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lundi 14 septembre 2020

Leurrer le virus de la Covid-19, une brillante idée ?

Publié le 04/09/2020



En l’état actuel de nos connaissances sur le mode d'invasion des cellules humaines par le SRAS-CoV-2, la liaison de la glycoprotéine virale du spike au récepteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine 2 (hACE2) humaine et la protéase trans-membranaire cellulaire Serine 2 (TMPRSS2) jouent un rôle central dans la pénétration du virus dans nos cellules. Le principe du blocage de l'interaction entre le hACE2 et la protéine de pointe du virus a été validé. En effet, l'inhibition des infections par le SRAS-CoV-2 dans les tissus humains artificiels à l'aide d'ACE2 soluble de qualité clinique a récemment été démontrée. De même, une mini-protéine stable artificielle imitant trois hélices de hACE2 pour bloquer les pics du SARS-CoV-2 a été décrite, mais sa capacité à bloquer l'infection virale n'a pas été démontrée.

Les peptides sont reconnus comme agents thérapeutiques prometteurs dans le traitement de diverses pathologies

Le temps presse, mais le développement d'un médicament spécifique à la vitesse d'une pandémie est une rude tâche et ce médicament spécifique ne peut pas être une petite molécule. C’est alors que les peptides apparaissent comme une solution possible pour la conception et le développement à la vitesse d'une pandémie. Les peptides sont largement reconnus comme des agents thérapeutiques prometteurs pour le traitement de diverses pathologies telles que le cancer et les maladies métaboliques, infectieuses ou cardiovasculaires. À ce jour, environ 70 médicaments à base de peptides ont été commercialisés et 150 sont actuellement en cours de développement clinique. Les peptides présentent des avantages particuliers par rapport aux autres médicaments, notamment leur grande polyvalence, leur spécificité de cible, leur faible toxicité et leur capacité à agir sur une grande variété de cibles, qui sont à l’origine d'un taux de réussite plus élevé que celui des petites molécules. Les synthèses et le développement de peptides thérapeutiques longs (composés de plus de 30 résidus) ne sont plus un défi, comme le montrent les nombreux analogues du GLP-1. Leur antigénicité éventuelle peut être évaluée à l'aide d'outils de prédiction dans la conception.

Induire le virus en erreur

D’où la brillante idée d’induire en erreur le virus en l’invitant à se fixer sur des leurres. À cette fin une équipe française a conçu une série de peptides imitant l'hélice N-terminale de la protéine hACE2 qui contient la plupart des particules de contact sur le site de liaison et qui ont une forte propension au pliage hélicoïdal en solution aqueuse.

Le meilleur leurre « fabriqué » est un peptide hélicoïdal qui mime l'hélice H1 du récepteur hACE2 et qui est composé uniquement d'acides aminés naturels présentant une forte propension au pliage hélicoïdal en milieu aqueux. Ce leurre se lie à la protéine de pointe du SRAS-CoV-2 avec une grande affinité. Il est capable de bloquer l'infection des cellules pulmonaires humaines par le SARS-CoV-2 avec une concentration inhibitrice (CI 50) de l'ordre de grandeur du nanomolaire. Et la bonne nouvelle, est que le remède n’est pas pire que le mal car cette imitation peptidique est dépourvue de toxicité sur les cellules pulmonaires.

À malin, malin et demi

Sous réserve d’acceptation de cette publication préliminaire par un comité de lecture, cette étude démontre la faisabilité de la conception de leurres du peptide avec une forte propension au pliage hélicoïdal dans l'eau. La propension au repliement de peptides leurrant hACE2 favorise l'interaction avec le RBD (receptor binding domain) de la pointe et bloque l'infection des cellules pulmonaires par le SARS-CoV-2. Dépourvus de toxicité cellulaire, même à fortes doses, ces leurres pourraient être envisagés à des fins prophylactiques ou thérapeutique.

Le fait de cibler la prophylaxie en premier pourrait réduire le délai de développement d’un médicament. Présentés sous forme de comprimé sublingual ou de spray oral, ces peptides pourraient bloquer l'infectivité du virus de manière préventive. Leur bio-distribution serait limitée aux voies respiratoires supérieures (cavité buccale...) et ils seraient dégradés dans les voies digestives sans aucun résidu toxique. À suivre.

Dr Bernard-Alex Gaüzère

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