L’histoire fait couler beaucoup d’encre en Chine. Le 13 octobre, une passagère s’est vu refuser l’accès à un vol de la compagnie aérienne Chunqiu. Le prétexte invoqué ? “Ses mains tremblaient en raison des effets secondaires de la prise d’antidépresseurs”, rapporte Jiemian, média en ligne de Shanghai. “Au cours de cet incident, cette femme a dû non seulement supporter les effets secondaires des antidépresseurs, mais aussi les ‘regards’ provoqués par ces effets secondaires”, déplore le journaliste.
En Chine, le nombre de personnes souffrant de dépression nerveuse est seulement dépassé par celui des victimes de maladies cardiovasculaires. Le site du Quotidien du peuple (Renmin Wang en chinois) souligne, sur la base de données de 2019, que “la prévalence de la dépression à vie dans le pays s’élève à 6,8 % de la population, soit environ 95 millions de personnes”. Un chiffre qui a déclenché une avalanche de réactions. Sur le réseau social Weibo, plus de 620 000 messages ont été postés sur le sujet, qui totalisent 2,2 milliards de vues.
À Pékin, le Xinjing Bao précise que “plus de la moitié des personnes souffrant de dépression sont d’un tempérament suicidaire”. Dans un deuxième article, le journal précise que moins de 10 % des patients ont été soignés et qu’un million de Chinois se suicident chaque année. Il s’agit d’une maladie “qui est vécue comme plus ‘honteuse’ que les maladies physiques”, commente le journal.
Un plan de dépistage à double tranchant
Consciente de la gravité de la situation, la Commission nationale de la santé a publié le 11 septembre dernier un “Plan de travail des services spécialisés en vue de la prévention et du traitement de la dépression”. Le document propose d’intégrer le dépistage de la dépression dans les examens médicaux des collégiens, lycéens et étudiants, et de leur établir un dossier de santé mentale en vue d’une évaluation, relate le Quotidien du peuple. Les jeunes et les adolescents constituent l’un des quatre groupes les plus touchés par la dépression, aux côtés des femmes enceintes, des personnes âgées et des professions sous pression.
Preuve de cette tendance inquiétante, l’enquête en ligne, menée sur Weibo, l’an dernier, par Le Quotidien de la jeunesse de Chine. Sur les 300 000 participants, plus de 20 % ont estimé avoir de graves tendances dépressives. “L’incidence de la dépression chez les étudiants de troisième cycle augmente d’année en année, notamment chez ceux des premières et troisièmes années”, remarque le journal.
Si la nouvelle mesure de la Commission nationale de la santé a été globalement accueillie favorablement, certains spécialistes craignent une “double peine” pour les malades. Duan Chuanmei, site d’information de Hong Kong, y a consacré le 20 octobre une longue enquête intitulée “Les universités chinoises dépisteront dorénavant la dépression, mais les étudiants ont peur d’être identifiés et renvoyés”. Et de citer le cas de Yezi : lorsqu’un professeur a su que cette étudiante était dépressive, il a aussitôt demandé à ses parents de la ramener chez eux.
Duan Chuanmei raconte que “tous les patients interviewés ont déclaré qu’ils avaient été blessés une seconde fois après avoir échangé avec leurs professeurs”. Le média hongkongais regrette qu’un “filet de sécurité n’ait pas été entièrement déployé pour les prendre en charge”, alors que la campagne de dépistage a déjà été lancée.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire