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samedi 22 septembre 2018

Alzheimer : querelles sur un diagnostic

Par Catherine Mallaval — 
Depuis 2008, Yann Castanier photographie ses grands-parents, atteints, lui, par la maladie d’Alzheimer, puis elle, en 2015, par une démence apparentée.
Depuis 2008, Yann Castanier photographie ses grands-parents, atteints, lui, par la maladie d’Alzheimer, puis elle, en 2015, par une démence apparentée.Photo Yann Castanier. Hans Lucas

Si nul ne conteste la réalité des symptômes ou la souffrance des patients et de leurs proches, Alzheimer continue de diviser. Maladie ou conséquence naturelle du vieillissement ?

Avec l’arrivée de l’automne revient, le 21 septembre, la Journée mondiale de la maladie d’Alzheimer, instituée voilà vingt-quatre ans. Déjà. Déclarée «maladie du siècle», objet de projections catastrophistes alors qu’elle donne des signes de repli, elle poursuit son sinistre parcours. «Aujourd’hui, aucun traitement n’existe pour la guérir. Pourtant, 225 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année en France», martèle ainsi la Fondation de la recherche médicale.
De fait, le moment est particulier. Jamais on n’a autant parlé de cette maladie. Jamais dans le même temps il n’y a eu aussi peu de réponses cliniques à apporter aux malades (et à leurs familles éprouvées). Cette année 2018 a été marquée par la décision de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, de ne plus rembourser les médicaments anti-Alzheimer apparus dans les années 80, la preuve de leur inefficacité, voire de leur toxicité ayant fini par être apportée, et reconnue. Certes, plusieurs «sociétés savantes» (où se regroupent les membres d’une discipline médicale) ont déposé devant le Conseil d’Etat un recours contre cette décision ministérielle, mais il n’a guère de chances d’aboutir.
Soignera-t-on un jour cette maladie avec d’autres médicaments ? Pourra-t-on a minima la ralentir ? Et d’ailleurs, est-ce vraiment une maladie stricto sensu ou un déclin cognitif dû au vieillissement, processus inévitable ? Et par ricochet, faut-il médicaliser la vieillesse ? Le débat est là, qui agite et divise la communauté des médecins. En particulier ceux qui sont en première ligne : les gérontologues. Ainsi, pour Olivier Saint-Jean, qui dirige le service de gériatrie de l’hôpital européen Georges-Pompidou à Paris, la maladie d’Alzheimer ne serait qu’un alias du déclin cérébral qui vient avec l’âge. Alors que pour le professeur Bruno Dubois, le spécialiste français de cette maladie à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, il n’y a aucun doute : Alzheimer est une maladie neurodégénérative clairement identifiable. Elle n’est donc pas, selon lui, l’expression médicalisée de la vieillesse.
Ce débat (que nous organisons dans ces pages) est de taille, tant il interroge la façon dont on peut prendre en charge les milliers de personnes atteintes de déclin cognitif et tant il est chargé des souffrances, pour les intéressés comme pour leurs proches. Ce n’est pas la Fondation Médéric Alzheimer qui contredira cela. Elle qui publie à l’occasion de cette journée un «livre plaidoyer pour préparer la France à relever le défi du vieillissement cognitif». Au programme, 12 défis, tels que «rester le plus longtemps possible en bonne santé cognitive» ou «ralentir l’évolution des déficiences et minimiser leur impact», mais aussi «garantir le respect des libertés et des droits fondamentaux» des malades. Pour contribuer à ce débat délicat, Libération a recueilli les points de vue des professeurs Olivier Saint-Jean et Bruno Dubois.


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