02 MARS 2020 | PAR DAVID ROFÉ-SARFATI
Olivier Werner nous revient! Admirable au OFF d’Avignon en 2016 dans La Pensée d’Andreiev, le comédien suisse prodigue son immense talent au duo Elsa Granat -Roxane Kasperski. Une nouvelle fois pour un spectacle beau et édifiant dont on ne sort pas indemne; à voir et à revoir.
Dans Mon amour fou, Elsa Granat et Roxane Kasperski nous racontaient l’histoire d’une femme se résignant à quitter son compagnon bipolaire. V.I.T.R.I.O.L constitue en quelque sorte l’épisode suivant. Notre héroïne vit une soirée calme avec son nouveau compagnon alors que le passé s’invite. L’ancien amant en proie à une crise maniaque débarque pour saisir les psychés du couple et en prendre le contrôle. Dans cette entreprise d’intrusion, il posera sa vérité, celle d’une errance au milieu des electros-chocs et des benzodiazépines, celle d’une identité morcelée, d’une existence de reclus sans appartenance ni adresse. Dans sa quête d’un retour en amont du premier embrasement et de sa prise en charge médicale, il nous enseignera le manifeste de l’anti psychiatrie, il fera entendre les voix de Pierre-Félix Guattari et de Gilles Deleuze. Il criera, entrailles à ciel ouvert, sa douleur de vivre un surplus de vide, ce supplément de son manque à être causé par les soins psychiatriques eux-mêmes.
Depuis ces années de lutte, les cartes ont été rebattues par une pharmacopée nouvelle et fantastique. Aujourd’hui les patients atteints de psychoses maniaco-dépressives s’enflamment parfois, mais la plupart est socialisé, a un travail, certains se marient, fondent une famille. Le propos de la pièce reste toutefois précieux et édifiant, car les hôpitaux psychiatriques prisons demeurent, que la clinique de La borde reste l’exception, que les laboratoires pharmaceutiques continue de catégoriser les patients, de faciliter une classification à projet consumériste, celui de vendre toujours plus de médicaments.
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