Albion va-t-elle manquer de psychiatres ?
Publié le 10/04/2013
Durant la première décennie du XXIème siècle, le nombre de psychiatres en Angleterre a augmenté de 51 % (passant de 2 904 à 4 394), cet accroissement s’accompagnant d’une féminisation très importante (+87 %) de la spécialité. Mais si le renouvellement des professionnels demeure ainsi assuré, les prévisions pour l’avenir sont moins optimistes, car le « spectre » d’une chute des vocations semble menacer la spécialité qui deviendrait désormais moins attractive.
Pourtant, une étude objective de l’intérêt porté à la psychiatrie par les médecins en formation (entre 1974 et 2009) montre une stabilité pendant ces 35 ans, avec environ 4 à 5 % des praticiens attirés par cette discipline, c’est-à-dire une proportion « comparable » à celle observée dans d’autres grand pays comme les États-Unis. On pense toutefois que ce taux ne permettra d’assurer que les deux-tiers des besoins estimés, un tiers des postes risquant de demeurer vacants.
Si ce phénomène de postes non pourvus est classique (des deux côtés de la Manche), il faut noter que le durcissement récent des mesures réglementaires au Royaume Uni (en matière d’immigration et de formalités administratives d’exercice) va compliquer la donne en tarissant le flot des médecins non originaires de l’Union Européenne (traditionnellement preneurs de ces postes vacants), d’autant plus que le nombre de candidats membres de l’Union Européenne sera trop faible pour compenser ce déficit démographique. Ajoutons à cela que la nécessité de maîtriser parfaitement la langue du pays d’accueil (l’anglais) est particulièrement cruciale en psychiatrie où l’entretien résume presque entièrement le recueil d’informations.
Malgré le tassement attendu du nombre de psychiatres en Grande-Bretagne, l’auteur note que ces difficultés de recrutement doivent être analysées davantage en termes qualitatifs que quantitatifs. Dans l’idéal, la spécialité devrait attirer des candidats motivés, plutôt que des médecins se résignant à un « second, troisième, voire quatrième choix. » Et dans ce même état d’esprit d’une spécialité plus « subie » que choisie, il faut aussi veiller au retour de bâton possible d’une féminisation intensive : alors que les femmes psychiatres sont devenues incontournables, leur déclin numérique pourrait entraîner un affaiblissement qualitatif de la spécialité, si ces femmes motivées devaient être remplacées par des hommes moins déterminés, venus à la psychiatrie non par goût, mais par la simple présence de postes disponibles.
Dr Alain Cohen
Davies T: Recruitment into psychiatry: quantitative myths and qualitative challenges. Br J Psychiatry,2013; 202: 163–165.
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