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mercredi 25 décembre 2013

Pour comprendre l’homme, rien ne vaut un robot !

Par  le 30/10/13


“L’un des plus grands mystères du monde qui nous entoure, c’est la manière dont les enfants grandissent, la manière dont ils apprennent à découvrir le monde, leur corps, les autres…”, estime le roboticien Pierre-Yves Oudeyer (@pyoudeyer), directeur de recherche à l’Inria et responsable de l’équipe Flowers, sur la scène de Lift France 2013. Or, le développement cognitif d’un enfant prend place à plusieurs échelles : à l’échelle des cellules, des organes (comme le cerveau), du corps et de son environnement physique, mais aussi au niveau de l’individu et de son environnement social ainsi qu’au niveau de toute une population. Et tout cela entretient des relations complexes. “Dans le génome, on ne trouve pas un plan pour construire un organisme. Les organismes qui ont le même génome ne donnent pas forcément lieu au même organisme. Nous reposons sur un système complexe. L’individu se construit en interaction avec son environnement, ce qui signifie qu’il faut une approche systémique pour le comprendre.”
oudeyerlift13fr

Image : Pierre-Yves Oudeyer sur la scène de Lift France à Marseille, photographié par la Fing.
L’observation et la verbalisation, qui sont les outils des sciences humaines et du vivant, sont-elles des outils suffisants pour comprendre cette complexité ? Pour Pierre-Yves Oudeyer, cela ne suffit pas. Nous avons besoin des mathématiques pour modéliser et faire des simulations que ce soit pour comprendre les galaxies, le climat ou la formation du vivant. Et si le développement cognitif d’un enfant est encore plus compliqué, alors nous avons aussi besoin de tenter de le simuler. Les simulations algorithmiques nous ont permis de comprendre les sociétés d’insectes. Et depuis une dizaine d’années, on utilise des robots pour tenter de comprendre le développement de l’enfant, parce que le corps et ses propriétés physiques jouent assurément un rôle fondamental dans le développement cognitif.
“On comprend mal pourquoi on marche avec deux jambes et nous sommes encore plus loin de comprendre comment les enfants l’apprennent”. Visiblement, marcher n’est pas calculer, souligne-t-il dans sa présentation (.pdf). La démarche peu naturelle des robots humanoïdes, comme Asimo, le robot humanoïde de Honda, le montre bien. Même si la manière de construire ces robots s’inspire du vivant, le résultat en est souvent très éloigné. “Des milliers de calculs à la seconde permettent certes de faire que ces robots se déplacent sur des jambes, mais cela ne permet pas qu’ils marchent d’une manière naturelle”. Pour trouver une manière plus naturelle de marcher, il faut se tourner vers les travaux de Tad McGeer, qui, il y a 20 ans, a construit une paire de jambes mécaniques sans moteur, en reproduisant la géométrie de la marche humaine (vidéo). “La structure totalement mécanique qu’il inventa génère une marche naturelle et stable et démontre que la marche s’auto-organise, c’est-à-dire qu’elle nait d’une interaction physique entre le corps et la gravité qui génère un ordre, un fonctionnement qui n’est pas programmé par les gènes.” Une expérience qui aurait été impossible à réaliser avec un animal… “Seul un robot a permis de comprendre la marche”, estime, enthousiaste Pierre-Yves Oudeyer.
L’une des caractéristiques de l’homme est qu’il sait apprendre par lui-même, rappelle Pierre-Yves Oudeyer. Les apprentissages de l’enfant se font progressivement et dans un ordre particulier… Il apprend d’abord à tenir sa tête droite, puis à avancer en rampant, puis à se tenir debout, puis à marcher sur ses jambes. Tous nos apprentissages ne sont pourtant pas préprogrammés dans notre génome… Mais pourquoi les enfants veulent-ils apprendre à marcher sur leurs jambes ? Bien sûr, l’environnement social est moteur, mais cela ne suffit pas. La curiosité a certainement un rôle. Beaucoup de travaux de psychologie se sont récemment intéressés à comprendre notre motivation à pratiquer quelque chose pour le pur plaisir de le pratiquer. Mais force est de reconnaître qu’on ne sait pas encore grand-chose de la curiosité en neurosciences, souligne le chercheur.

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