Le chercheur et créateur Sébastien Genvo explore la voie de l’autobiographie, en racontant, de son point de vue, les derniers mois de son ex-épouse.
« Auriez-vous fait les mêmes choix que moi, lorsqu’elle décida de mettre fin à ses jours ? » La question, crue, ouvre la bande-annonce de Lie in My Heart, un jeu vidéo narratif publié sur Steam vendredi 4 octobre. Celui-ci aborde frontalement les questions de la dépression, du suicide, de la culpabilité de l’entourage et de l’accompagnement d’un enfant orphelin de sa mère.
L’histoire, très lourde, est basée sur l’expérience personnelle de Sébastien Genvo, maître de conférences à Metz et game designer indépendant. En septembre 2017, Marie, son ex-épouse, met fin à ses jours. « Elle souffrait de bipolarité, mais ce n’était pas la seule raison », écarte-t-il, sans rentrer dans les détails.
Après un an de deuil, il développe le projet de traiter de cet épisode en jeu vidéo. Celui-ci se présente comme un mémorial interactif, mais pas seulement : « L’idée, c’était de parler de résilience. Je voulais aborder par le quotidien l’intime, ce qui se passe après. »
Susciter l’empathie et la tristesse
A l’image de ses visuels, qui s’appuient sur des photographies personnelles retravaillées à l’ordinateur, il assume le choix d’un récit autobiographique. « Cela nécessite de la distanciation, et beaucoup de gens me disent que je l’ai fait de manière cathartique, thérapeutique. Pas du tout. Cela a été douloureux, mais j’étais déjà sorti de la partie la plus dure. »
Il évoque une démarche essentiellement artistique. « Je veux permettre d’éprouver de l’empathie, de la tristesse, des émotions très peu développées en jeu vidéo d’habitude, précise-t-il. Toute la difficulté était d’établir jusqu’où je pouvais aller tout en respectant l’acte de témoignage. »
A travers ce projet d’une gravité rare, il entend toucher les joueurs au plus profond.
« Je pars du principe que le rôle de l’art est de nous en apprendre sur nous-mêmes, autrui et notre environnement. J’ai pris mon expérience individuelle comme matériau pour inciter les joueurs à réfléchir à ces problématiques. »
Un jeu sur les dilemmes
Au cœur de ce très court mais poignant récit interactif, aux allures parfois de lettre d’amour, ou au moins d’amitié, la question du choix du suicide. « La bipolarité, ce n’est pas comme un cancer. C’est une maladie aussi, mais il y a une part de volonté. Jusqu’où peut-on expliquer qu’un acte est volontaire ? C’est une question qu’un enfant se pose », relate-t-il, tout en laissant au joueur le choix de la manière, forcément difficile, de raconter à un enfant de 5 ans que sa mère ne reviendra pas.
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