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lundi 10 décembre 2018

Aux Etats-Unis, des fêtes délirantes pour dévoiler le sexe des futurs bébés

Fille ou garçon ? La surprise est révélée à la famille, aux amis et aux parents eux-mêmes lors des « gender reveal parties », dans une débauche de rose ou de bleu. Et le film de la fête est diffusé sur YouTube.
Par Corine Lesnes Publié le 1à décembre 2018

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Lecture 3 min.
   La précieuse information est enfermée dans une enveloppe scellée et  transmise à la personne désignée par le couple, qui gardera le secret du sexe de l’enfant jusqu’à la « gender party ».

La précieuse information est enfermée dans une enveloppe scellée et  transmise à la personne désignée par le couple, qui gardera le secret du sexe de l’enfant jusqu’à la « gender party ». Mccallk69/iStockphoto/Getty Images
C’est la nouvelle mode aux États-Unis parmi les parents qui attendent un enfant :les fêtes de gender reveal. Ou la révélation – publique – du sexe du bébé à venir. Plutôt que d’apprendre dans l’intimité du cabinet d’échographie s’il s’agit d’un garçon ou d’une fille, les couples américains font maintenant participer famille et amis à leur découverte. Voire toute la planète : les gender reveal parties occupent plus de 500 000 pages sur YouTube.

Le principe repose sur la complicité de l’échographe, du gynécologue ou du laboratoire d’analyse de l’ADN qui, au lieu de révéler le sexe de l’enfant aux parents, inscrivent l’information dans une enveloppe scellée. Celle-ci est transmise à la personne désignée par le couple pour garder le secret et organiser la fête. « J’étais très flattée d’avoir été choisie comme maîtresse de cérémonie, mais en même temps paniquée par la responsabilité », raconte Julianne, une assistante médicale du Texas, qui a organisé la gender reveal party de sa belle sœur Dany et de son frère James, cinq mois avant la naissance du bébé.

Dans un cupcake, un tuyau ou des pétards

Les détails pratiques varient d’une famille à l’autre. Dany et James avaient choisi la formule « ballons ». En secret, Julianne a acheté l’accessoire. Un grand ballon noir, une couleur « neutre ». A l’instant fatidique, devant tous les invités réunis, Dany a percé le ballon. Une pluie de confettis bleus s’en est échappée, signifiant qu’il s’agissait d’un garçon.
D’autres couples choisissent les cupcakes, fourrés à la crème rose ou bleue, qui livrent leur secret dès que la future mère entame le dessert (la pâtisserie est dépositaire du secret) ; les pétards, qui dégagent une fumée rouge ou bleue ; le tuyau d’arrosage, qui déverse de l’eau colorée, voire la lance à incendie du camion de la caserne, pour le pompier Ray Hernandez et sa femme, Dorya, fin novembre, à Houston.
La mise en scène est digne des comptes à rebours du 31 décembre à Times Square. Cinq, quatre, trois… Tout le monde saute et hurle de joie quel que soit le résultat.
La fête est accompagnée de concours de pronostics. Les invités choisissent des badges : « Team lashes » ou « Team staches » (« équipe cils » ou « équipe moustaches »), selon la thématique recommandée sur Pinterest. La mise en scène est digne des comptes à rebours du 31 décembre à Times Square. Cinq, quatre, trois… Hystérie garantie. Tout le monde saute et hurle de joie quel que soit le résultat.
La notion de gender reveal participe de la culture de la transparence sur les réseaux sociaux. Tout ce qui est privé est public et se doit d’être partagé sur Instagram. Ses promoteurs mettent aussi en avant que, à la différence des traditionnelles « baby showers », les réunions qui permettent aux amies de la future mère de lui offrir des cadeaux, les hommes sont associés.
Le phénomène fait aussi l’objet de critiques. Moins pour son côté archicommercial (on est aux États-Unis) que pour l’atteinte au politiquement correct (on est aux États-Unis). Principal reproche : les gender reveal partiesencouragent une conception « binaire » du genre et renforcent les stéréotypes les plus éculés (bleu ou rose).

Jusqu’à l’excès…

En septembre, Kwame Anthony Appiah, le chroniqueur du New York Timesspécialisé dans les questions d’éthique, a été saisi de la question angoissée d’un lecteur : pouvait-il décemment assister à une fête qui violait son « code moral » et perpétuait la « stigmatisation » contre ceux qui ne se considèrent pas comme participant de l’un ou l’autre sexe ? Le philosophe a répondu en minimisant le péril. Après tout, ce n’est pas parce qu’un parent aura célébré l’arrivée d’une fille qu’il ne sera pas « parfaitement heureux si l’enfant devient plus tard un garçon ou ni fille ni garçon », a-t-il souligné.
Poussé à l’extrême, le phénomène peut être dangereux. En Arizona, Dennis Dickey, 37 ans, avait élaboré un dispositif qui le verrait tirer au fusil sur une cible où serait inscrit « garçon ou fille », dans un décor sauvage : les hautes herbes jaunes de la forêt nationale de Coronado, au sud de Tucson. C’était le 23 avril 2017. Le coup de fusil du futur papa sur la boîte de Tannerite, un explosif binaire utilisé pour le tir sur cible, a déclenché un incendie dévastateur que les pompiers ont mis une semaine à éteindre. Le feu a détruit 20 000 hectares. Dennis Dickey – qui se trouve être un agent de la police des frontières ! – a plaidé coupable. Il a été condamné à payer immédiatement 100 000 dollars d’amende, plus 500 dollars chaque mois pendant vingt ans. Le Service national des forêts vient de mettre la vidéo du gender reveal en ligne. Avant les flammes, on voit distinctement un éclair bleu. C’était un garçon.

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