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jeudi 18 septembre 2014

Assurance-maladie : le combat d’une mère face aux dysfonctionnements administratifs

Questions autour du décès de Mathias, 27 ans, insulinodépendant et sans droits Sécu

18/09/2014

Mathias Picard est décédé en février dernier, à 27 ans.Insulinodépendant, il avait été radié de la Sécu étudiante à la fin de ses études et se battait depuis un an pour s’inscrire au régime général. Sa mère a saisi le Défenseur des droits, qui instruit un volet médical et un volet administratif.
« Je ne remets pas la Sécu en cause, ni notre système de santé. Je pointe les dysfonctionnements administratifs et la non-communication entre les caisses primaires d’assurance-maladie. Pendant ce temps, des gens meurent ».
À la lumière de l’histoire tragique de son fils, Véronique Picard a décidé de se battre pour les étudiants en fin de droits qui, mal informés, peinent à rejoindre le régime général, ou se retrouvent plus ou moins longtemps « hors système » au cœur d’un imbroglio administratif. Mais son combat concerne plus largement toutes les personnes qui peuvent se retrouver sans droits à jour - expatriés qui rentrent en France, travailleurs qui changent de statut, citoyens qui déménagent. Son blog héberge déjà plus de 300 témoignages : la majorité des situations se résolvent après des mois d’attente et des avances de frais parfois conséquentes.

Radié

Son fils Mathias est décédé dans la nuit du 16 au 17 février 2014. Il était diabétique insulinodépendant depuis l’âge de 4 ans et demi. Enfant puis adolescent, il consulte un diabétologue tous les trois mois et réalise un bilan complet chaque année, en hospitalisation de jour. Ses soins sont remboursés à 100 % par l’assurance-maladie. Tout jeune adulte, il part au Danemark perfectionner son anglais. À son retour, belle plume aspirant au journalisme, il s’inscrit dans une université de Bretagne en communication et travaille, pendant les grandes vacances, pour la mairie de Paris. Affilié à la LMDE (Sécu étudiante), il voit régulièrement un spécialiste et réalise son dernier check-up en février 2012.

Mathias arrête ses études à l’été 2012, déménage dans la ville de ses grands parents où il s’inscrit à Pôle Emploi. En janvier 2013, il vient renouveler son insuline à la pharmacie ; sa carte Vitale ne passe plus. Il découvre que n’étant plus étudiant, il a été radié de ce régime. Sans avertissement, précise sa mère. Silence radio aussi de Pôle Emploi.« Mon fils a immédiatement déposé un dossier à la CPAM. Après un mois d’attente, il y retourne. Aucune trace de son dossier. On lui en redonne un nouveau à remplir : à nouveau, rien », raconte sa mère.
En attendant, sa famille paie le médecin traitant et l’insuline. Sans droits à jour malgré ses relances, Mathias ne peut percevoir le RSA. Ses vacations précédentes à la mairie de Paris, qui dispose d’un régime spécifique, semblent avoir compliqué son dossier administratif, Mathiasne rentrant pas dans les bonnes cases.

Défaut de suivi ?

Fin août 2013, il se rend dans un centre d’action sociale pour tenter de débloquer la situation. « Ils n’ont rien compris mais ils lui remettent un PASS santé, on reprend espoir » se souvient Véronique Picard. Mathias, qui n’a pas pu effectuer de bilan complet depuis de longs mois, est reçu dans cette permanence d’accès aux soins de santé par un généraliste. Il est censé revenir chaque mois à la PASS récupérer son traitement, viala pharmacie centrale de l’hôpital.
Début 2014 : l’espoir se renforce. L’assistance sociale de l’hôpital décroche pour Mathias un rendez-vous le mi-février avec un responsable de la caisse locale. On lui assure que ses droits seront enfin rouverts sous trois semaines, une consultation avec un diabétologue est alors fixée au 26 février.
Afin de récupérer l’insuline dont il a besoin dans l’intervalle, Mathias file à la PASS, auprès du médecin du CHU. « On lui dit de revenir la semaine suivante, car le médecin est en vacances. Mathias pense qu’en ajustant son régime et en faisant du sport, ça ira » explique sa mère. Le dimanche, il rentre d’un déjeuner chez ses grands parents. Il s’endort et ne se réveille pas. Sa carte Vitale arrivera deux semaines plus tard.

Double enquête

Que s’est-il passé ? Les analyses révèlent une acidocétose. Mais le décès, suppute Véronique Picard, pourrait être la conséquence d’un mauvais suivi de Mathias pendant deux ans. Elle a saisi le Défenseur des droits « pour comprendre ce qu’il s’est passé ». L’enquête, double, comprend un volet administratif (y a-t-il eu une défaillance au niveau de l’assurance-maladie ?) et un volet médical (prise en charge à l’hôpital). L’instruction n’est pas tout à fait terminée.
« Je me battrai pour tous » assure Véronique Picard, qui s’est rapprochée d’une association étudiante, et veut faire connaître son histoire. Elle a confié les témoignages déjà recueillis au pôle santé du Défenseur, mais veut aller plus loin. « Il faut garantir l’accès à une carte Vitale active sous 24 heures, les élus doivent prendre des mesures pour que ça s’arrête ».
Coline Garré
Joints par « le Quotidien du médecin », ni le groupe hospitalier ni les services du Défenseur des droits n’ont souhaité répondre, l’enquête étant en cours d’instruction.

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