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L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a annoncé lors d'un point presse qu'en psychiatrie, le valproate et ses dérivés prescrits dans les troubles bipolaires, à savoir la Dépamide et la Dépakote, seront, non plus d'utilisation restreinte à de la seconde intention, mais clairement contre-indiqués en cours de grossesse et chez les femmes en âge de procréer sans contraception efficace, et ce dès demain vendredi 7 juillet.
La France est le seul pays à pousser les choses aussi loin. « C'est une action de santé publique, a expliqué le Pr Dominique Martin, directeur général de l'ANSM. Le valproate est un puissant tératogène. Il est apparu après consultation des psychiatres qu'il est possible de s'en passer dans les troubles bipolaires, ce qui n'est pas toujours le cas dans l'épilepsie. » Cette mesure de contre-indication est en cours d'évaluation par l'agence européenne (EMA) avec une décision attendue fin 2017-début 2018.
Encore trop prescrit chez les femmes bipolaires
L'ANSM révèle que des études pharmacoépidémiologiques en partenariat avec la CNAMTS ont mis en évidence un nombre plus important de femmes en âge de procréer traitées par valproate dans les troubles bipolaires que dans l'épilepsie. De plus, il est apparu que le valproate est arrêté au 1er trimestre de grossesse dans 85 % des cas dans les troubles bipolaires, quand le médicament est poursuivi dans 70 % au second trimestre dans l'épilepsie.
La prescription de Dépamide et de Dépakote reste autorisée chez les femmes en âge de procréer avec contraception efficace. La prescription initiale annuelle reste réservée aux psychiatres et avec accord de soins obligatoire. L'ANSM indique que le choix de la contraception efficace « sera décidé après échanges avec la patiente », a précisé Dominique Martin, notamment en fonction de ses capacités d'observance pour la pilule.
Nouveau pictogramme
Des alternatives au valproate sont disponibles en psychiatrie, à savoir des antipsychotiques « de type olanzapine, rispéridone ou quiétapine », a précisé Philippe Vella de l'ANSM, signalant à ce sujet que la fiche conjointe ANSM-HAS va évoluer. Le risque de troubles de l'humeur étant diminué en cours de grossesse, un arrêt de traitement peut être envisagé selon les cas. Le traitement par valproate peut être repris en post-partum et l'allaitement est autorisé. « À ce sujet et plus largement, des études sur le rôle de l'épigénétique sont en cours », a précisé Dominique Martin.
Le pictogramme, mis en place en mars 2017 représentant une femme enceinte dans un triangle rouge avec la mention « Dépakote + grossesse = danger », sera modifié et remplacé sur les boîtes et plaquettes de médicaments par une pastille ronde rouge barrant une femme enceinte avec la mention « Dépakote + grossesse = interdit ». Pour la Dépakine et ses dérivés dans l'épilepsie (Dépakine, Dépakine Chrono 500, Micropakine et génériques), le pictogramme reste inchangé.
Les enfants exposés in utero présentent dans 30 à 40 % des cas un risque de troubles graves du développement ou du comportement et/ou, dans plus de 10 % des cas, un risque de malformations congénitales. Selon une enquête réalisée à partir des données de la CNAM, il y aurait eu sur la période 2007-2014 plus de 14 000 femmes enceintes exposées. Selon des projections, il y aurait entre 2 000 et 4 500 enfants ayant des troubles neuro-développementaux et/ou des malformations. En 2015, il y aurait 50 000 femmes traitées par Dépamide ou Dépakote. On estime qu'une centaine de femmes par an en France sont exposées à ces deux molécules en cours de grossesse.
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