| 26.10.2018
La Conférence nationale des présidents de commission médicale d'établissement (CME) des centres hospitaliers publie une enquête* édifiante sur le moral altéré des troupes médicales et la situation budgétaire dégradée dans 192 hôpitaux – hors CHU. Présidée par le Dr Thierry Godeau, endocrinologue à La Rochelle, la conférence fait état d'une « situation très inquiétante » dans ces établissements de petite ou moyenne taille (42 % ont un budget annuel inférieur à 60 millions d'euros).
Selon les remontées déclaratives des médecins, 78,5 % des établissements accusent un déficit, 16,8 % sont à l'équilibre et 4,7 % seulement affichent un excédent. 41,6 % des hôpitaux enregistrent un déficit supérieur à 3 % de leur budget. Mais surtout, trois présidents de CME sur quatre (76 %) estiment que leur employeur ne dispose pas de « marges de manœuvre significatives » pour retrouver l'équilibre budgétaire.
Recherche « insoutenable » d'économies
« Si les résultats définitifs seront probablement minorés en fin d'année par des mesures techniques qui touchent à leur limite (reprise sur provision, dégel éventuel des dotations, etc.), cela traduit la désespérance régnant dans la majorité des établissements », analyse la conférence. Jour après jour, insiste-t-elle, « l'orthodoxie budgétaire supplée les enjeux de qualité des soins et de réponses aux besoins des usagers ». Au point que la politique de recherche d'économies devient, pour les structures, « insoutenable ».
Dans ce contexte, le moral des praticiens hospitaliers (PH) est « profondément altéré ». Sept PH sur dix placent le curseur en dessous de cinq sur une échelle d’un à dix (de mauvais à bon moral).
Cet état d'esprit est significatif des obstacles que rencontrent les présidents de CME au quotidien, que ce soit dans leur fonction managériale ou dans leur pratique médicale. Une écrasante majorité (87 %) des médecins atteste de « difficultés significatives d'attractivité médicale ».
Ils sont également 72,4 % à manifester des « difficultés de fidélisation avec une accentuation des départs de praticiens ». Loin d'être nouvelle, la problématique de la pénurie médicale « s'aggrave »néanmoins, rappelle la conférence. Des « déserts hospitaliers » apparaissent et même « s'étendent avec l'arrêt d'activités hospitalières de proximité par manque de médecins ». Cette conjoncture « risque de conduire à une rupture irréversible de l'offre de soins si rien n'est fait », s'alarme-t-elle.
Les présidents de CME sont aussi préoccupés par le « malaise hospitalier » actuel, qui se traduit par une augmentation des signalements des risques psychosociaux à l'hôpital, la « violence » de certains mouvements sociaux (grève dure et de longue durée, séquestration, grève de la faim, etc.) et la démission de responsables médicaux, « autant de signaux d'alertes qui devraient pourtant pousser à agir sans attendre ».
Ne pas laisser mourir l'hôpital
Ces quelque 200 praticiens estiment qu'à ce stade, « visiblement rien » n'est fait par le gouvernement pour répondre à court terme au trouble hospitalier. Si le plan Ma santé 2022 est une « cible ambitieuse », « l'impulsion attendue pour répondre à l'urgence, tant en termes de choc d'attractivité médicale pour les carrières hospitalières que d"investissements pour la transformation, n'a pas été donnée ».
Ce constat étant fait, la conférence appelle solennellement le gouvernement à revoir sa copie s'il veut éviter de « laisser l'hôpital mourir dans l'indifférence ».
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