Confier la critique de deux ouvrages pointus sur un sujet qui l'est tout autant - la psychiatrie - à Didier Morisot, notre infirmier "san antoniesque" nous a bien plu. A lire sa prose, l'exercice lui a plutôt réussi, d'autant que le sujet lui est familier. Bonne lecture avec autant de sérieux que de petits sauts de côté très... morisiens...
Consentement et contrainte dans les soins en psychiatrie
Consentement et contrainte... autant dire l’eau et le feu, deux notions ennemies qui doivent cependant cohabiter dans le monde si particulier de la psychiatrie. Un exercice d’équilibre, donc, une ligne de crête où le risque est bien de tomber dans un « laxisme » criminel (aux yeux de la société) ou au contraire d’alimenter un système coercitif n’ayant de soin que le nom.
Psychiatrie, ton univers impitoyable… ou plutôt, non, pitoyable, en fait. Déjà par son histoire que les auteurs détaillent en première partie du livre. Un lourd passé, dirons-nous, remontant au moyen-âge (mais pas avant, les gaulois ayant laissé très peu de traces écrites). Bref, ce collectif de médecins et de sociologues brosse un portrait de la famille humaine où les placards regorgent de squelettes. Avec quelques exceptions, toutefois... A certains moments, la charité chrétienne a en effet joué son rôle en accueillant de façon humaine le « fol », celui que l’on brûlait accessoirement en place publique. Cela dit, si on ne les brûlait pas tous, on les brutalisait souvent, le « grand renfermement » sous Louis XIV n’ayant ainsi rien à envier à nos camps de déportation contemporains. Mais heureusement, tout évolue, même sous l’Ancien Régime où les bonnes volontés finissent par réagir. Cela dit, que le contribuable moderne se console, à cette époque, l’intendance a déjà du mal à suivre. Détail croustillant, un rapport de 1785 (sur la réforme des hôpitaux) reste lettre morte suite à des problèmes budgétaires ; le déficit est trop grand, à cause de la guerre d’indépendance américaine. Et toc !
Les équipes mobiles en psychiatrie et le travail de disponibilité
Bien que la psychiatrie soit un domaine éminemment sinueux, ce livre est dans la droite ligne du précédent. La centaine de pages qui le compose éclaire en effet un aspect peu connu du « secteur », cette (r)évolution des années soixante née dans l’euphorie des trente glorieuses. Un secteur, entre nous, qui peine toujours à s’imposer dans le monde compliqué de nos quarante laborieuses… Le sujet du jour est donc la mobilité en psychiatrie. Les « équipes mobiles » plus précisément, une notion dont la genèse est décrite en début d’ouvrage. Après (entre autres) une évocation de la préhistoire (le « patronage à domicile pour les aliénés convalescents » en 1864), un survol de la médecine sociale des années 30 (« aller au-devant de la population », tout ça tout ça…), les auteurs nous conduisent aux portes radieuses du secteur sus-évoqué et à cette fameuse mobilité qui en est la quintessence.
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