PAR
COLINE GARRÉ -
PUBLIÉ LE 11/03/2020
Crédit photo : AFP
« Je reçois dans mon cabinet des patients extrêmement angoissés qui décompensent sur le plan psychiatrique à cause de la psychose sociale autour du coronavirus », alertait ce 11 mars au standard de France Inter (vers la 16e minute) une généraliste, non sans pointer la responsabilité des médias et du gouvernement.
Comment ne pas céder à la panique ? Et rassurer les patients ? L'Organisation mondiale de la santé (OMS) met en ligne des guidelines pour protéger le bien-être mental et psychologique au temps du coronavirus, qui s'adressent aux soignants, aux directeurs de structures sanitaires, à ceux qui travaillent auprès des jeunes enfants ou des personnes âgées, ou encore à la population générale.
Soignants, protégez-vous
L'OMS invite les soignants, confrontés à leur propre stress, mais aussi à celui des patients et de leurs pairs, à se protéger. « Le stress que vous ressentez est normal et ne signifie en rien que vous ne pouvez pas faire votre travail ou que vous êtes faible », dit l'OMS. Elle appelle à des mesures de bon sens : suivre une bonne hygiène de vie, bien manger et dormir, éviter les drogues et stupéfiants, chercher du soutien auprès des pairs, se reposer et solliciter les ressources personnelles qui se sont révélées utiles dans de précédentes situations stressantes.
L'OMS attire l'attention sur l'importance d'adapter les messages de prévention aux capacités intellectuelles, cognitives et psychosociales des personnes souffrant de handicap ou de maladie.
Les directeurs des structures doivent tout faire pour prémunir les soignants d'un stress chronique pendant cette phase de réponse à l'épidémie, les informer régulièrement et faire des rotations de personnel pour épargner les plus vulnérables. Ils doivent aussi encourager l'accès des équipes aux services de soutien psychologique.
L'OMS rappelle l'existence du guide des premiers secours psychologiques que les responsables peuvent mettre dans les mains des paramédicaux, travailleurs sociaux et des aidants pour soutenir les personnes en souffrance psychologique.
Vigilance à l'égard des plus vulnérables
L'OMS invite les personnes qui s'occupent des enfants à trouver des façons positives d'exprimer leurs émotions dans un environnement apaisant. Il est aussi important de préserver les liens avec familles et proches, maintenir les routines et répondre à leurs questionnements.
À l’égard des personnes âgées, en particulier isolées ou souffrant de déclin cognitif, l'OMS insiste sur l'importance de maintenir un environnement social autour d'elles, et de leur transmettre une information adaptée. Elle suggère de valoriser leur expertise et expérience, en tant que scientifiques retraités par exemple, ou ne serait-ce que pour s'occuper des enfants des soignants mobilisés ou des voisins.
Enfin, l'OMS recommande à la population générale d'éviter la surconsommation d'informations en temps réel, en se limitant à regarder deux fois par jour l'actualisation de la situation, via des sources fiables (dont l'OMS). Elle met en garde contre toute catégorisation discriminante ou stigmatisante (« cas suspects », « famille à Covid-19 », etc.), et suggère de mettre en avant les personnes guéries du Covid-19.
En Chine, des psys débordés
Les psychiatres et les psychologues chinois sont confrontés à un afflux croissant de patients et à un pic d'appel, relate l'AFP. Peur de la contamination, solitude en quarantaine (qui concerne plus de 50 millions de personnes dans la province de Hubei), souffrance liée aux décès, inquiétudes des parents pour leurs enfants... Les psys sont d'autant plus débordés que la Chine compte à peine 2,2 psychiatres pour 100 000 habitants, selon l'OMS. Le ministère chinois de la Santé a indiqué que plus de 300 lignes d'assistance téléphonique ont été mises en place par des universités ou des associations. Mais sans formation adéquate. « Certains intervenants craquent après leur service. Ils sont abattus et bouleversés », témoigne Ming Yue, psychiatre stagiaire sur la plateforme mise en place par l'Université normale de Pékin.
Le Pr Chee Ng, psychiatrie (Université de Melbourne) met en garde contre les répercussions d'un allongement du confinement sur la santé mentale. Il s'inquiète par ailleurs sur les effets nocifs de la propagande d'État pour les médecins et infirmières des hôpitaux. « Lorsque vous êtes présenté dans les médias comme étant quelqu'un de fort, de dévoué à votre métier, c'est plus difficile ensuite d'avouer vos faiblesses », souligne-t-il.
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