Crédit Photo : Anne-Gaëlle Moulun
Psychiatres, infirmiers, aides-soignants, psychologues ou assistantes sociales... ils étaient plus d'une centaine ce matin, venus de toute la région, rassemblés devant l'agence régionale de santé (ARS) d'Auvergne Rhône-Alpes.
Ces professionnels ont répondu à l'appel de plusieurs syndicats (CGT, CFDT et du collectif pédopsychiatrie du Vinatier, collectif pédopsychiatrie Saint-Jean de Dieu et d'autres collectifs de soignants) pour protester contre les fermetures et regroupements d’unités et de structures qui touchent tous les secteurs de la psychiatrie. Une grève a été également suivie ce lundi dans les différents établissements psychiatriques de la région.
« Nous observons une dégradation de nos conditions de travail, souligne le Dr Guillaume Cezanne-Bert, pédospychiatre au Vinatier. Ces dernières années, nous avons pu monter des projets innovants en appui à la politique de secteur et de proximité des soins. À l’heure actuelle, sous couvert d'une juste répartition des moyens et d'équité entre les établissements, nous constatons une baisse importante des budgets des établissements considérés comme surdotés, comme le Vinatier », déplore-t-il. Il regrette un manque de visibilité et « une absence d'échanges avec l'ARS ».
Vision floue de l'ARS
« L'ARS a une vision lointaine et floue de la psychiatrie et elle promeut certains types de soins qui diminuent la prise en charge », note le Dr Cezanne-Bert. Le Dr Stéphane Henriette, psychiatre au Vinatier, note qu'une très grande majorité de la file active de patients est déjà prise en charge en ambulatoire (un des souhaits de l'ARS), ce qui laisse peu de marge de manœuvre. « Seulement 10 à 15 % des patients sont hospitalisés et leurs séjours sont les plus courts possible », note-t-il.
Il pointe également un « défaut de solutions d'aval », par exemple de places en foyers médicalisés ou en maisons de retraite. « Les patients restent parfois hospitalisés longtemps, faute de place dans ces structures », poursuit le Dr Henriette. Le psychiatre estime que les économies de 3,5 millions d'euros réclamées au Vinatier ont un impact sur l'ensemble du personnel. « 3,5 millions, c'est l'équivalent de 78 postes de soignants et d'administratifs. Nous avons dû jouer sur les enveloppes de remplacements. En pratique, cela donne des lignes de soins qui ferment. Dans le pôle Ouest, où je travaille, nous avions 13 infirmiers, nous n'en avons plus que 12 et une unité a fermé ».
Ces restrictions budgétaires ont aussi un impact sur l'ambiance dans les services, de plus en plus touchés par les agressions de soignants. En 2015, à l'hôpital Saint-Jean de Dieu, 46 % des accidents de travail étaient consécutifs à des agressions physiques ou verbales, note Raphaël Lardon, infirmier et secrétaire du CHSCT de l'hôpital Saint-Jean de Dieu.
Non aux suppressions de postes
Reçue ce lundi à 11h30 par l'ARS, une délégation a rappelé son opposition « au démantèlement de la psychiatrie adulte et de la pédopsychiatrie de secteur, aux fermetures de lits, d’unités, de foyers, de la radio, des structures de proximité ». Elle s'oppose aux 49,5 suppressions de postes et aux économies de fonctionnement (non-remplacement de maternités, de maladies, gel de postes vacants), mais aussi à « l’abandon des populations au nom des économies ».
Il y a quelques semaines, « le Quotidien » relayait les difficultés des urgences psychiatiques du Vinatier, en sous-effectif chronique.
Les syndicats et collectifs de soignants souhaitent poursuivre le combat pour la « défense de la psychiatrie publique de secteur » et pour « l'accès de tous et toutes aux soins et à la prévention ». « Nous voulons continuer à essayer de penser le soin et à être créatifs malgré cette réalité », conclut le Dr Henriette.
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