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jeudi 23 décembre 2021

Interview Comment aider ses enfants déprimés par le Covid : «Si on se sent dépassé, il faut très vite aller consulter»

par Cassandre Leray  publié le 21 décembre 2021 

Pendant la crise sanitaire, la santé mentale des enfants et des adolescents s’est considérablement dégradée. Gwenaëlle Durand, du Syndicat national des infirmiers et infirmières éducateurs de santé, explique comment les parents peuvent aider leurs enfants.

Enquêtes et études le disent et le redisent : la santé mentale des jeunes est mise à mal par la pandémie et son cortège de restrictions. Troubles dépressifs, phobies sociales et scolaires… Dans son rapport annuel de sur les droits de l’enfant, la Défenseuse des droits a de nouveau enfoncé le clou en novembre. Et pas que sur l’ampleur des dégâts engendrés par la crise sanitaire, mais aussi sur le manque criant de moyens pour venir en aide à ces enfants et adolescents en détresse. Les délais d’attente pour avoir un rendez-vous avec un psy sont parfois de plusieurs mois, tandis que les centres médico-psychologiques (CMP) sont débordés et que les infirmières et infirmiers scolaires restent largement en sous-effectifs. Conséquence : de nombreux parents peinent à savoir comment détecter le mal-être de leurs enfants, comment leur venir en aide ou vers qui se tourner.

Gwenaëlle Durand, secrétaire générale du Syndicat national des infirmiers et infirmières éducateurs de santé (Snies-Unsa), souligne auprès de Libération l’importance d’être particulièrement vigilant vis-à-vis des signaux d’alerte et invite les parents à consulter un médecin au moindre doute.

Quels sont les signaux qui doivent tout de suite alerter un parent ?

Les signaux sont multiples et ne sont pas les mêmes selon la tranche d’âge. Le premier des signes pour les enfants, c’est quand ils ne jouent plus. Globalement, l’enfant peut devenir mutique, apathique ou s’isoler. Il peut aussi arrêter de manger, dormir moins ou plus, ne plus avoir envie d’aller à l’école… Chez les collégiens et les lycéens, les signaux d’alerte sont sensiblement similaires. On constate souvent un repli sur soi, ou au contraire, un esprit de rébellion très fort.

Mais surtout, quand un enfant va mal, il ne va généralement pas le dire car il ne sait pas comment exprimer ses émotions. C’est la différence principale avec les adolescents. Eux, il est possible de les questionner, de leur demander ce qui ne va pas. A cet âge-là, ils ont développé des compétences psychosociales et sont donc aptes à exprimer ce qu’ils ressentent.

Détecter cette détresse est parfois complexe, en particulier pour les parents. La dépression de l’enfant est très mal connue. Les parents eux-mêmes ont besoin d’aide dans ces moments-là.

Comment intervenir quand une situation de mal-être est repérée ?

En tant que parent, il faut savoir ouvrir la discussion et rester dans la compréhension et la bienveillance. Surtout, si on se sent dépassé, il faut très vite aller consulter. La première chose à faire, c’est d’aller voir son médecin traitant, qui va évaluer la gravité de l’état psychologique de l’enfant et éventuellement rediriger vers un psychologue ou un psychiatre.

C’est une situation grave et il ne faut pas attendre, sinon l’enfant risque de s’enfoncer dans un mal-être de plus en plus important. C’est difficile d’être le psychologue de son enfant, il y a de l’émotion, et les enfants eux-mêmes n’osent que très rarement se confier à leurs parents. Si engager un échange est trop compliqué, il ne faut surtout pas rester seul et se tourner vers un professionnel.

Vers quels interlocuteurs les enfants et adolescents peuvent-ils se tourner ?

Dans le milieu scolaire, il y a toute une équipe éducative à qui les élèves peuvent s’adresser, mais aussi des infirmières scolaires, quand il y en a dans l’établissement. En revanche, il est très rare qu’un enfant [à la maternelle ou au primaire, ndlr] vienne dire de lui-même qu’il va mal. En collège et en lycée, c’est déjà plus fréquent. Mais globalement, c’est plutôt aux personnels de l’établissement de repérer les signaux et d’aller vers l’élève. Ensuite, la machine se met en route : on parle avec le jeune, puis avec ses parents… Le rôle de l’équipe éducative est central.

On relève tout de même un problème : en cette période de crise sanitaire, en tant qu’infirmière scolaire, on ne parvient plus à apporter ce soutien. Il faut vraiment renforcer les équipes et déployer des infirmiers supplémentaires. A ce stade, nous sommes tellement absorbés par les missions liées au Covid que nous n’avons plus le temps de recevoir les élèves. Pourtant, particulièrement en ce moment, les jeunes ont besoin de parler.


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