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dimanche 11 novembre 2012

Le plaidoyer de Christian Lajoux pour l’innovation


Christian Lajoux quittera ses fonctions fin décembre et revient dans son dernier livre sur ses six ans à la tête du Leem (Les entreprises du médicament). Occasion pour lui de tourner la page Mediator et d’appeler le nouveau gouvernement à bâtir une politique industrielle autour du médicament.
De ses six ans passés à la tête du Leem, les deux dernières auront incontestablement été les plus rudes pour Christian Lajoux. Le patron des patrons de laboratoires le suggère fortement dans un livre sorti jeudi en librairie. À la veille de quitter ses fonctions fin décembre, il y livre son testament politique sous un titre qui pourtant ne laisse la place ni à la nostalgie, ni à l’assoupissement : « Médicament : l’état d’urgence ».
L’ouvrage revient d’abord sur les récentes crises que Christian Lajoux a vécues en première ligne. Grippe A H1N1, Mediator : le président du Leem évoque la première et revient longuement sur la seconde, estimant que les deux conjugués ont conduit à instruire le procès de l’industrie du médicament et de ses influences supposées sur les décisions des pouvoirs publics. L’affaire Mediator est pour lui l’occasion de défendre a posteriori une stratégie de transparence adoptée à l’unanimité du conseil d’administration du Leem en janvier 2011, mais apparemment moins facile à vendre ensuite auprès des directions internationales et européennes des groupes pharmaceutiques.

Emplois fragilisés

Mais c’est surtout à la presse et aux politiques que Christian Lajoux réserve ses plus vifs reproches. « L’approche n’était pas loyale. À mesure que l’on avançait dans les discussions, l’affaire Mediator se transformait en réquisitoire contre la visite médicale et en dénonciation publique de tous les liens de coopération tissés entre les laboratoires et les acteurs du système », relève-t-il, gardant apparemment un fort mauvais souvenir des « Assises du médicament » qui ont précédé la réforme de la sécurité sanitaire de 2011. Christian Lajoux dénonce le mélange des genres et égratigne « certains politiques qui ne se sont pas gênés pour se servir du Mediator et du médicament pour faire les poches de cette industrie et ainsi fragiliser des milliers d’emplois ». Au passage, Xavier Bertrand n’est pas épargné, qui « en refusant la concertation ne fit rien pour nous aider».

Dans son livre, Christian Lajoux dénonce les clichés et les amalgames qui collent à l’image de l’industrie pharmaceutique, arrivant à la conclusion que, dans le contexte de la crise du Mediator, ses représentants étaient devenus « inaudibles ». Mais, pour lui, il y a plus grave encore : « les débats opportunistes et nécessairement réducteurs autour du vaccin contre la grippe AH1N1 et le Mediator ont occulté la capacité des décideurs à se projeter vers un monde nouveau qui pourtant frappe à notre porte ».

Et de souligner le retard pris depuis deux ans, la « bureaucratie toute puissante » et l’attitude de plus en plus restrictive de la Commission de Transparence vis-à-vis des nouveaux produits. « Comment seront évalués les médicaments innovants qui se présenteront sur le marché dans les prochains mois ? » s’interroge-t-il, déplorant la frilosité et les « approches comptables » des autorités sanitaires françaises ? Au-delà, c’est l’accueil à l’innovation et la façon dont sera favorisée en France – mais aussi en Europe – « la bataille industrielle des nouvelles technologies » qui l’intéressent. La vraie question est donc de savoir si la France et, au-delà, les pays industrialisés « resteront leaders de l’innovation ou bien seront supplantés par les pays émergents ».

Le président Lajoux balaie aussi devant sa porte, appelant le Leem à élargir ses alliances avec les autres industries de santé. Un conseil à l’intention des deux candidats – Hervé Gisserot (GSK) et Patrick Errard (Astellas) – qui briguent sa sucession le 4 décembre. Concernant les biomédicaments, il admet un retard français, sans verser dans le pessimisme, décelant même « une nouvelle dynamique?» dans l’Hexagone. Avant d’appeler le nouveau pouvoir socialiste à prendre en compte les contraintes internationales et les défis scientifiques de l’industrie du médicament. « J’ose l’affirmer, conclut Christian Lajoux. Il faut renouer avec la croissance des produits de santé. »

"Médicament : l’état d’urgence". Éditions du Cherche midi 195 p; 17 euros.
Jean Paillard

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