Le phénomène est connu. La France, faute de places suffisantes pour prendre en charge l'ensemble des personnes handicapées, condamne une partie de ces citoyens à l'exil. 6 500 Français, selon l'Unapei et son livre noir, seraient dans ce cas. L'union appelle les parlementaires à faire cesser ce phénomène et surtout à créer des places.
L'Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis (Unapei) a choisi de sortir son livre noir du handicap en France, ce mardi 20 octobre, soit le jour où les députés débutent l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2016. La date n'est pas anodine. L'union s'explique dès les premières pages des Bannis de la République. Elle y appelle "la représentation nationale à entendre la voix des exclus". Cela passe par deux propositions qui ne semblent pas négociables. Tout d'abord, elle demande que soit mis un terme définitif à l'exil des personnes handicapées hors de France. En outre, elle veut que "chaque personne handicapée trouve enfin une place dans notre société, à proximité de sa famille". Elle ajoute : "Ce n'est pas une faveur, c'est juste un droit."
L'exil en Belgique déjà épinglé
Début octobre, le Gouvernement avait déjà communiqué sur son intentionde "mettre un terme aux départs de personnes handicapées françaises vers la Belgique" (lire ci-contre). Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, et Ségolène Neuville, secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées et de la Lutte contre l’exclusion, avaient annoncé que 15 millions d’euros supplémentaires seraient attribués pour cela. Et d'indiquer également, que des solutions pourraient être mises en œuvre grâce à "une mesure introduite dans le projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui permet aux personnes handicapées et à leur famille de construire, en lien avec les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), un plan d’accompagnement global spécifique en cas de risque de rupture de parcours".
47 000 Français exclus
L'Unapei encourage à son tour les parlementaires à agir, dans le cadre du PLFSS 2016 en stoppant les flux d'exils forcés vers la Belgique et en créant de nouvelles structures. Pour l'Unapei, cette situation ne doit plus être considérée comme une fatalité. Et d'écrire : "Il est urgent que l'État engage un nouveau plan de création de places pour répondre aux besoins des milliers de personnes handicapées." Si l'association reconnaît le contexte budgétaire restreint, elle se demande toutefois si la société peut exclure 47 000 personnes. C'est en effet le nombre de dossiers sans solution d'accueil et d'accompagnement repérés par l'Unapei. Il y a parmi eux : des enfants en attente d'une place en services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad, 12 000) ; des adultes sans place d'hébergement médicalisé (7 000) ; des personnes sans place de foyer (14 000) ou encore des exclus des établissements et services d'aide par le travail (Esat) ou en entreprises adaptées (EA,14 000).
250 millions d'euros donnés à la Belgique
Au-delà de la détresse des familles, présente dans les témoignages des parents d'enfants et d'adultes handicapés exilés en Belgique, l'Unapei insiste sur le gâchis économique. Selon l'association, 4 000 emplois en Belgique sont financés par les départements français et l'Assurance maladie, pour un coût annuel de 250 millions d'euros. Elle propose donc de rediriger ces financements vers des établissements situés dans l'Hexagone et de mutualiser ces sommes dans un fonds géré par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). L'Unapei, dans son livre noir, insiste sur la nécessité de mener parallèlement l'arrêt des exils avec la création de places en France. Sans équivoque, Christel Prado, présidente de l'union écrit en préambule : "Ce n'est pas la Belgique qu'il faut condamner, mais bien malheureusement la politique française du handicap qui bannit des milliers de personnes handicapées en les exilant hors de nos frontières ou en les excluant de notre société."
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