Publié le 20/01/2024
Des patients recouvrant la parole, d'autres déplaçant des fauteuils roulants par la force de la pensée, les prouesses des implants cérébraux s'imposent dans les médias ces derniers mois et suscitent l'émerveillement et un certain effroi.
L'objectif primordial des recherches actuelles réside dans l'augmentation significative du nombre de neurones connectés par une multitude de fibres à un microprocesseur. Cette avancée vise à enregistrer et stimuler l'activité cérébrale, une perspective prometteuse pour le traitement de maladies neurologiques telles que la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson ou l'épilepsie, ainsi que pour l'étude de l'activité neuronale à des fins de recherche.
« L'activité scientifique dans ce domaine a connu une croissance exponentielle, passant de moins d'une dizaine de publications par an dans les années 1980 à plus d'un millier en 2021. Certains travaux récents évoquent même la possibilité d'enregistrer l'activité électrique de milliers de neurones différents dans plusieurs régions du cerveau » observe l'Académie de médecine.
Pourtant, cette activité scientifique s'accompagne désormais de l'intervention d'entreprises de biotechnologie, telles que Synchron, Neuralink, Precision Medicine ou Paradromics, qui ont entrepris des implantations chez l'humain.
Synchron a été la pionnière en 2021 (aux États-Unis) puis en Australie sur quatre patients en 2022. Neuralink, obtenant son autorisation le 26 mai 2023, a ouvert un registre d'inscription pour de potentiels patients. Ces compagnies, dont le fantasque Elon Musk est la figure de proue, n'hésitent pas à afficher leurs ambitions de doter les humains d'implants susceptibles d'améliorer leurs capacités intellectuelles, créant ainsi une classe d'êtres humains « augmentés », comme le soulignent les sages de la rue Bonaparte.
Du danger de sortir de la condition humaine
L'Académie met en garde contre les dangers de cette convergence entre l'homme et la machine, pouvant conduire à « deux nouvelles catégories d'êtres humains. D'une part, ceux dont le comportement, préfiguré par de nombreux utilisateurs actuels de réseaux sociaux, pourrait demeurer sous le contrôle de l'entreprise responsable de l'implant, instaurant ainsi une nouvelle forme d'esclavage. D'autre part, une catégorie disposant de capacités intellectuelles supérieures, susceptible de dominer la population non équipée ».
Dans ce contexte, l'Académie réclame une conférence de consensus qui pourrait éventuellement décréter un moratoire sur l'utilisation des implants cérébraux visant à augmenter les capacités intellectuelles des êtres humains en dehors du cadre des maladies. Elle évoque l'exemple de la conférence tenue à Asilomar en 1975 sur les recombinaisons génétiques et insiste sur l'adoption de règles strictes régissant l'utilisation des données générées par ces implants.
Rappelons que ce n'est pas la première fois que l'Académie sonne l'alarme face aux dangers du transhumanisme. Déjà, en 2020, Francis Galibert écrivait dans le Bulletin de l'Académie : « il est temps de repenser aux limites qui font l'humanité, car il y a encore tant à faire pour faire grandir l'Homme au sein même de son humanité. »
F.H.
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