition de loi du député socialiste M. Denys Robiliard sur les soins sans consentement, est définitivement adoptée, après le vote jeudi du Sénat. Faute de consensus dans ses rangs, l'UMP ne portera pas la loi devant le Conseil constitutionnel. Reste que le statut des Unités pour malades difficiles (UMD) n'intéresse personne.
- Adoption définitive par le Parlement de la proposition de loi socialiste sur les soins sans consentement en psychiatrie.
Le Sénat a définitivement adopté jeudi après-midi, à 16 h 55, la proposition de loidu député socialiste M. Denys Robiliard sur les soins sans consentement, de façon conforme à l’Assemblée nationale, qui l’a approuvée le matin. Ce dernier processus législatif faisait suite au passage en Commission mixte paritaire, mardi 17 septembre dernier, de ce texte, afin d’unifier la version issue de l’Assemblée nationale (séance du 25 juillet 2013) et celle du Sénat (séance du 13 septembre dernier).
Des réserves, que nous partageons d’ailleurs, ont été émises par le groupe Communistes, républicains et citoyens qui a voté pour ce texte, ainsi que les écologistes avec également des réserves, et les centristes qui ont voté pour mais ont émis une réserve sur la fin du statut légal des Unités pour malades difficiles (UMD). Les sénateurs socialistes ont voté pour cette proposition de loi. L’UMP a voté contre ce texte considérant qu’il n’apporte pas assez de garanties en termes de sécurité publique et que ce parti s’oppose à la suppression du statut légal des UMD, qui rend incohérentes les dispositions réglementaires sur les UMD qui sont portées par un décret du 18 juillet 2011, désormais partiellement privé de base législative. Ce moyen a été soulevé par le CRPA qui l’a fait connaître, notons-le, le 9 septembre passé à l'occasion d'une audition des associations d'usagers et du Collectif des 39, au Sénat, par le sénateur et rapporteur de ce texte M. Jacky Le Menn (PS).
A l’Assemblée nationale ce matin même, l’UMP a voté contre ce texte dans les mêmes termes que ceux décrits précédemment. Les centristes se sont abstenus (du fait de la fin du statut légal des UMD et des conséquences qui s’en ensuivent notamment en termes d’ordre public), les socialistes ont voté pour, tandis que les écologistes et le groupe des communistes et apparentés ont voté pour ce texte mais avec des réserves.
La promulgation de cette réforme partielle de la loi du 5 juillet 2011 sur les soins sans consentement devrait intervenir dans les jours qui suivent, la publication auJournal officiel aura lieu dans la foulée.
Vous connaissez nos réserves sur ce texte, dont nous approuvons néanmoins un certain nombre de dispositions, dont le démantèlement du régime dérogatoire à l’endroit des internés en UMD et pénaux irresponsables en deçà du seuil des peines encourues fixées par cette proposition de loi (5 ans de prison pour les atteintes aux personnes, 10 ans de prison pour les atteintes aux biens). Cf. mon intervention précédente sur Mediapart : http://blogs.mediapart.fr/edition/contes-de-la-folie-ordinaire/article/160813/la-gauche-t-elle-jamais-eu-la-volonte-de-reformer-en-profondeur-linstit
- Les parlementaires UMP ne saisiront pas le Conseil constitutionnel contre cette proposition de loi.
Nous vous informons de l’état d’une réflexion que nous avons menée avec le groupe UMP du Sénat sur l’inconstitutionnalité potentielle de l’abrogation du statut légal des Unités pour malades difficiles dans la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi du 5 juillet 2011 sur les soins psychiatriques, adoptée aujourd’hui même (actuel article 11 de la dernière version de cette proposition de loi).
