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vendredi 13 novembre 2020

Covid-19 : à quel vaccin se vouer ?

Par Olivier Monod — 

Injection du vaccin de Gamalaïa, à Moscou, le 11 septembre.

Injection du vaccin de Gamalaïa, à Moscou, le 11 septembre. Photo Sergey Ponomarev. The New York Times

Deux jours après Pfizer, le centre de recherches russe Gamaleïa a annoncé mercredi que son vaccin est «efficace à 92 %». Des résultats dont on ne peut pas tirer grand-chose à ce stade.

Le groupe pharmaceutique américain Pfizer pensait avoir décroché le pompon en annonçant, lundi, que son vaccin en développement contre le Covid-19 était «efficace à 90 %». Mais la Russie pouvait difficilement rester à la traîne : mercredi, soit deux jours plus tard, le centre de recherches Gamaleïa a donc communiqué sur une efficacité de 92 % de son vaccin Spoutnik V. La course mondiale au vaccin est plus que jamais relancée alors que plusieurs pays vivent un regain de l’épidémie, mais il convient de rester prudent. Quoique réjouissantes, ces annonces laissent sceptiques quant à leur forme, un simple communiqué de presse, et non des articles scientifiques, avec un chiffre, élevé, d’efficacité mais aucun détail. On comprend bien l’intérêt des Etats et des entreprises d’apparaître en sauveurs au beau milieu d’une pandémie qui a provoqué la mort de plus d’un million de personnes dans le monde.

Depuis son annonce, Pfizer a vu l’Europe finaliser une commande pour 300 millions de doses et le Canada augmenter de 56 millions de doses sa commande initiale de 20 millions.

40 000 volontaires

Sur le fond, que peut-on dire ? Dans les deux cas, les scientifiques ont recruté environ 40 000 volontaires. La moitié s’est vu injecter le candidat vaccin (Spoutnik V chez les Russes et BNT162b2 pour Pfizer) et l’autre moitié a reçu un placebo. Le but de l’essai est de comparer le nombre de personnes malades du Covid-19 dans chacun des deux groupes. Les volontaires sont recrutés dans des zones où le virus circule activement pour accélérer le processus. Il s’agit de la Russie, la Biélorussie, le Venezuela, l’Inde et les Emirats arabes unis pour Gamaleïa. Pfizer s’est déployé en Argentine, au Brésil, en Allemagne, en Afrique du Sud, en Turquie et aux Etats-Unis.

Selon leurs communiqués respectifs, l’entreprise américaine a repéré 94 cas de Covid-19 parmi ses volontaires et Gamaleïa seulement 20. Aucune autre information sur la sévérité des cas, l’âge des patients ni même la répartition dans chaque groupe (placebo ou vaccin) n’est donnée. Mais selon les analyses statistiques des fabricants, l’efficacité est donc de 90 % pour l’Américain et 92 % pour le Russe. Ce qui signifie que l’immense majorité des personnes malades ont reçu le placebo.

Vecteur viral

Le parallèle entre les deux vaccins est intéressant car il illustre aussi deux stratégies radicalement différentes de développement. Pfizer se base sur une technologie de la société allemande établie à Mayence BioNTech, nouvelle dans l’univers vaccinal. A l’inverse, Gamaleïa insiste bien sur le fait que son «Spoutnik V est basé sur une plateforme de vecteur adénoviral très bien connue». Le principe de la vaccination est simple, il s’agit d’injecter tout ou partie du virus dans le corps afin que le système immunitaire apprenne à le reconnaître et, ainsi, sache se défendre en cas d’infection naturelle. Mais il existe plusieurs techniques pour arriver à cet objectif.

Gamaleïa a choisi celle du vecteur viral. Quoi de mieux qu’un virus pour faire rentrer dans le corps les éléments d’un autre virus ? Les scientifiques russes utilisent un véhicule de la famille des adénovirus pour faire rentrer dans le corps des éléments du code génétique du Sars-CoV-2, responsable du Covid-19. L’adénovirus est modifié pour le rendre inoffensif. On ajoute ensuite à son génome le gène de la fameuse protéine «spyke» qui est caractéristique du Sars-CoV-2. Une fois dans le corps, l’adénovirus pénètre dans une cellule et lui fait produire la protéine «spyke» que le système immunitaire apprend ainsi à reconnaître. Mais le vecteur ne se réplique pas.

Originalité

Cette plateforme vaccinale est connue puisqu’elle a déjà été testée, mais pas toujours avec succès, dans le cas du VIH, de la grippe ou encore d’Ebola. Les vaccins candidats contre le Covid-19 actuellement en phase 3 d’essai clinique développés par Oxford-AstraZeneca, Janssen et CanSinoBio utilisent cette technique. L’originalité de l’approche russe consiste à utiliser deux vecteurs différents pour les deux injections.

Démarche novatrice

De leur côté, la démarche choisie par Pfizer et BioNTech (qui est aussi celle de leur concurrent américain Moderna, également en phase 3) est vraiment novatrice. L’idée est d’injecter, non pas tout le virus, mais son information génétique, via l’ARN message (ARNm, une copie de l’ADN) pour produire la fameuse protéine «spyke».

Pour en faire un vaccin, l’ARNm est protégé dans une bulle de lipide qui va être ingérée par des cellules du corps. Celles-ci vont ensuite se saisir de l’ARNm, produire la protéine qu’il code («spyke» donc) et la présenter au système immunitaire. Aucun vaccin sur le marché n’utilise encore cette technologie.



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