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mercredi 2 septembre 2015

L’essor de la méditation pleine conscience


Depuis une vingtaine d’années, rappelle The Australian & New Zealand Journal of Psychiatry, l’intérêt pour la méditation pleine conscience (MPC) augmente de façon considérable, et nombre d’interventions de ce type sont actuellement proposées en matière de développement personnel ou d’aide psychologique (notamment pour accroître les facultés de concentration).
Selon certains promoteurs de la MPC, la recherche sur son efficacité n’en est encore qu’à « ses balbutiements. » L’un des débats sur les interventions de MPC concerne l’interrogation sur la possibilité que cette MPC puisse se trouver dénaturée par la transposition de son cadre bouddhiste d’origine vers un contexte laïque et psychothérapeutique. Autrement dit, est-il vraiment légitime d’extraire une technique de son domaine initialement religieux pour en tirer une méthode « profane » ? Ce débat est d’autant plus justifié que certains auteurs assurant la promotion de ces interventions (laïques) basées sur la MPC sont eux-mêmes des moines bouddhistes. Si le contenu originel de la MPC est « explicitement spirituel », il n’est pas évident que sa transposition laïque soit pleinement justifiée, hors de son « intention spirituelle globale. » Par exemple, le cadre de la méditation bouddhiste associe « une métaphysique, une éthique et une illusion de l’ego. » Matthieu Ricard parle ainsi de « l’imposture du moi » et de la « source de vulnérabilité constante » liée à « l’identification à un ‘‘moi’’ qui siègerait au cœur de mon être. » Une conception radicalement opposée à la vision occidentale valorisant systématiquement l’estime de soi et le renforcement de l’ego. Mais dans la sagesse bouddhiste, la liberté intérieure viendrait au contraire d’un « amenuisement de cette identification » au moi, affaiblissement qui permettrait, selon la pensée bouddhiste, une « plénitude et une confiance sans égale. » En admettant, poursuit Matthieu Ricard, que l’ego ne représente qu’un « concept » (sans existence réelle) procurant seulement une « confiance factice, construite sur des attributs précaires », on développerait une authentique « confiance en soi » constituant « paradoxalement une qualité naturelle de l’absence d’ego. » Ce détachement du moi offrirait une « liberté fondamentale », loin des « contingences émotionnelles » et une « invulnérabilité face aux jugements d’autrui. » Curieusement, cet aspect (bouddhiste) du renoncement à la primauté du moi n’est pas sans rappeler la conception de Pascal affirmant que le moi serait « haïssable. »
Dr Alain Cohen


RÉFÉRENCE
Murray G : Do I have a self ? (and other useful questions from Buddhist mindfulness). Aust N Z J Psychiatry 2015 ; 49 (7) : 593–594.

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