Quand un homme fait des avances à une femme, il est bien vu qu’elle résiste. Son «Non» n’est pas un refus mais un encouragement : «Fais-moi la cour», «Prouve-moi que t'es un homme». A l’inverse, quand une femme fait des avances à un homme, il est mal-vu que celui-ci résiste.
Le mot «Non» a un sens différent selon qu’il vient d’un homme ou d’une femme. Dans un article sobrement intitulé «No» (publié en 2003 dans la revue Language & Communication), l’anthropologue Don Kulick, de l’Université d’Uppsala, en Suède, démontre par A plus B que «Non» venant d’une femme n’est pas toujours synonyme de «Non». Ce qui explique pourquoi les procès pour viol ou agression sexuelle sont toujours si compliqués, douloureux et humiliants.
Dire «Non» pour signifier «Je suis gay»
Quand un homme fait des avances à une femme, il est culturellement bien vu qu’elle résiste. «Pour le formuler dans les termes de la théorie performative, l’identité féminine repose en partie sur le fait de dire “Non” lorsqu’elle est confrontée à un désir sexuel masculin. L’identité masculine, au contraire, repose sur les normes contraires.» Quand une femme fait des avances à un homme, il est très mal vu qu’il se refuse. S’il dit «Non», deux interprétations sont possibles : 1. cet homme est gay. 2. la femme qui lui a fait des avances est repoussante. Un homme, un vrai, doit toujours dire «Oui» et se mettre a garde à vous quand une femme veut de lui… sauf si elle est «moche» : c’est la seule excuse qu’il puisse invoquer sans perdre la face. Les circonstances atténuantes d’un homme qui se refuse sexuellement sont très limitées. Comme on le voit, la culture patriarcale est tout aussi contraignante pour les hommes que pour les femmes. Ce que Don Kulick résume brillamment en une phrase : «Cette grammaire culturelle fait du “Non” un mot producteur de féminité et du “Oui” un mot producteur de virilité.» Le sujet mâle se construit dans sa capacité de satisfaire tous les désirs féminins, si possible les yeux fermés.
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