Marie Gunning, une belle et coquette Anglaise, mourut d’une septicémie à 27 ans. Suites de couches ? Suite de céruse et de minium, plutôt, substances dont les belles du XVIIIe siècle s’enduisaient la face pour avoir joli teint clair et joues roses. Résultat, l’épouse du comte de Coventry est morte cachée dans le noir, la peau surinfectée.
C’est l’une des histoires racontées dans Extravagances, les excentricités de la mode à travers les âges, un ouvrage collectif richement et bellement illustré, qui se promène en dix chapitres sur les n’importe quoi et les beautés de la mode : talons de 50 centimètres qu’on appelle des chopines ; macaronis, «une sorte d’animal ni mâle ni femelle, une chose du genre neutre, qui est apparue récemment parmi nous», écrit l’Oxford Magazine, en 1770, sur ces créatures éthérées portant d’énormes perruques ; manie des gants chez Napoléon, qui en possédait 240 paires ; faux sourcils en poils de souris ; winckel-pickers des mods des années 60 londoniennes ; ou version moderne de la poulaine, la crème dépilatoire à la mort-aux-rats ; coiffes à cornes du XVe siècle… La liste est longue et extrêmement réjouissante.

Les diktats changent, le rapport à l’esthétique aussi, une mode chasse l’autre… et réapparaît quelques décennies ou siècles plus tard. C’est que, expliquent les auteurs dans la préface, la mode - soit la largeur des pantalons, la taille de la jupe, la profondeur du décolleté, la hauteur des talons - est le meilleur indicateur «de l’état d’esprit d’un peuple, de son regard sur la hiérarchie, le pouvoir, la philosophie, la religion, la politique, l’art, la science, l’alimentation, le corps et le sexe». Rien de futile, quoi.
Emmanuèle PEYRET