| 05.09.2018
Crédit Photo : S. Toubon
C'est l'intrusion le 20 août d'un patient armé d'une lame de cutter, dans une salle de repos destinée au personnel de l'hôpital Saint-Jacques, qui a décidé la direction du CHU de Nantes à mettre en place de nouvelles mesures de protection des soignants en psychiatrie. Suivi en ambulatoire mais pas hospitalisé dans l'établissement, le patient, souffrant de troubles psychiatriques, avait sévèrement blessé un cadre au visage. Trois autres personnes ont été prises dans la bagarre.
Les quatre salariés agressés ont été pris en charge aux urgences du CHU. Deux d'entre eux ont déposé plainte contre le patient, ainsi que le CHU en soutien. Ils subissent une incapacité temporaire de travail de dix et cinq jours. Hospitalisé à Saint-Jacques, le patient sera transféré en unité pour malades difficiles quand une place sera libre.
En juin, deux autres soignants avaient été agressés par des patients violents dans le même hôpital.
Pas de police permanente
Dans ce contexte, le CHU a décidé de renforcer sa politique de sécurisation du service psychiatrique de l’hôpital Saint-Jacques. Situé aux abords du centre de Nantes, l'établissement de près de 1 000 lits, ouvert sur la ville, regroupe sur une grande superficie la rééducation fonctionnelle, la psychiatrie, la gériatrie et le plateau logistique du CHU. Dotée de 300 lits et 300 places, la psychiatrie repose aussi sur l'activité de consultation.
Jusque-là constituée de 20 personnes assurant l'accueil, la sécurité incendie et la sûreté des personnels, l'équipe sécurité/sûreté est donc consolidée par six nouveaux postes dédiés à la protection des soignants de psychiatrie. Leur travail : effectuer des rondes et prévenir la présence de drogues (comme le cannabis) sur le site.
La direction n'a pas souhaité faire davantage appel à la police, qui intervenait jusque-là de manière ponctuelle pour des problèmes liés à la consommation de stupéfiants. « La sécurité des soignants nous préoccupe beaucoup, cette agression nous a choqués, confie Élise Doucas, directrice adjointe du CHU de Nantes. Pour autant, la présence permanente de la police est inappropriée : je rappelle que l'immense majorité des patients sont non-violents. »
Le CHU veut également déployer en 2019 une mesure jusque-là expérimentale : des chambres dont l'entrée se fait par une carte à puce détenue par les patients. « Ces chambres restent accessibles aux soignants mais sécurisent les patients les uns des autres, notamment les plus précaires », explique Élise Doucas.
La direction a aussi engagé un audit sur la sécurisation du site et ouvert un groupe de travail.
Manque de moyens
« Quand un patient devient agressif, c'est soit parce que la prise en charge ne s'est pas faite en temps et en heure, soit par manque de moyens, analyse le Dr Rachel Bocher, chef du service de psychiatrie où l'agression a eu lieu. En psychiatrie, on s'occupe souvent de la vitrine mais pas du magasin ».
La psychiatre également présidente de la centrale syndicale INPH, qui était absente au moment de l'intrusion du patient violent, apprécie le renfort de l'équipe de sécurité décidé par la direction du CHU de Nantes, une mesure « qui va dans le bon sens pour l'après, mais qui ne prévient par contre pas les situations d'agression. »
Avant cette agression, le CHU avait déjà développé un plan d'action contre la violence au sein de l'établissement. D'ici à la fin de l'année, 200 soignants et médecins seront formés (en quatre jours) à la prévention des situations de conflit. La formation est ouverte aux internes depuis 2018.
Cette agression à Nantes fait écho à une autre affaire, à Marseille, où des soignants ont refusé de prendre en charge un patient psychiatrique très violent. Elle rappelle enfin le manque cruel d'unités pour malades difficiles. Le ministère de la Santé en recense dix pour toute la France.
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