Nous vous signalons qu’une collaboratrice du groupe UMP au Sénat jointe par nous, au regard de ce point d’inconstitutionnalité soulevé par le CRPA lors de l’audition du 9 septembre dernier des associations d’usagers par le sénateur M. Jacky Le Menn, nous a informés mardi 17 septembre en fin de matinée, qu’après discussion interne aux groupes UMP du Sénat et de l’Assemblée nationale, les parlementaires UMP ne saisiront pas le Conseil constitutionnel contre cette proposition de loi faute de consensus dans leurs rangs, d’une part sur le statut dérogatoire pour les internés « médico-légaux », et son éventuel maintien, qui ne fait pas l’unanimité, d’autre part sur le fait d’engager un recours devant les juges constitutionnels sur l’absence de base législative des Unités pour malades difficiles juste avant la promulgation de ce texte de loi, qui ne fait pas non plus consensus dans les rangs UMP.
C’est donc désormais à nous de faire, avec les avocats de notre réseau, d’une part dans notre instance en annulation des décrets d’application de la loi du 5 juillet 2011, en cours devant le Conseil d’État ; d’autre part dans les dossiers individuels en demande de mainlevée de leur internement d’internés et de proches d’internés en Unités pour malades difficiles, en soulevant le moyen de l’illégalité des décisions d’envoi et de maintien par les Préfectures en UMD, vu le défaut de base législative de ces unités très particulières.
En effet, nous considérons, au contraire des parlementaires socialistes, que les UMD sont, en fait, des quartiers de haute sécurité des établissements psychiatriques, qui, en tant que tels, doivent avoir un régime législatif distinct, ainsi que les personnes qui y sont internées, qui doivent pouvoir bénéficier de droits spécifiques, par rapport aux autres personnes tenues sous contrainte en milieu psychiatrique fermé. Par exemple par l’instauration d’une audience contradictoire de contrôle de l’admission en UMD devant un juge des libertés et de la détention dans les 10 jours de l’admission, puis régulièrement au long de ces internements en enceintes de force psychiatriques que sont les UMD
Nous tenons à préciser par cette note, que nous soutenons tout à fait la première proposition qu’avait faite le député M. Denys Robiliard, sur cette question, dans son rapport d’étape du 29 mai 2013, de la Mission santé mentale et psychiatrie, qui consistait à faire remonter au plan législatif, l’ensemble des dispositions sur les UMD, qui figurent actuellement dans les deux décrets qui les régissent, et donc aussi de renforcer l’actuel article L. 3222-3 du code de la santé publique qui commençait une définition, inachevée d’ailleurs, des UMD. Définition que le législateur a abrogé, ouvrant ainsi une boîte de Pandore au plan constitutionnel et du droit public, qui n’est pas prête de se refermer.
Comme l’étaient, le 13 septembre passé en lecture publique au Sénat pour adoption de ce texte, Mme Annie David (sénatrice du groupe CRC, et présidente de la Commission des affaires sociales du Sénat), ou M. Desessart (sénateur Ecologiste), ou Mme Catherine Deroche (sénatrice UMP), ou Mme Muguette Dini (Sénatrice centriste), nous sommes nous aussi choqués par le comportement du gouvernement et du Ministère de la santé, qui ont eu 17 mois devant eux pour préparer cette réforme (décision CRPA du Conseil constitutionnel du 20 avril 2012 !), et qui n’en ont rien fait, laissant le député M. Denys Robiliard se débrouiller seul au front avec tout cela, sans même une étude d’impact, des chiffres et des évaluations précises, pour mettre par terre au dernier moment (en juin dernier) une partie des préconisations de son rapport d’étape qui étaient très correctes, à tout le moins sur le régime dérogatoire et sur le statut des UMD comme sur celui des internés et ex-internés en UMD.
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Nous renvoyons sur ce sujet, à notre article sur le site du CRPA :http://psychiatrie.crpa.asso.fr/379 /
Sur le dossier législatif de cette proposition de loi, avec accès à l’ensemble des compte-rendus intégraux des débats :http://www.assemblee-nationale.fr/1…
En pièce jointe, la version définitive de cette proposition de loi telle qu'adoptée par le Parlement le 19 septembre 2013.
En avril 2010, Mediapart avait réalisé une série de 4 enquêtes sur les UMD. On peut toujours les lire ici
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