Une étude du Conseil de l’Europe, parue le 29 avril dernier, place la France au cinquième rang des pays européens où l’on se suicide le plus en prison. Comme pour donner raison à ce rapport, un homme s’est donné la mort au début du mois de mai à la prison de Vezin, près de Rennes. Surpeuplement, violence, surveillants en colère, récidive… la prison n’en finit pas de montrer ses faiblesses et ses limites.
C’est pour dénoncer ces dysfonctionnements que, depuis 1989, Radio libertaire, l’antenne de la Fédération anarchiste, diffuse chaque semaine « Ras les murs ». L’équipe milite sur les ondes avec un seul slogan : « La prison a fait son temps, qu’elle crève ! »
Tous les mercredis à 20 h 30, Jacques Lesage de la Haye et Pascal Matrat se retrouvent pendant deux heures pour parler de l’actualité carcérale et réfléchir aux alternatives à l’enfermement. Jacques sait de quoi il parle. A 75 ans, tee-shirt noir et veste en cuir, ce psychanalyste ressemble plutôt à un gaillard quinquagénaire. Comme s’il souhaitait rattraper les onze ans et demi, de 1957 à 1968, passés derrière les barreaux.
Issu d’une famille de royalistes convaincus, il n’a pas eu une enfance facile. Une mère cyclothymique et violente, un père marin souvent absent, l’adolescent rebelle multiplie les braquages avant d’être arrêté, à 18 ans. « En taule, je m’en suis sorti grâce aux études. J’ai réussi à passer mon bac, ça m’a sauvé », analyse le militant anarchiste.
A sa sortie, il devient professeur de psychologie à l’université Paris-VIII, et multiplie les combats contre la prison, au sein du Groupe d’information sur les prisons (GIP) de Michel Foucault, par exemple. « Ras les murs » fait partie de ses nombreuses luttes. Au micro, ni stress ni mimique, il anime l’émission depuis sa création. Du philosophe Albert Jacquard au sociologue Loïc Wacquant, il a vu passer nombre d’invités prestigieux.
PROPOSER DES ALTERNATIVES
Le programme commence toujours par un billet d’humeur. « Pour nous, à l’image de la peine de mort, abolie en France en 1981, la prison est amenée à disparaître, commente Jacques Lesage de la Haye. L’enfermement ne peut plus exister sous sa forme actuelle. » S’il reconnaît que notre société n’est pas encore prête à s’en passer, il rappelle la nécessité d’améliorer le sort des détenus.
Concrètement, il s’agit de lire des lettres de prisonniers, de recevoir des invités proposant des alternatives, de répondre aux auditeurs et de faire passer des annonces militantes.
Il s’agit de donner la parole à une utopie, celle de l’abolition de la prison. Et, comme le rappelle l’animateur, « l’utopie, c’est ce qui est impossible aujourd’hui mais possible demain. Et quand je persiste et signe sur la fermeture des prisons, c’est une utopie : c’est impossible aujourd’hui, mais possible demain ».
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« Ras les murs », sur Radio libertaire, chaque mercredi, de 20 h 30 à 22 h 30.
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