Danièle Laufer le 05/12/2018
Ce terme est utilisé à tort et à travers. Car ce n’est pas parce qu’on a un jour « pété les plombs » qu'on souffre de ce trouble psychiatrique. On fait le point.
Autrefois, on aurait dit : « Elle est complètement hystérique. » Désormais, « borderline » est le mot fourre-tout pour qualifier les personnalités hyperémotives, impulsives, impétueuses et archisensibles. Celles qui sont capables de fondre en larmes, de pousser un hurlement ou de s’engueuler avec vous pour une raison qui vous semble anecdotique, mais qui déclenche en elles une violence ou une passion qui vous sidère. Ces femmes volcaniques effraient un peu, car elles sont imprévisibles et déstabilisantes. « Elle est malade ! » Quand il s’agit d’un homme, on considère ça comme plus « normal ». L’agressivité et une certaine dose de violence dérangent plus chez les femmes.
Une maladie des émotions
C’est d’abord et avant tout un diagnostic psychiatrique. Une maladie mentale répertoriée par le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM), l’ouvrage américain de référence en la matière. Un trouble pathologique de la personnalité que l’on appelle également « état limite ». « C’est une maladie des émotions », explique la psychologue clinicienne Laurie Hawkes, qui a consacré plusieurs livres aux hypersensibles et aux borderline dont Une danse borderline(Eyrolles). Elle se caractérise par une grande instabilité émotionnelle. Les véritables borderline sont des écorchés vifs, toujours à fleur de peau, surtout avec les gens auxquels ils tiennent le plus. Comme s’ils voulaient tester l’amour qu’on leur porte et s’assurer qu’on ne les abandonnera pas, car c’est peut-être ce qu’ils redoutent le plus. Ils ont du mal à vivre parce qu’ils prennent tout en plein cœur et en souffrent au point de perdre parfois les pédales et de se faire peur. Justine, 40 ans, est un exemple représentatif de ces personnalités au parcours sensible en dents de scie. Elle a eu plusieurs grandes histoires d’amour dans sa vie, mais elle est toujours célibataire. Elle a changé plusieurs fois d’orientation professionnelle et même de pays. Elle a besoin de donner un sens à son existence, elle voudrait un amour absolu. Consciente que ses exigences tiennent peut-être à son histoire familiale, elle est en thérapie depuis quinze ans. Ça l’aide à vivre, à donner du sens à ses crises d’angoisse et à ses débordements, et à ne pas se laisser engloutir. Est-elle borderline pour autant ? Elle-même ne se considère pas comme une malade, juste comme une personne fragile. Au fil des années, elle a appris à se mettre sous autosurveillance : « Je me connais mieux. Je suis toujours guidée par ma sensibilité, mais je m’expose moins. J’arrive à rationaliser ce que j’éprouve, à repérer l’émotion quand elle va me tomber dessus et à chercher à comprendre d’où elle vient. J’ai appris à accepter ce que je suis et à trouver la distance pour que mon hyperémotivité ne me pose pas trop de difficultés dans ma vie professionnelle, amoureuse ou familiale. » Lorsque le psychiatre qui la suivait lui a annoncé qu’elle était sans doute borderline, elle s’est effondrée. Et puis, elle a relevé la tête et continué à avancer.
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