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mardi 24 décembre 2013

Né et mort de rire

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO | Par 
C’est Noël et, comme tous les ans à pareille époque, le très sérieux British Medical Journal (BMJ) desserre son nœud de cravate et sort confettis, serpentins et langues de belle-mère. You kaïdi, you kaïda, c’est l’heure de s’amuser au pays de la recherche biomédicale, avec quelques articles dérivant – mais toujours avec la rigueur qui sied à la science – vers les confins de la farce. Et comme il est question d’humour, pour cette cuvée 2013, deux spécialistes de pharmacologie, MM. Ferner et Aronson, se sont intéressés aux effets sur la santé d’une substance trop peu étudiée par les médecins une fois qu’ils ont cessé d’être potaches puis carabins : le rire.

En introduction, les deux auteurs notent que le BMJ n’a pas traité le sujet depuis 1899, date à laquelle un éditorialiste a suggéré la fabrication du mot « gélotothérapie » (du grec gelos, « rire ») après qu’un correspondant italien du journal a proposé de soulager les malades de bronchite en leur racontant des blagues.
Cette longue lacune dans les archives du British Medical Journalne signifie pas pour autant que la science ne s’est pas penchée sur la question dans d’autres revues. Pour leur étude, MM. Ferner et Aronson ont donc systématiquement exploré deux bases de données médicales, la première depuis 1946, la seconde depuis 1974, avec un seul mot d’ordre et mot-clé : laugh, qui signifie « rire » en anglais.
Leur travail de tri a été impitoyable. Ils ont éliminé tous les articles concernant le rire chez les autres animaux, ceux qui parlaient d’une éponge des Caraïbes malencontreusement nommée Prosuberites laughlini et ceux signés Laughing, Laughter, Laughton ou McLaughlin, lesquels n’étaient ni particulièrement amusants ni liés au sujet. Au terme du tamisage, il leur est tout de même resté 785 articles traitant des bénéfices ou des inconvénients du rire sur la santé humaine.
Dans la première catégorie, remarquons, entre autres, qu’un quart d’heure de rire fait brûler 40 calories ou qu’une bonne tranche de rigolade a le pouvoir de faire exploser un abcès aux amygdales, ce qui économisera une intervention ORL. Les auteurs ont également déniché une savoureuse expérience israélienne au cours de laquelle un clown intervenait en milieu hospitalier auprès de femmes qui venaient de subir un transfert d’embryons après une fécondation in vitro. Le taux de succès (donc de grossesse) montait chez elles à 36 % tandis qu’il plafonnait à un plus modeste 20 % pour les femmes qui n’avaient pas eu droit au numéro du clown. On peut donc naître grâce au rire…
Faudrait-il donc envisager le remboursement des blagues de Toto par la Sécurité sociale ? Pas si sûr, car il semblerait que, dans le versant sanitaire du rire, les aspects négatifs soient au moins aussi nombreux que les positifs. Passons sur le relâchement involontaire des sphincters qui porte le doux nom latin d’enuresis risoria. Moins bénigne, la confirmation que rire à s’en décrocher la mâchoire n’est pas qu’une exagération de langage car le déboîtement de mandibule est une conséquence rare mais réelle de l’hilarité.

Et puis, tout comme l’on peut naître du rire, il est possible d’en mourir. De nombreux cas de syncope sont référencés, le phénomène étant interprété comme la réponse réflexe de l’organisme à l’augmentation de la pression dans le thorax lors d’un fou rire. Des accidents cardio-vasculaires mortels sont aussi possibles, qui montrent qu’entre se fendre la pipe et la casser il n’y a que le temps d’un gag.

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