Publié le 14/12/2018
Deux cent millions de femmes vivent à travers le monde avec une mutilation sexuelle telles que excision ou infibulation, dont 500 000 en Europe, plus 180 000 qui sont susceptibles d’en être victimes à plus ou moins long terme. Un des moyens d’éradiquer cette pratique est de documenter les conséquences physiques, sexuelles, psychologiques et obstétricales des mutilations.
Quatorze femmes âgées de 23 à 41 ans essentiellement originaires du Sénégal et vivant en Espagne ont participé à une étude qualitative phénoménologique qui permet de mieux connaître leur quotidien.
Dans les suites immédiates de la mutilation, ces femmes ont souffert de douleurs intenses qui ont parfois duré plusieurs mois, douleurs qu’elles ne devaient pas manifester sous peine d’apparaître comme faible. A plus long terme elles conservent des séquelles urinaires telles des infections à répétition. Psychologiquement elles souffrent de rappels traumatiques, de troubles du sommeil, de perte d’identité, d’épisodes de rage, d’angoisse, de désespoir et de tristesse.
Leur vie sexuelle est affectée par la crainte des premiers rapports, qui s’avèrent douloureux à plus ou moins longue échéance ; elles décrivent une faible libido parfois associé à une anorgasmie.
Le toucher vaginal est très mal vécu
D’un point de vue de la prise en charge médicale, le toucher vaginal « de routine » durant la grossesse est très mal vécu : ces femmes sont gênées d’être génitalement différentes, surtout si le soignant est un homme. « Tout le monde aurait pu dire : il vous manque quelque chose. Mais personne n’a rien dit », « Je ne suis pas comme vous, je ne suis pas complète ». Elles reconnaissent avoir été bien traitées mais déplorent le manque d’information sur le déroulement de l’accouchement en général et dans le cadre d’une mutilation sexuelle en particulier.
Le personnel médical ne leur a jamais donné d’informations sur les mutilations sexuelles. En conséquences, jusqu’à cette enquête, elles n’avaient pas fait le lien entre la mutilation et leurs difficultés sexuelles. Autant dire que dans ces conditions, rares sont celles qui connaissent la possibilité d’une reconstruction clitoridienne, sans parler de l’opportunité perdue de prévention vis-à-vis des mutilations sur les nouvelles générations.
Lorsqu’un professionnel de santé rencontre pour la première fois une patiente excisée, il semble donc qu’il faille en parler, réassurer sur sa normalité, sur les techniques proposée pour améliorer leur vie psychologique et sexuelle, sur la nécessaire protection des petites filles sur le territoire espagnol et pourquoi pas, leur proposer d’utiliser leur nouveau savoir pour le diffuser après de leur entourage.
Marie Gélébart
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