Médecins à diplôme étranger : qui sont-ils ?
Ils sont tour à tour la solution aux déserts médicaux ou la conséquence subie de décennies de numerusclausus trop serré (une brèche récemment mise en relief par l'affaire de l'Université FernandoPessoa – ou la mise en cause de la « filière roumaine »). Mais qui sont précisément les médecins à diplôme étranger ? Combien sont-ils et où exercent-ils ? La dernière édition de l'atlas de la démographie médicale de l'Ordre (1) permet de s'en faire une petite idée.
Au 1er janvier 2012, 7,4% des médecins inscrits au tableau de l'Ordre étaient titulaires d'un diplôme européen ou extra-européen. Ce contingent de 19 890 praticiens (dont 16 715 en activité) est modeste au regard des 268 000 inscrits au tableau. En Angleterre et en Irlande, la proportion de médecins à diplômes étrangers dépasse 30%, selon les données reprises dans une note du Centre d'analyse stratégique de décembre 2012 (2). Ce contingent est toutefois en constante progression en France : entre 2007 et 2010, le nombre de praticiens de nationalité étrangère a augmenté de plus de 20%.
Rien qu'en 2011, 1 658 médecins nouvellement inscrits à l'Ordre étaient titulaires d'un diplôme étranger. Cela représentait plus d'un quart des nouveaux inscrits (27%). Et il s'agit d'un minimum. Car le CNOMsouligne que de nombreux praticiens de diplôme et de nationalité étrangère exerçant à l'hôpital ne sont pas répertoriés dans son tableau.
Maghreb, Roumanie, Belgique
Où ont-ils été formés ? Une dizaine de pays forment près de 76% de ces praticiens (total des inscrits au 1er janvier 2012). L'Algérie arrive en tête avec 22,7% de diplômés, suivie de la Roumanie (16,6%) et de la Belgique (9,3%). Un tiers des diplômés hors de l'hexagone ont été formés au Maghreb (Algérie, Tunisie et Maroc).
Ce palmarès varie quelque peu si l'on regarde le flux migratoire sur l'année 2011 seulement. Sur cette période, la Roumanie a formé le plus de nouveaux inscrits avec 28% des diplômés, devant l'Algérie (17%). Viennent ensuite la Syrie, l'Italie et la Belgique (5% chacun).
Une population sensiblement plus jeune et qui se féminise
49 ans. C'est l'âge moyen de ces médecins. La tranche des plus de 60 ans ne représente que 10% des effectifs, et les plus jeunes, moins de 35 ans, pèsent pour 3,8%. Cette population est donc sensiblement plus jeune que celle des médecins inscrits à l'Ordre (tous diplômes) dont l'âge moyen est de 51,5 ans, et dont une proposition non négligeable (23,5%) a plus de 60 ans.
On constate que la profession se féminise avec deux fois plus de femmes que d'hommes dans la tranche des moins de 34 ans alors que les hommes représentent 63% de cette population.
Mode d'exercice privilégié : le salariat
Plus de 61% des médecins à diplôme étranger exercent en tant que salariés, alors qu'ils ne sont que 40,6% à faire ce choix parmi les praticiens à diplôme français. L'exercice libéral ne représente que 24,9% (contre 49,2% pour les Français), l'exercice mixte, 11% (libéral et salarié). En 2011, cette tendance s'est renforcée puisque 75,6% des nouveaux inscrits au tableau de l'Ordre choisissaient le salariat.
L'Ordre note toutefois des disparités selon les pays d'obtention du diplôme. 72,9% des médecins formés en Roumanie s'orientent vers le salariat. Idem pour 66% des diplômés algériens. Ce n'est pas le cas de la Belgique et des Pays-Bas : au moins 50% des médecins formés dans ces pays sont des libéraux.
Source : CNOM
Peu de spécialistes
Dans sa note publiée en décembre 2012, le Centre d'analyse stratégique relève que les médecins étrangers sont sous représentés au sein de la population des spécialistes. Ils ne constituent que 3,5% des effectifs. Mais cette proportion augmente considérablement dans certaines spécialités : anesthésie (9,5%), pédiatrie, psychiatrie, gynécologie-obstétrique, urgences. « Ces recrutements [de diplômés étrangers, NDLR], permettent de combler des manques dans les spécialités peu prisées, note le Centre d'analyse, qu'elles soient jugées contraignantes ou peu stimulantes. » Il remarque également que l'embauche de praticiens diplômés à l'étranger ne correspond pas à une politique volontaire de la France mais « découle plutôt des difficultés de recrutement des établissements publics, voire des collectivités et des cliniques privées ».
Un frein aux déserts médicaux
Le Centre d'analyse stratégique note que la présence de ces médecins (particulièrement celle des praticiens formés hors UE) est souvent corrélée à de faibles densités médicales. Exemple en Picardie et dans le Centre. Selon les chiffres du CNOM, ces deux régions ont les plus faibles densités médicales de l'hexagone. À l'inverse, elles sont bien classées au regard de leur population de médecins à diplômes étrangers. La Picardie est le 6e territoire le mieux loti (675 praticiens), le Centre le cinquième (713).
Dans l'absolu, la région parisienne reste prédominante. Elle concentre à elle seule un tiers de cette population, avec 4 954 praticiens, un chiffre bien supérieur à la moyenne constatée par région (732). Arrivent ensuite Rhône-Alpes (1270) et PACA (1071). En bas de l'échelle, la Corse ne compte que 42 praticiens, le Limousin 129 et l'Auvergne 242.
> S. L.
(1) Atlas de démographie médicale 2012 (CNOM)
(2) Note du Centre d'analyse stratégique (Décembre 2012)
(2) Note du Centre d'analyse stratégique (Décembre 2012)
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