Pédopsychiatre en CMPP
Dans le champ du soin psychique, les réformes s'imposent désormais au nom d'une idéologie hégémonique à prétention scientifique, dont le concept de "troubles neurodéveloppementaux" est un paradigme très représentatif. Au-delà des injonctions autoritaires, il convient alors d'étudier les enjeux épistémologiques et éthiques sous-jacents
"La vraie science n'est pas réductrice ni totalitaire dans son application. Elle ne se développe que sur un mode critique, dialectise le réel et surtout se conforme aux lois de son objet pour le connaitre" Tony Lainé
Au nom de quoi s’effectue actuellement le démantèlement des institutions de soin, en particulier dans le champ pédopsychiatrique ? Quels arguments scientifiques et/ou idéologiques se trouvent-ils brandis pour justifier les réformes en cours et leur conférer une légitimité, tant sociale qu’académique ?
Eh bien, il est indéniable que l’un des fers de lance de ces tendances lourdes a été l’imposition hégémonique du concept de « trouble neuro-développemental ».
Comme le souligne le Pr Bruno Falissard, « un jour nous nous sommes réveillés et avons réalisé que la notion de « trouble du neurodéveloppement » s’était subrepticement immiscée dans les esprits des pédopsychiatres de la planète au point de ne même plus susciter d’interrogation ».
Or, quelle est la genèse de cette colonisation ubiquitaire réalisée en un temps record, et ayant à la fois envahi les milieux scientifiques, les professionnels, les usagers, mais aussi les pouvoirs publics et les instances dirigeantes ?
Qu’est-ce que ce succès impérialiste vient dire des représentations collectives et des significations imaginaires sociales concernant l’enfance et le mal-être ? Quels sont les déterminants épistémiques et sociaux de cette mutation paradigmatique aux conséquences très concrètes dans l’organisation des soins et les dispositifs pédopsychiatriques ?
Rappelons à nouveau ce que dit Bruno Falissard sur ce sujet : « à partir des années 2005-2010, les psychiatres VIP ont reconceptualisé les maladies psychiatriques en adoptant un courant très antipsychanalytique », à travers notamment l’appropriation du concept de trouble neurodéveloppemental, développé outre-manche par Michael Rutter. A travers ce nouveau paradigme dominant, il s’agissait de considérer l’expression de certains « troubles » infantiles spécifiques comme une « anomalie du développement du système nerveux central qui conduit à un fonctionnement mental déviant ».
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